Légendes, coutumes et croyances populaires Envoûtement

Légendes, coutumes
et croyances populaires

Envoûtement


Action par laquelle on croyait faire périr d'une mort violente et subite une personne absente.

On faisait fabriquer à cet effet, à son image et à sa ressemblance, une petite statue ordinairement en cire ou en laine, que l’on baptisait de son nom et à laquelle on donnait, après avoir prononcé sur elle quelques paroles magiques, un coup de stylet ou de poignard dans la région du cœur.

Cette superstition, manière de se venger d'une injure et de se débarrasser secrètement d’un ennemi, était connue des anciens comme l'attestent l‘idylle de Théocrite intitulée : L'Entremetteuse, la VIIIe satire du premier livre et la VIIIe épode d'Horace, la VIIIe églogue de Virgile.

Cette pratique fut défendue sous les peines les plus sévères par un grand nombre de canons des conciles, ce qui n'empêcha pas qu’en en fit usage pour faire périr Eberhard, archevêque de Trêves, qui siégea de I047 à t 1066.

Le fait historique suivant que nous empruntons à un éloge de la princesse Catherine de Lorraine, fille du grand duc de Lorraine, Charles II, et abbesse du monastère de Remiremont, décédée à Paris, le 4 janvier I648, offrira un témoignage irrécusable que l’on croyait encore dans notre province, si religieuse, au pouvoir de cette œuvre satanique triste et funeste héritage de l'antiquité païenne.

« Ce fut en ce temps (1612) qu'on projeta de se défaire de madame (l'abbesse), d’une façon que l'on croyait très-sûre et sans dangers pour les meurtriers. C'était de faire une figure en cire de la taille de la princesse et de donner un coup de poignard à cette figure à l'endroit du cœur, et on se promettait qu’au moment même que la figure aurait reçu le coup, madame le recevrait au même endroit et en mourrait aussitôt.
Cela devait s’exécuter par un nommé sieur de Tonois qui, ayant eu horreur d'un si noir parricide, en donna avis à madame et lui envoya la lettre qu’une dame (une dame chanoinesse) lui avait écrite pour la porter à cette infâme action. La dame se voyant découverte, pourvût à sa sûreté par la fuite et on ne l'a jamais vue depuis.

Une autre dame(chanoinesse) fit encore une semblable entreprise avec plus de précaution et pour plus de sûreté, elle n’écrivit point de sa main et employa un sieur de Lamothe, qui n'était point sujet de son altesse de Lorraine.

Toutefois, cet homme quoique habitué à de semblables homicides, eût horreur de faire mourir la petite fille d’un roi (Henri II, roi de France), sœur du souverain (Henri II, duc de Lorraine, dit le bon), il en avertit des personnes qui prenaient part à la conservation de madame : son altesse le duc Henri en eût connaissance, il envoya des commissaires pour informer, les informations achevées, furent mises entre les mains de madame, et cette héroïque princesse les mit aux pieds du crucifix, défendit qu'on fit d'autres poursuites, et reçut la visite de la dame criminelle avec autant d'honnêteté et de tendresse qu'auparavant. » (Eloge de la princesse Catherine de Lorraine, abbesse de Remiremont, composé par Dom Alexandre Royer, décédé en 1695).
Source : Livre "Traditions populaires, croyances superstitieuses, usages et coutumes de l'ancienne Lorrainepar Nicolas Louis Antoine Richard

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