Saint Moïse l'Éthiopien († 400)
anachorète en Égypte
Moïse l'Éthiopien, connu aussi comme Moïse le Noir ou Ampa Moussa dans l'Église copte orthodoxe, est un saint du IVe - Ve siècle.
Il est fêté le 28 août.
Éléments biographiques
Chef de brigands converti, il dut « forcer la porte » d'une communauté monastique de Scété pour y être admis.
Il ne renonça pas toujours à la violence, et il lui arriva de traîner
de force d'anciens compagnons de brigandage — qui l'avaient attaqué —
jusqu'à l'église de Scété, pour que les anciens décident de leur sort.
Par cette évangélisation expéditive, il amena à la conversion de nombreux bandits qu'il enseigna dans la voie du Christ.
Ayant acquis une grande réputation de sainteté, il refusait toute forme d'honneur, et supportait les offenses.
Il mourut après le sac de Scété par les « barbares » en 410.
Sources
Moïse l'Éthiopien est connu par les Apophtegmes des Pères du désert, ainsi que par l'Histoire lausiaque de Pallade.
- Deux exemples d'apophtegme
- « Un frère à Scété commit une faute. On tint un conseil auquel on invita abba Moïse. Mais il refusa de s'y rendre. Alors le prêtre envoya quelqu'un lui dire : “Viens, car tout le monde t'attend.”» Alors il se leva et partit. Il prit une corbeille percée, la remplit de sable et la porta. Les autres sortant pour aller à sa rencontre, lui dirent : “Qu'est-ce que ceci, Père ?” Le vieillard leur dit : “Mes péchés s'écoulent derrière moi et je ne les vois pas, et je viens aujourd'hui pour juger la faute d'un autre.” Entendant cela, ils ne dirent rien au frère, mais lui pardonnèrent. »
- « Une fois, on donna ce commandement à Scété. Jeûnez cette semaine. Or il se trouva que des frères vinrent d'Égypte chez abba Moïse qui leur fit cuire quelque choses. Voyant de la fumée, les voisins dirent aux clercs “Voici que Moïse a violé le commandement et s'est fait quelque chose chez lui.” Ils dirent : “Lorsqu'il viendra nous lui parlerons nous-mêmes.” Lorsque vint le samedi, les clercs, sachant la remarquable façon de vivre d'abba Moïse, lui dirent devant tout le monde : “Ô abba Moïse, tu as supprimé le commandement des hommes mais gardé celui de Dieu !” »
- Source
Le bienheureux Moïse était Ethiopien de race et avait l'âme aussi noire que la peau.
Il était esclave au service d'un magistrat, qui le chassa à cause des vols et des mauvaises actions qu'il avait commis.
Il devint alors chef d'une bande de brigands qui ne reculaient devant
aucun moyen - fût-ce le meurtre - pour accomplir leurs larcins.
Cependant, à l'occasion d'un accident qui lui survint, la conscience de
Moïse se réveilla.
Touché par l'amour du Christ, il prit en haine le péché ainsi que sa vie passée, et résolut de montrer un ardent repentir.
Après avoir été baptisé, il se retira aussitôt au désert de Scété, dans
un lieu solitaire et dépourvu de consolation humaine, au point qu'il
n'avait même pas un peu d'eau pour réconforter son corps desséché par le
soleil et par les labeurs de l'ascèse.
Un
jour, quatre brigands se jetèrent sur lui alors qu'il était assis dans
sa cellule. Moïse, qui était doté d'une force prodigieuse, les ligota et
les portant sur son dos comme un sac de paille, il les amena à
l'église, en disant : « Il ne m'est pas permis de faire du mal à
quiconque. Qu'ordonnezvous pour ces gens-là ? »
Apprenant
qu'il était Moïse, le célèbre chef de bande, les quatre hommes se
dirent que si un tel scélérat en était venu à servir Dieu, le salut
n'était pas loin d'eux aussi, et ils devinrent moines.
Malgré
son repentir et ses combats ascétiques, Moïse continuait cependant à
être assailli par l'habitude des passions, cette seconde nature, qui
était si profondément enracinée en lui qu'il dut mener pendant dix ans
un combat implacable contre le démon de la fornication.
Un
jour, alors qu'il était près de céder au désespoir et d'abandonner la
lutte, il rendit visite au grand abba Isidore de Scété.
Comme
il lui racontait ses épreuves, l'Ancien lui dit qu'il ne fallait pas
s'étonner d'avoir à affronter de si violents combats, car le pécheur
endurci est semblable au chien de boucherie, qui a coutume de ronger les
os, et qui ne peut renoncer à cette habitude que lorsqu'on cesse de
l'entretenir et qu'on ferme la boucherie.
De même, il ne suffira pas au pécheur de cesser de commettre le péché,
il lui faudra aussi chasser la mauvaise habitude par la bonne habitude
de la vertu, en mortifiant sa chair pendant de longues années. Le démon,
désespéré de se voir ainsi sans matière pour allumer les désirs impurs
dans le cœur, abandonnera la lutte.
De
retour dans sa cellule, Moïse se livra à de grandes austérités : il ne
mangeait que douze onces de pain sec, épuisait son corps par le travail
et faisait cinquante prières par jour.
Mais il avait beau macérer ainsi sa chair, il restait tout embrasé, particulièrement dans les rêves.
Il alla donc de nouveau prendre conseil d'un autre grand vieillard, qui
lui recommanda d'ajouter à la sobriété corporelle celle de
l'intelligence, en la purifiant par les veilles.
Moïse associa dès lors à ses jeûnes, les veilles quotidiennes de toute
la nuit: pendant six ans, il se tint debout toutes les nuits au milieu
de sa cellule, priant sans fermer l'œil.
Comme
les pensées continuaient de l'assaillir, il compléta l'édification en
lui de l'homme nouveau par un amour ardent pour ses frères.
La nuit, il se rendait dans les cellules des vieux anachorètes qui
n'avaient plus la force d'aller chercher de l'eau, et il allait remplir
leurs jarres au puits qui se trouvait à plusieurs milles de là.
Le
démon, furieux de se voir ainsi vaincu de toutes parts par le serviteur
de Dieu, l'assaillit une nuit, alors qu'il était penché au-dessus du
puits, et lui donna un violent coup de massue sur les reins.
Le
lendemain, un frère, qui était venu puiser de l'eau, le trouva gisant
là à demi mort et alla en informer Abba Isidore, le Prêtre de Scété.
Transporté
à l'église, Moïse ne recouvrit ses forces qu'au bout d'une année.
Isidore l'engagea à cesser de provoquer les démons au combat, car il y
une mesure en tout, mais le vaillant soldat du Christ lui répondit : «
Il m'est impossible de cesser, tant que les imaginations suggérées par
les démons me troubleront. »
L'Ancien
lui annonça qu'il serait désormais délivré des rêves, et que cette
épreuve avait été permise par Dieu pour qu'il ne se vante pas d'avoir
surmonté la passion par ses propres forces.
Moïse
retourna donc dans sa cellule, et au bout de deux mois, il revint voir
Isidore auquel il déclara ne plus éprouver aucun trouble.
En
plus de la grâce de l'impassibilité, Dieu lui accorda le pouvoir contre
les démons, et transforma son caractère violent en une charité et une
douceur sans pareille.
Un
jour, un frère ayant commis une faute à Scété, les Pères se
rassemblèrent pour le juger et invitèrent abba Moïse à se joindre à eux ;
mais celui-ci refusa de se rendre à cette assemblée.
Comme tout le monde l'attendait, et qu'on avait l'habitude de ne point
commencer une synaxe avant que tous les ascètes fussent réunis, le
Prêtre l'envoya chercher.
Moïse
se leva, prit une jarre percée, la remplit d'eau et se rendit au
conseil. Les moines sortis à sa rencontre lui demandèrent : « Qu'est-ce
que ceci, Père ? »
L'Ancien leur répondit : « Mes péchés s'écoulent derrière moi et je ne
les vois pas, et je viens aujourd'hui pour juger la faute d'un autre ! »
Entendant cela, les Pères se repentirent, ne dirent rien au frère fautif et lui pardonnèrent.
Un
frère s'était rendu à Scété pour visiter les Anciens, et il voulut
d'abord voir l'illustre Abba Arsène, mais celui-ci n'accepta pas de le
recevoir.
Il alla ensuite chez Abba Moïse qui l'accueillit avec joie et
prévenance. Troublé par cette différence d'attitude, il pria Dieu et lui
demanda comment il se faisait que l'un des Anciens fuyait les hommes à
cause de son Nom et que l'autre les recevait à bras ouverts pour la même
raison.
Il lui fut alors montré deux grandes barques sur un fleuve, et il vit
Abba Asène et l'Esprit de Dieu naviguant sur l'une en toute paix, et sur
l'autre Abba Moïse et les Anges de Dieu qui le nourrissaient de gâteaux
de miel.
Ayant
acquis une grande faveur auprès de Dieu et devenu Prêtre, Abba Moïse
convertit par l'exemple de ses vertus soixante-dix de ses anciens
compagnons de brigandage, qui devinrent ses disciples.
Il
leur enseignait à se débarrasser des passions par les combats de
l'ascèse et à demeurer dans leur cellule, comme s'ils étaient au
tombeau, morts à tout homme.
Il disait : « Assieds-toi dans ta cellule, et elle t'enseignera toutes choses. »
Quand
on lui demandait ce que signifie mourir à tout homme, il répondait : «
Mourir à son prochain, c'est porter tes fautes et ne te soucier de
personne pour savoir s'il est bon ou mauvais. Si nous sommes attentifs à
voir nos fautes, nous ne verrons pas celles de notre prochain. Car
c'est folie pour l'homme qui a un mort chez lui, de le laisser là et de
partir pleurer celui du voisin. »
Quand
on lui demandait à quoi servent toutes les mortifications auxquelles
s'astreignent les moines, ces jeûnes et ces veilles pendant toute une
vie, il répondait : « Ils rendent l'âme humble. Car, si l'âme se donne
tout ce mal, Dieu la prendra en pitié. »
Abba Moïse était âgé de soixante-quinze ans quand on annonça que les barbares Maziques allaient assaillir Scété (407).
Tous les moines s'apprêtaient à prendre la fuite, sauf Abba Moïse.
Les
frères lui ayant demandé pourquoi il restait ainsi, paisible, il leur
répliqua : « J'attends ce jour depuis tellement d'années, afin que
s'accomplisse la parole du Seigneur Jésus-Christ qui a dit : "Tous ceux
qui prennent l'épée périront par l'épée" (Mat. 26:52) ».
Édifiés par cette réponse, les frères déclarèrent : « Nous non plus
nous ne fuirons pas, mais nous resterons pour mourir avec toi. »
L'Ancien leur dit : « Cela n'est pas mon affaire. Que chacun juge ses
propres actes et fasse selon ce que le Seigneur l'éclairera. »
Les barbares saccagèrent le fameux centre monastique de Scété, tuant sans merci tous ceux qu'ils trouvaient.
Quand
ils arrivèrent à la cellule d'Abba Moïse et de ses sept disciples, un
des moines put se cacher derrière un tas de cordes et, quand ils
massacrèrent les Saints Pères, il vit sept couronnes descendre du ciel
pour reposer au-dessus de leurs corps.
1. Voir Pallade, Histoire Lausiaque, chap. 19 et Apophtegmes des Pères du Désert, série alphabétique.
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