Saint Tanguy
Abbé en Bretagne
Gurguy, canonisé saint Tanguy de Locmazhé († 594), fut un moine breton de Gerber (Le Relecq).
Il a fondé l'abbaye de Saint Matthieu au Conquet.
Il est inhumé à Locmazhé (Finistère).
Saint Tanguy est fêté le 19 novembre, le lendemain de la fête de sainte Aude de Trémazan, sa sœur, ou le 12 mars, jour de la fête de son père spirituel, saint Pol Aurélien.
La légende
Statue du saint en la chapelle de Kersaint
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Selon certaines sources, l’histoire de Tanguy et Haude (qui vivaient au VIe siècle) fut écrite, ou réécrite, au XVe siècle par les seigneurs du Chastel de Trémazan pour enjoliver leur lignage.
Voici l’histoire telle que l’écrivit Albert Le Grand en 1637 (édition revue et corrigée en 1901).
Enfance de Gurguy et Haude
Galonus, seigneur de Trémazan, épousa en première noces Florence, fille d’Honorius, prince de Brest.
Ils eurent des enfants, dont Haude et Gurguy.
Mais Florence mourut, les laissant orphelins en bas âge. Galonus alla chercher une nouvelle femme en Grande-Bretagne, mais cette femme rudoya et maltraita les enfants en vraie marâtre durant 8 ans.
Gurguy, déjà grand, demanda congé à son père et partit à la cour du roi Childebert, où il resta pendant 12 ans.
Haude, elle, était résolue, pour l’amour de Dieu, à supporter sa marâtre, qui la haïssait en raison de sa vertu et de sa piété. Elle la chargeait de corvées mais Haude obéissait, et priait la nuit si ses corvées l’empêchaient d’assister à la messe. Elle prenait sur son ordinaire pour donner aux pauvres.
La méprise de Gurguy et la mort d’Haude
On croyait Gurguy mort, et Haude devint un bon parti car elle était belle mais aussi héritière de grands biens. Des seigneurs vinrent la demander en mariage, mais la marâtre, jalouse, dit du mal d’Haude et l’exila dans une ferme voisine. Gurguy revint alors incognito à Trémazan et s’étonna de l’absence de sa sœur. La marâtre, croyant que c’était un prétendant, lui dit qu’Haude était une fille perdue. Gurguy, croyant à ces calomnies, chercha sa sœur, et l’ayant trouvée près d’une fontaine, l’appela par son nom. Haude ne reconnut pas son frère, parti depuis longtemps, prit peur et s’enfuit. Gurguy prit cette fuite pour un aveu de honte en raison de sa mauvaise conduite, et, en colère, lui trancha la tête. Mais des voisins lui dirent à quel point Haude était sage et vertueuse, et Gurguy se rendant compte de son erreur se présenta chez son père, se fit reconnaître et avoua son crime. Haude se présenta alors, tenant sa tête dans ses mains, et elle la posa sur son cou où elle se ressouda. Haude se tourna vers sa marâtre et lui dit qu’elle serait punie par Dieu. Et en effet elle se vida de ses boyaux et fut foudroyée sur place. Haude se tourna ensuite vers son frère et lui dit que la Sainte Vierge avait obtenu son pardon. Haude pardonna elle aussi à son frère et rendit l’âme en ce 18 novembre de l’an de grâce 545.
Vie religieuse de saint Tanguy
Gurguy s’en alla trouver Saint Pol Aurélien, évêque de Léon, qui lui enjoignit un jeûne de 40 jours (à Coat Tanguy = bois de Tanguy en breton). Puis il changea son nom en Tanguy (de tan= feu en breton) et le nomma abbé de Gerber.
Tanguy avait reçu de son père une terre à la pointe du cap de Pennarbed (Finistère), près de laquelle un navire transportant les reliques de Saint-Matthieu fut sauvé miraculeusement du naufrage et le cap fut appelé Loc-Mazhé-Traon (Mazhé = Mathieu en breton, donc pointe Saint-Mathieu).
Tanguy y construisit un monastère et Saint Pol le nomma abbé.
Il rendit l’âme le 12 mars de l’an 594, le même jour que Saint Pol Aurélien à Batz.
Il fut enterré à Loc-Mazhé (Saint-Mathieu).
Saint Tanguy est fort révéré en Bretagne et les seigneurs Du Chastel ont souvent porté le nom de Tanguy (ou Tanneguy) et ont fait édifier une chapelle à Kersaint en son honneur et en celui de sa sœur sainte Haude.
Extrait d'une chanson bretonne relatant les faits
A Castel Tremazan, e parrez Landunvez
Galon, eun digentil euz ar c'haëra lignez,
A zeuas da eureugi, evit quenta pried,
Merc'h ar Prins euz a Vrest Florence voa hanvet,
Bugale o dévoé, mez oll n'hon hanvon quet :
Unan eo sant Tanguy, eun ail santez Eodet.
Du château Trémazan, en paroisse Landunvez
Galon, un gentilhomme de la plus belle lignée
Vint à se marier, et pour première épouse
A fille du Prince de Brest, Florence était appelée.
Des enfants ils avaient, mais tous ne les connaissons pas
Un était saint Tanguy, une autre sainte Haude.
Tanguy trompé par les calomnies de sa marâtre décapite sa sœur Haude
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Sainte Haude annonce à son frère Tanguy qu'elle a obtenu son pardon de la sainte Vierge
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Saint Pol Aurélien remet à saint Tanguy l'habit monastique
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Sainte Haude
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Fontaine Sainte Haude
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Panneau posé près de la fontaine Sainte Haude
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Source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Saint_Tanguy
I
- Durant l'absence de Jugduval, Roy de Bretagne Dononée, lequel
s'estoit refugié en France vers le Roy Childebert, environ l'an de grace
525. il y avait en Bretagne un noble Seigneur, nommé Galonus, Seigneur
de Tremazan, lequel, en premieres nopces , épousa la fille de Honorius,
Prince de Brest, nommée Florence ; duquel mariage enteautres enfans,
issirent ces deux, Haude & Gurguy, lesquels furent, par leur mere,
élevez soigneusement en la crainte de Dieu ; & si-tost que l'âge luy
permit, elle les fit instruire, Gurguy és bonnes Lettres, & Haude
és exercices seant à son sexe & à sa qualité. Sur ces entrefaites,
la bonne Princesse tomba malade & mourut, les laissant orphelins en
fort bas âge ; & les funérailles & bout de l'an expirez, Galonus
(qui estoit encore jeune), se voulut remarier, &, ne trouvant party
à son gré deça la mer, rechercha en la Grande Bretagne une belle dame,
riche & de bonne maison, mais infectée de l'heresie de Pelagius
& fort opiniastre en ses erreurs; cette recherche ayant réussi, au
desir de Galonus, il passa la mer, &, l'ayant épousée, l'emmena en
son pays.
II
- Cette nouvelle dame ne fut gueres en son ménage, qu'elle commença à
regarder de travers nos jeunes Saints & se montrer vraye marastre en
leur endroit ; elle les rudoyoit & maltraitoit de parole & de
fait & leur tint ces rigueurs huit ans durant ; lesquels expirez,
Gurguy, déja grand, & à qui le sang commençoit à boilillonner dans
les veines, ennuyé d'estre si mal-traité par cette femme, dans la maison
de son pere, se résolut de quitter le pays pour quelque temps, & en
obtint congé de son Pere, lequel luy donna une bonne somme d'argent
& train honorable. Il alla à Brest prendre congé de son ayeul
Honorius, & puis monta sur mer, &, dans peu de jours, fut porté à
la coste de Normandie (lors appellée Neustrie), descendit à Cherbourg,
& delà alla par terre à Paris, où il demeura prés du Roy Childebert,
l'espace de douze ans, sans se donner à connoître , paroissant sur les
rangs és tournois & courses, & se faisant signaler entre les
plus vaillans & courageux qui se trouvoient en cette cour. Le Roy,
ayant reconnu les belles perfections qui estoient en luy, le retira prés
de soy & luy donna honneste appointement en son palais.
III -
Incontinent aprés que Gurguy s'en fut allé, sa soeur Haude se resolut
d'endurer, pour l'amour de Dieu, les traverses que sa marastre luy
donneroit; laquelle ne manqua à déploier sa rage sur elle, en haine de
sa vertu, & spécialement de sa Religion. Elle luy osta son cabinet
et Oratoire, congedia la pluspart de ses damoiselles & servantes
pour l'obliger à faire le service de la maison, méme de la cuisine,
puiser l'eau & balaier les salles & chambres. Quand on sonnoit
la Messe en la Chapelle du chasteau, elle l'occupoit expressement à
quelque service, pour la priver de cette consolation de son Ame ; &,
neanmoins , jamais la sainte fille ne s'en offensa, & ne luy
échappa jamais parole d'impatience, mescontentement, ou murmure. Elle
obeïssoit gaillardement à son pere & à sa marastre, les servant
gayement & promptement ; &, d'autant que, le jour, elle ne
pouvoit vacquer à ses prieres & exercices de dévotion, pour la
multitude d'occupations qu'elle avoit, elle y vacquoit la meilleure part
de la nuit, qu'elle employoit en prieres & meditations ; elle
frequentoit les Sacremens ; &, par l'avis de son Confesseur,
Chapelain de son pere, elle se resolut de ne se jamais marier, mais de
prendre Jesus-Christ pour unique époux de son Ame. Elle étoit si
pitoyable vers les pauvres, que, voyant que sa marastre avoit retranché
les charitez et aumônes qu'on faisoit du vivant de sa deffunte mere,
elle retranchoit de son ordinaire pour leur bailler, se contentant pour
soy de gros pain sec & de viandes grossieres.
IV - Galonus,
admirant la patience de sa fille & voyant la sainte vie qu'elle
menoit, en étoit émerveillé & reprenoit souvent sa femme de
l'indignité dont elle usoit envers une si vertueuse fille ; mais la
malicieuse heretique ne manquoit non plus de langue pour calomnier la
sainte fille & colorer sa malice, que de cruauté pour l'affliger ;
&, l'ayant, un jour, trouvée porter l'aumône aux pauvres, elle la
battit outrageusement & jetta par terre le pain qu'elle portoit, le
foula aux pieds & le fit jetter aux chiens. Haude prit patience
& ne luy repliqua mot, ny ne s'en plaignit. Cependant, Gurguy, son
frere unique, estoit à Paris à la cour, mais inconnu, & n'avoit
mandé de ses nouvelles depuis son départ, de sorte qu'on le croyoit mort
; ce qui donna sujet à plusieurs jeunes Seigneurs de rechercher Haude
en mariage, tant pour sa rare beauté & ses belles qualitez d'esprit
& de corps, que pour les grands biens dont elle devoit joilir. Ces
seigneurs vinrent voir son pere & luy firent ouverture de leurs
desirs, dont il fut bien aise. La sainte Fille, qui avoit promis à Dieu
de garder inviolablement le lys de sa virginité, fut troublée de ces
recherches & supplia nostre Seigneur de la delivrer de ce danger ;
Dieu l'exauça, & de la malice de sa marastre tira un préservatif de
sa chasteté ; car cette malicieuse femme, apprehendant l'avancement de
Haude, l'envoya en une sienne metairie, luy deffendant de s'en
retourner, qu'elle ne fut mandée. Haude remercia nostre Seigneur de
cette faveur & se retira de la maison paternelle en ce lieu, où elle
pouvoit vacquer, sans aucun empeschement, aux exercices de piété ;
&, par son exemple, attira plusieurs filles au service de Dieu.
V
- Ayant passé deux ans en cette metairie, son frere Gurguy s'en vint au
pays, si brave & en tel équipage, qu'on ne le pouvoit connoître ;
&, ayant oûy déja que sa soeur estoit si mal menée par sa marastre,
il en voulut avoir claire connoissance & deffendit à ses gens de le
nommer, ny dire qui il estoit. Il frappa à la porte du chasteau de son
Pere , & fut conduit en une salle où estoient plusieurs jeunes
Damoiselles, lesquelles il salûa, &, n'y voyant pas sa soeur,
demanda où elle estoit : sa marastre, voyant que ce jeune Seigneur luy
portoit de l'affection, &, craignant qu'il ne la voulust rechercher
en mariage, le tira à part, & lui déchiffra Haude comme une fille
perduë & abandonnée ; &, que pour éloigner une telle infamie de
la maison, on avoit esté contraint de l'envoyer aux champs; Gurguy crût
trop legerement aux calomnies de cette femme & s'en alla chercher sa
soeur, ayant laissé ses gens au château de son pere; &, l'ayant
trouvée prés d'une fontaine, lavant quelques hardes, l'appela par son
nom; elle, qui ne le connoissoit plus, à cause qu'il avoit esté si
long-temps absent, ne sçachant à quelle lin il l'appelloit, laissa ses
hardes & s'enfuit vers la maison ; Gurguy, se souvenant des propos
que sa marastre luy avoit tenus de sa soeur, s'imagina qu'elle auroit
forfait à son honneur; &, l'ayant reconnu, n'auroit osé se presenter
devant luy.
VI – Cette fausse impression le mit tellement en
colere, que, mettant la main à l'épée, il la poursuivit vivement; &,
l'ayant attrapée, luy déchargea un si grand coup sur le col, qu'il luy
trancha la teste, &, le corps estant tombé par terre, Gurguy vid son
sein moûillé ; &, l'ayant ouvert, il trouva de gros caillons de
lait qu'elle y avoit cachez ; &, ne sçachant ce que cela vouloit
dire, il s'enquit des voisins quelle vie menoit Haude, & aprit d'eux
que e'estoit une sage, sainte & vertueuse damoiselle, qui menoit
une vie exemplaire & avoit estonné tout ce pays de l'admirable
patience, dont elle supportoit les outrages de sa marastre, laquelle la
traitait si indignement, que, non contente de l'avoir chassée de la
maison de son pere, & envoyée en ce chetif hameau, elle luy dénioit
le boire & le manger ; &, nonobstant cela, elle ne desistoit de
ses pieux exercices, s'exerçant aux oeuvres de misericorde ; &, ne
pouvant partager sa pitance avec les pauvres, pour estre éclairée de
prés par ceux que sa marastre avoit commis pour épier ses actions, elle
faisoit cuire des caillons de lait qu'elle cachoit en son sein, pour
bailler aux pauvres, desquels elle estoit la vraye mere &
consolatrice.
VII - Gurguy, ayant oûy ce recit, pensa mourir sur
le champ de déplaisir, voyant qu'au seul rapport de sa marastre, dont il
connoissoit la malice, & la haine qu'elle portoit à sa soeur, il
l'avoit si malheureusement massacrée : il s'en retourna chez son pere,
auquel il se donna à connoistre & luy recita ce qu'il avoit fait,
& que, de sa propre main, il avoit malheureusement tué sa chere
soeur Haude. Galonus fut extremément affligé de cette triste nouvelle,
laquelle fut d'autant plus agréable à sa femme, qu'elle haïssoit Haude ;
mais Dieu, qui tire l'huile du rocher, tira de ce massacre la
conversion de Gurguy, & punit exemplairement la malice de sa
marastre ; car, tout estant en dueil pour cét accident, sainte Haude
entra dans la salle où estoit son pere, son frere & sa marastre,
tenant sa teste en ses mains, laquelle ayant posée sur son col se réunit
à son tronc; merveille qui estonna toute l'assistance.
VIII -
Alors, sainte Haude, se tournant vers sa marâtre, luy reprocha ses
perfidies & son opiniâtreté en ses erreurs, & luy dit que, puis
qu'elle ne se vouloit amender, Dieu la puniroit presentement ; &, à
l'instant, elle fut saisie d'un flux de ventre si violent, qu'elle vuida
tous ses boyaux & intestins & fut saisie d'une telle manie
& rage, qu'elle foula de ses pieds ses boyaux espandus par la place ;
&, les forces luy manquans, enfin elle tomba dessus, & alors il
se fit un horrible éclat de tonnerre, dont le carreau, tombant en cette
salle, foudroya cette mechante heretique, en presence des assistans ;
& sainte Haude se tournant vers son frere Gurguy, le consola &
luy dit : « Quand vous me poursuivistes & me mistes à mort, je ne
vous connoissois pas, & mon sang innocent, par vous respandu, crioit
déja vengeance devant le Trosne de Dieu ; niais, vous ayant connu,
& sceu par qui vous aviez esté poussé à ce fratricide, j'ay prié
Dieu pour vous, & supplié sa sainte Mere d'obtenir vostre pardon,
& de détourner la punition sur vostre marastre. » Gurguy, plus mort
d'effroy que vif, se rasseura quelque peu ; &, s'estant prosterné
aux pieds de sa soeur, luy demanda pardon ; &, incontinent, la
sainte Vierge Haude, ayant devotement reçû ses Sacremens, rendit son
heureux esprit, le 18. novembre l'an de grace 545. Auquel jour, les
Breviaires anciens de Leon & Cornoftaille en font memoire. Son corps
fut inhumé en l'Eglise parrochiale de Landunvez, au Sepulcre de ses
Ancestres, où Dieu l'a illustrée de grands miracles.
IX - Si-tost
que la Sainte eut rendu l'esprit, Gurguy sortit de la maison de son
pere & s'en alla en la ville d'Occismor, trouver S. Paul, Evesque de
Leon, lequel le receut amiablement, l'ouït de Confession & luy
enjoignit un jeusne de 40. jours : Gurguy receut humblement cette
penitence ; &, pour mieux l'accomplir, se retira en une forest, qui
estoit entre les villes de Land-Terne & Brest, où il se bastit une
petite loge & y passa sa quarantaine en continuelles prieres,
veilles & larmes, ne se substantant que de racines, de glands, de
meures & autres fruits sauvages : car il n'avoit porté en ce lieu
aucune provision, mais s'estoit entierement jetté entre les bras de la
Providence de Dieu, laquelle ne luy manqua pas; car, au bout des 40.
jours, comme il prioit, la face prosternée contre terre, un corbeau, qui
avoit son nid en un arbre auprés de sa cellule, luy apporta un beau
pain blanc, par le commandement de celuy qui, par le ministere de
semblables oyseaux, avoit jadis substanté les Helies, Pauls &
Antoines dans les deserts. Gurguy receut ce pain, rendit grâces à Dieu,
& s'en substanta ; &, en memoire de cette penitence du Saint, ce
lieu s'appelle encore à present Coat-Tanguy, c'est à dire Boys ou
Forest de Tanguy.
X - Ayant accomply sa penitence, il vint vers
son Prélat S. Paul, lequel il trouva dans la salle de son manoir
Episcopal, avec cinq ou six de ses Chanoines ; &, si-tost qu'il
parut dans cette salle, saint Paul & ceux qui l'accompagnoient
virent sa teste environnée d'un globe de feu, en forme de guirlande ou
cercle flamboyant, dont ils furent bien étonnez, & de là S. Paul
prit occasion de luy changer son nom, & voulut qu'au lieu de
Glu-guidas il s'appelât, desormais , Tanguidus. du mot Breton Tan, qui
signifie Feu : Tanguy se jetta aux pieds de saint Paul, luy demanda sa
benediction & le supplia humblement de le vouloir recevoir en son
monastere de Bâaz ; ce que S. Paul luy accorda, & luy donna l'habit
de son Ordre audit Monastere, auquel il vécut en une si grande sainteté
& perfection, que saint Paul, ayant fondé le Monastere de Gerber
(ruiné depuis par les Normands), l'en fit premier Abbé, luy donnant
douze Religieux pour peupler son nouveau Monastere, lesquels il tira des
Monasteres de Bâaz & d'Oûessant.
XI - En cette Prélature, il
fit paroître l'excellence de ses vertus & les belles qualitez dont
il estoit avantagé ; il amassa nombre de Religieux, & y attira, par
son exemple, plusieurs jeunes Gentils-hommes, lesquels donnerent des
terres, heritages & revenus pour l'entretien du Monastere ; tous
lesquels il gouvernoit avec une singuliere prudence & rare exemple
de sainteté : Il estoit doux & charitable envers son prochain ; mais
envers soy-même rude & austere, sobre, patient, humble, &
tellement assidu à l'Oraison, qu'il sembloit à ceux qui le frequentoient
estre toûjours ravy & absorbé en Dieu. Il alloit souvent voir son
maître S. Paul à Occismor, pour luy communiquer de ses exercices &
recevoir ses sages avis touchant le gouvernement de son Monastere. Ayant
ouy dire que le Seigneur de Tremazan, son pere, déja caduc & vieil,
estoit malade, il le fut visiter & consoler, le disposant à bien
mourir; le bon vieillard fut fort rejouï de voir son fils & luy
donna plusieurs terres & heritages, tant pour son Monastere de
Gerber que pour en fonder d'autres, s'il le jugeoit à propos ; &,
entr'autres, lui donna depuis le cap de Pennarbed, en bas Leon (qu'à
present on nomme Saint-Mathieu de fine
terre, ou du bout du monde),
le long de la mer, qui du grand Ocean Occidental entre dans le goulet du
golphe de Brest, jusqu'à la riviere de Caprel (c'est à dire le Havre de
Brest), comprenant partie du bourg de Recouvrance, au dessus duquel se
voit, encore à présent, une ancienne tour ronde, à demie ruinée, que les
anciens appeloient la Bastille de Quilbignon & à présent s'appelle
la Motte-Tangug, sous laquelle y a quelques
maisons qui appartiennent aux Seigneurs du Chastel Tremazan.
XII
- Quelques temps aprés , une flotte de navires Leonnois qui estoit
allée trafiquer en Egypte, trouva moyen d'enlever subtilement le chef du
glorieux Apostre & Evangeliste S. Mathieu, lequel ils emporterent
en Bretagne ; ayans passé le Raz de Fontenay, sans danger, comme ils
vouloient doubler le cap de Pennarbed, l'admirai, qui portoit la sainte
Relique, heurta de roideur un grand escueil qui paroissoit à fleur d'eau
; alors, ceux qui estoient dedans crierent misericorde , pensans estre
tous perdus ; mais (chose merveilleuse !) le roc se fendit en deux,
donnant libre passage au vaisseau qui étoit chargé d'un trésor si
precieux, lequel ils mirent à terre à la pointe dudit cap & allerent
rader au havre du Conquest, qui est là auprés ; &, en memoire de ce
miracle, ce cap fut appelé Loc-Mazhé-Traoun, c'est à dire, lieu
Occidental consacré à S. Mathieu, auquel saint Tanguy (à qui cette terre
appartenoit) se resolut de construire un Monastere par la permission de
S. Paul.
XIII - Saint Tanguy vouloit edifier au même endroit
auquel le Chef du saint Apostre avoit esté posé, lors qu'on le descendit
du navire, tout sur la pointe & derniere extremité du cap ; mais
plusieurs jugerent ce lieu incommode, pour estre sur le bord de l'Ocean,
&, par consequent, exposé aux furies des vents, & sujet aux
descentes des corsaires, & étoient d'avis de le bastir plus avant en
terre ferme, à cinq ou six cens pas de là. S.Tanguy se laissa aller à
leur opinion & fit charroyer les materiaux en ce lieu & ouvrir
des fondemens; mais Dieu montra, par un miracle évident, qu'il vouloit
que ce Monastere fut edifié au lieu que le Saint avoit premierement
choisi; car, quand ils commencerent à travailler au massonnage, ce
qu'ils avoient fait en un jour, ils le trouvoient, le lendemain,
miraculeusement transporté au premier lieu ; ce qu'estant arrivé
plusieurs fois, ils continuerent l'edifice audit lieu, avec telle
diligence qu'en peu de temps l'edifice fut accomply, & S. Paul benit
le Cimetiere, dedia l'Eglise & ordonna que S.Tanguy le peupleroit
de Moynes de son Abbaye de Gerber, & en seroit Superieur en titre
d'Abbé.
XIV - Il accomplit promptement cette obeïssance &
fit venir huit des Religieux de Gerber, ausquels, avant le bout de l'an,
il associa grand nombre d'autres qui y prinrent l'habit. Une fois
entr'autres, le saint Abbé voulant aller à Occismor, voir son Maître
& Pere S. Paul, le rencontra en la Paroisse de Drenec, és rabines
d'une maison noble ; aprés s'estre saluez, ils se retirerent tous deux
seuls dans le bois de cette noblesse, ayans laissé leurs compagnons
quelque peu à quartier, &, aprés une longue conference, s'étans mis
en Oraison, ils furent recréez d'un concert melodieux de voix
Angeliques, &, à même temps, un Ange leur apparut, leur donnant avis
que, dans peu de jours, ils sortiroient de cette vallée de larmes &
iroient jouir de la Couronne preparée à leurs merites. Les Saints se
réjouirent extremément de cette bonne nouvelle ; &, à cause de cette
apparition Angelique, cette maison noble fut nommé Coat-Elez, c'est à
dire Bois aux Anges, nom qu'elle retient encore à present, & est
distante de la ville de Lesneven de deux lieuês
XV - Saint Paul,
ayant pris congé de son cher Disciple, se retira à Occismor, &
S.Tanguy en son Monastere de Gerber, où il fut reçu de ses Religieux
avec un extrême contentement ; mais leur joye ne fut gueres longue, car
il leur donna avis de la revelation qu'il avoit euê & leur nomma le
jour qu'il decederoit. Dés le lendemain, il tomba malade, reçût ses
Sacremens, donna ordre aux affaires de son Monastere, &, ayant donné
sa benediction à ses Religieux, rendit son Ame és mains de son
Createur, le 12. mars l'an 594. le même jour que mourut S.Paul en son
Monastere de Bâaz. Son Corps fut lavé & revêtu de ses ornemens
Abbatiaux & porté à l'Eglise, en attendant l'appareil de son convoy ;
lequel appresté, il fut reverement porté de sondit Monastere de Gerber à
celuy de Loc-Mazhé, où il fut ensevely dans le Cimetiere que S.Paul
avoit beny, où Dieu a fait plusieurs Miracles par son intercession. On
admira en ce convoy, qu'encore bien qu'il fit un vent du nord fort
violent, toutesfois, jamais aucune des torches, ou luminaires qu'on
portoit ne s'esteignit, le long du chemin, qui estoit d'environ quinze
lieuês, ny aucun de la compagnie ne se sentit incommodé. Ce Saint a esté
fort reveré en Bretagne, & le Pelerinage de son Abbaye de S.
Mathieu est l'un des plus celebres de la province. Les Seigneurs du
Chastel ont souvent porté le nom de Tanguy ; desquels plusieurs se sont
fait signaler & renommer dans les Histoires Françoises &
Bretonnes ; les mêmes Seigneurs ont fondé, prés de leur chasteau de
Tremazan, une belle chapelle en l'honneur de ces Saints, qui s'appelle
Ker-Seant, c'est-à-dire, la Ville aux Saints, où il y a des Chanoines
pour faire le service.
Source : http://www.atelier-st-andre.net/fr/pages/oeuvres/tanguy.html
Gurguy était le fils du tiern Galon, seigneur de Trémazan en Landunvez. Ce dernier avait épousé Florence, la fille d'Honorius, prince de Brest.
Ils eurent deux enfants, Gurguy et Aude qui furent éduqués dans la religion chrétienne.
Après la mort de leur mère, Gurguy et sa sœur Haude furent élevés par une marâtre venue de Grande Bretagne et adepte de la secte de Pélage.
Gurgy lui échappa pendant douze années, car il vécut loin du château paternel, à la cour du roi Childebert.
Aude, au contraire, endurait mille misères et mille calomnies, sa belle mère dechaînant sa colère contre elle.
De son statut de princesse, elle passa à celui de "Cosette" ou de "Cendrillon". Elle fut reléguée dans une métairie avec interdiction de revenir au château.
Celà dura deux ans jusqu'au retour de Gurguy qui fut surpris de ne pas trouver sa soeur au château. Pour toute explication la marâtre fit passer Aude pour une "fille perdue".
Furieux, Gurguy partit à la recherche de sa sœur. Aude ne le reconnut pas et s'enfuit effrayée.
Prenant cette fuite pour un aveu, Gurguy la décapita...
Mais quand Haude lui apparut quelques heures plus tard tenant sa tête entre ses mains, et qu'elle lui conta les méchancetés et les mensonges qu'elle supportait depuis des années, Gurguy sut qu'il avait tué une sainte et non une pécheresse.
La sainte jeune fille recommanda à son frère de faire pénitence.
Elle mourut le 18 novembre 545 et fut inhumée dans l'église paroissiale de Landunvez.
Désespéré, Gurguy fit longtemps pénitence et décida de se faire moine.
Il se présenta devant Saint Pôl Aurélien, évêque du Léon. Celui-ci le voyant entouré d'une aura de feu lui demanda de changer son nom de GurGuy en Tan-Guy ( en breton : Tan veut dire Feu ), le fit premier abbé du monastère de Gherber (qui sera ruiné par les Normands, puis deviendra l'abbaye cistercienne du Relecq).
Lorsque son père mourut, Tanguy, hérita de terres qui s'étendaient depuis la rivière du Caprel (havre de Brest) jusqu'à Pen ar Bed.
C'est ce lieu de Pen ar Bed qu'il allait choisir pour édifier un monastère dont il allait être, toujours selon la tradition, le premier abbé.
La tradition affirme que Saint Tanguy mourut le 12 août 594, le même jour que Saint Pôl Aurélien
Là encore, la légende prend le pas sur l'histoire.
Tanguy, raconte-t-elle résolut de construire l'abbaye à l'endroit même où la relique de Saint Mathieu avait été déposée.
On l'en dissuada et on le décida à choisir un endroit un peu plus éloigné de la mer.
Mais Dieu veillait à ce que la première idée du saint soit respectée : pendant la nuit, les matériaux entassés gagnèrent d'eux-mêmes l'emplacement que Tanguy avait primitivement choisi.
L'abbaye de Saint Mathieu s'éleva donc en ce lieu où Saint Pôl vint la bénir.
Saint Pôl vécut au VIe siècle, donc la fondation du monastère daterait de l'époque où il était évêque de Léon, vers 550-580.
On voit que cette date ne s'accorde guère avec celle de la translation de la relique de Saint Mathieu.
Histoire et légende se confondent... Mais il est tout de même intéressant de se demander ce qu'est devenue cette fameuse relique de Saint Mathieu.
Après la mort de Salomon, elle fut enlevée en 875 par les « écumeurs des mers ».
En 954 et en 1075, on la retrouve à Saleme en Italie...
En 1206, le « chef » (le crâne) aurait été rapporté de Palestine par Hervé 1° vicomte de Léon.
Les moines vont pouvoir le vénérer de nouveau et cela pendant plusieurs années, puisqu'au XVIIIe siècle ils prétendent la posséder toujours...
Source : http://breton.coatmeal.free.fr/textes_stmathieu/sainttanguy_legende.htm
En savoir plus : http://tremazan.lepla.com/Legende.html
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