Légendes, coutumes
et croyances populaires
Fête des Rois
Nous
croyons inutile de faire connaître ici les usages qui ont encore lieu
dans notre Lorraine la veille de l’Epiphanie et huit jours après pour
l'élection d'un roi blanc et d’un roi noir ou machuré dont le règne est
malheureusement condamné à n'avoir pas de lendemain.
Nous
ne parlerons pas également des joyeux festins donnés à l'occasion de
l'avènement à la couronne de ces monarques d’une soirée , ni des vives
et bruyantes acclamations avec lesquelles ne manquent jamais de les
saluer les heureux sujets qui les entourent ; ces bonnes coutumes,
précieux héritage de nos pères, n’étant pas encore à la veille de tomber
en désuétude parmi nous.
Pendant
la semaine qui suit l'élection des deux rois, des jeunes garçons de la
classe ouvrière, la tête ceinte de couronnes en papier argenté et
portant des sceptres en bois doré, se rendent dans toutes les maisons,
précédés d’un enfant vêtu d'une robe blanche qui porte une longue perche
au sommet de laquelle on voit briller une étoile en fer blanc. Ils sont
habillés comme la tradition raconte que devaient être les trois mages
(Gaspard, Melchior et Balthazar), et ils chantent d'une voix un peu
nasillarde comme quoi sans aucun autre guide qu'une étoile
merveilleusement reluisante, ils ont pu parvenir à la pauvre demeure
dans laquelle est venu au monde un divin poupon, l'honneur qu’ils eurent
de lui offrir, en toute révérence, de la myrhe et de l’encens d'une
bonne senteur ; combien ils furent ravis des benians (bons accueils),
que lui firent un beau grison (1) qui se disait son père. Cette Odyssée
terminée à la satisfaction des auditeurs et sans doute aussi à celle des
illustres pérégrinateurs, chacun des assistants s'empresse de glisser
quelques petites pièces de monnaie dans l'étroite écarcelle, attachée à
la ceinture de l’un d'eux. Tous trois, après avoir fait un gauche
salamalec ou salut oriental à la noble compagnie, se rendent ailleurs et
le soir au cabaret, leur humble palais, faire un boin repet de monsie
et une souleie (2). Cest-à-dire un bon repas de messieurs et une
ivresse.
(1)
Ancien noël en patois de Gerardmer, que nous avons envoyé en 1856 la
société royale des antiquaires de France, et qui mêlé inséré dans la
collection de ses mémoires et dissertations, volume IV, I. série, page
949-269 Le vingt-deuxième couplet de ce noël, offre un fort singulier
anachronisme dans la menace faite par les rois de tirer leurs pistolets
pour réprimer le séditieux appel du berger Robin qui voulait qu’on
tombat sur eux pour les empêcher d‘entrer dans l'étable où venait de
naître l'Enfant Jésus.
(2) Même noël patois de Gérardmer, cité précédemment.
Source : Livre "Traditions populaires, croyances superstitieuses, usages et coutumes de l'ancienne Lorraine" par Nicolas Louis Antoine Richard
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