Chanoines réguliers de l'Immaculée conception

Chanoines réguliers de l'Immaculée conception


Chanoines réguliers de l'Immaculée conception
Dom Adrien Gréa



Fondation en 1866 par Dom Adrien Gréa.

LES COMMENCEMENTS DES CHANOINES RÉGULIERS (1865-1880)


     Dom Gréa disait, un jour qu’il se trouvait au Carmel de Lons-le-Saunier: « Il m’a fallu marcher en soufflant sur les feuilles mortes pour retrouver la trace de notre règle. » Des recherches dans les livres, des voyages sans nombre aux anciens monastères, furent entrepris pour connaître les traditions de la vie canonique.

     Sa pensée, débordant les limites du diocèse de Saint-Claude, embrassait la France et l’univers.
     L’année de la translation de la maîtrise de Baudin à Saint-Claude, il publia, en latin, une brochure qui témoignait du « catholicisme » de ses préoccupations. Il s’y révélait un précurseur clairvoyant. Pour remédier à la « langueur » des Églises orientales, il indiquait, « non sans quelque témérité, disait-il, et en pleine soumission d’esprit », un premier remède, à savoir que l’Église romaine eût en Orient non seulement des missionnaires du rite latin mais aussi des missionnaires passant aux rites orientaux. Le second remède qu’il préconisait, c’était l’établissement, dans les pays d’Orient, d’un clergé indigène. Il exprimait le souhait que ce clergé fût hiérarchique et régulier, plutôt que séculier, pour travailler avec plus de sûreté, de facilité, d’utilité, à la propagande chrétienne.
     Ce programme, formulé en 1865, est à comparer avec quelques-unes des récentes initiatives du Saint-Siège sur le passage, dans certains cas, des missionnaires latins aux rites des nations orientales et sur la nomination d’évêques indigènes en Orient.
     Tout porte à croire que Dom Gréa songeait dès lors à ce que Dom Benoît exposera de la sorte en 1878: « Nous nous destinons aussi aux missions étrangères. Mais nous reprendrons l’ancienne méthode d’évangélisation: celle des monastères. Notre fondateur a reçu du Bon Dieu beaucoup de lumières sur ce point. D’après ses vues, le monastère est le vrai moyen de former un clergé indigène, en offrant à l’inconstance des pays infidèles les secours de la vie de communauté et des vœux. »
     Quoi qu’il en soit, pour l’heure il s’agissait de ranimer en France l’institut canonique.
    Saint François de Sales et sainte Chantal avaient connu par révélation que l’œuvre qu’ils projetaient serait introduite dans l’Église « par la porte de Saint-Claude »; et, de fait, l’ordre de la Visitation naquit de la rencontre des deux saints près du tombeau de saint Claude (1604). De même, dira Dom Gréa, dans un panégyrique du saint prêché à la cathédrale, « c’est ici, par la porte de Saint-Claude, que l’institut des chanoines réguliers, consacré â Marie immaculée, a trouvé sa voie et reçu sa mission ».
     Dans les « profondes vallées » de ce coin du Jura, dans « la couronne des cimes majestueuses qui les entourent », dans toutes les beautés de cette noble contrée », Dom Gréa se plaisait à voir « le temple préparé » par Dieu « à la sainteté de ses serviteurs », les moines de l’abbaye autour de laquelle s’était groupée la ville de Saint-Claude.
     Comme pour relier au passé le présent et ses promesses, la maison achetée pour le berceau de l’institution nouvelle était un reste de l’antique abbaye.
     Déjà, depuis plusieurs années, Saint-Claude possédait une maîtrise. Elle subsista simultanément avec la maîtrise venue de Baudin. Les deux écoles avaient mêmes professeurs et mêmes classes; en dehors des classes, elles demeuraient séparées. Celle-ci fut dite « maîtrise blanche », celle-là « maîtrise noire », à cause de la variété de leurs costumes.
     La restauration de la vie canonique date du 21 novembre 1865. A partir de cette fête de la Présentation de la Sainte Vierge, le vicaire général, avec deux compagnons, en pratiqua les observances: office des matines célébré à minuit, maigre et jeûnes traditionnels, etc.
     « Ce fut comme un noviciat d’une année. Le 21 novembre 1866, ils prononcèrent des vœux d’un an, dans le secret de leur oratoire, entre les mains d’un collègue du vicaire général. »
     Puis, « à ces vœux d’un an, renouvelés deux fois, furent substitués des vœux de trois ans. L’expérience se faisait prudemment; la volonté divine se déclarait toujours plus manifeste et des vocations nouvelles se montraient peu à peu. »
     Sous le patronage de Mgr Mermillod, en 1870, Dom Gréa, dans une supplique à Pie IX, exprima l’intention de rétablir les chanoines réguliers avec une observance stricte tirée des règles de saint Augustin et de saint Benoît, strictiori observantia e sanctorum Patrum Augustini et Benedicti statutis desumpta, et demanda au pape de bénir les personnes, le dessein et l’œuvre commencée: dignetur nos, propositum nostrum et incœptum opus benedicere. Pie IX accorda sa bénédiction, le 20 juillet, deux jours après la définition de l’infaillibilité pontificale.
     Le 8 septembre 1871, les cinq premiers chanoines réguliers: Dom Gréa, Dom Constant Brenier, Dom Louis Ferrey, Dom Modeste Jeunet, Dom Léon Dunoyer, firent profession par des vœux perpétuels, en l’oratoire de la maison de Saint-Claude, entre les mains de l’évêque de Saint-Claude, qui approuva leurs règles. La mémoire de cet événement illumina l’existence de Dom Gréa.
     « Ce jour (du 8 septembre) est fête double et triple dans mon pauvre vieux cœur, écrira-t-il trente-sept ans plus tard. Je sais que, au delà des mers, vos âmes la célèbrent avec la mienne. Fête de notre Mère. Fête de son petit serviteur, que le martyr saint Adrien orne de sa pourpre, de sa rose rouge brillant dans le bouquet céleste des fleurs que Marie Immaculée a fait resplendir: Hortus conclusus Domini. Anniversaire de la fondation définitive de notre congrégation par la première profession perpétuelle de ses religieux ».
     Au commencement de 1873, Dom Gréa écrivait: « J’ai fini par prendre, pour ne plus le quitter, notre cher saint habit, et je me suis fait raser la tête en couronne de deux doigts de largeur. Hélas! que ne suis-je changé au dedans comme je le parais au dehors! »
     Ce n’était donc plus seulement la maîtrise, c’était la congrégation naissante qui était « blanche ».
     En 1876, le 8 avril, Pie IX accordait à la nouvelle fondation le « décret de louange » demandé par trente-cinq archevêques ou évêques, parmi lesquels les cardinaux Guibert, de Bonnechose, Desprez, Régnier, Mgr Caverot, Mgr Mabile, Mgr Mermillod, Mgr Nogret, Mgr Pie.
     Onze ans après, le 12 mars 1887, Léon XIII approuvait et confirmait l’institut. Ce décret d’approbation proprement dite reproduisait â peu près tel quel le texte du décret de louange.
     « Les membres de cet institut, y est-il dit, se proposent surtout de procurer leur sanctification et celle du prochain en menant la vie commune; de contribuer à la beauté de la maison de Dieu surtout dans les églises cathédrales et métropolitaines, d’aider les chanoines dans la psalmodie, les chants et les cérémonies sacrées selon le rite romain; de former à la vertu et aux lettres les jeunes gens appelés à la vocation sainte ».
     Avant d’aller à Rome pour obtenir cette approbation, le fondateur avait fait imprimer à Fribourg (Suisse) les constitutions de son institut: la première partie reprenait, avec de légères variantes, les statuts de 1871; deux autres parties étaient entièrement neuves. Le décret du 12 mars 1887 renvoya leur approbation « à un temps plus opportun », ordonnant qu’elles fussent rédigées « d’une manière nouvelle et plus complète ».
     Ce qu’il réclamait c’était une refonte et des compléments, non des modifications dans les observances liturgiques et pénitentielles. En 1876, la Congrégation des évêques et réguliers avait prescrit de conformer les statuts à ceux des anciens ordres des chanoines réguliers: cette consigne, demeurait intacte.

     Des notes rédigées, dès 1874, pour Mgr Pie, évêque de Poitiers — qui avait accueilli, à Beauchesne, des chanoines réguliers de Saint-Jean de Latran —, nous renseignent sur la pensée qui inspira les constitutions de Dom Gréa et sur les raisons pour lesquelles son observance admettait un « ajouté bénédictin » que les Xle et XIIe siècles ont apporté à la règle de saint Augustin.
     « Toutefois, je n’entends nullement trouver mauvais ce que l’église loue et approuve et ce qui conduit à une haute perfection les religieux admirables auxquels vous avez offert, dans votre diocèse, un asile précieux pour toute l’Église de France. Je sais, par mon séjour à Saint-Paul de Rome, tout ce qu’il y a de vertu pure et simple, d’obéissance, de pauvreté, et surtout de délicieuse charité, dans ces vieilles institutions de l’Italie moins resserrées en apparence par la rigueur de la lettre que par la douce ferveur de l’esprit. Elles sont ce vin vieux et délicieux dont parle l’Évangile, et elles n’ont pas besoin comme nous, vin nouveau et qui fermente encore, de la forte prison des observances rigoureuses. Il me semble, en effet, que nous avons besoin, nous qui commençons et naissons sur cette terre de France, dépourvue de respect, d’obéissance et de vertus traditionnelles, de ces observances assez austères en apparence, pour attirer à l’odeur de la myrrhe les âmes qui cherchent la croix, et pour écarter les âmes légères que l’imagination mène à la vie religieuse et qui en ignorent la vertu véritable. Je sais bien que l’on peut mortifier la nature en bien d’autres manières plus excellentes: un ascétisme puissamment constitué tel qu’il se trouve chez les Jésuites, les Rédemptoristes et les autres instituts naissants, peut tenir lieu de la sévérité des observances. Mais, si nous entrions en cette voie, nous ne serions plus nous-mêmes, nous n’appartiendrions plus à l’antique et traditionnel institut des chanoines réguliers, mais bien à la famille des clercs réguliers, famille admirable mais qui n’est pas 1a nôtre. »
Source : http://www.cricusa.com/us/archives/domgrea/documents/biographies/VERN.F.1938.0000.1%28FR%29/VERN.F.1938.0000.1%28FR%2903.htm







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