Christianisme

Christianisme


Le christianisme est une religion monothéiste et abrahamique, issue d'apôtres célébrant la vie et les enseignements d'un personnage du Proche-Orient nommé Jésus de Nazareth, surnommé « l'oint » (c'est-à-dire le consacré, en grec χριστός : le Christ).

Plus de deux millénaires après, le nombre de chrétiens sur Terre, c'est-à-dire de personnes suivant ces enseignements, s'élève à environ 2,2 milliards (dont la moitié de catholiques, 37% de protestants et 12% d'orthodoxes à fin 2011), répartis dans près de 33 000 confessions différentes.

Les premières de ces confessions sont apparues au sein du judaïsme après la crucifixion de Jésus de Nazareth par les autorités romaines de la province de Judée au Ier siècle.

Dans le Nouveau Testament, texte propre au christianisme, les Actes des Apôtres indiquent que le nom de « chrétien », signifiant « appartenant au Christ » ou « partisan du Christ », fut attribué aux disciples de Jésus de Nazareth à Antioche au milieu du Ier siècle.

La référence la plus ancienne connue pour le terme christianisme se trouve dans la lettre d'Ignace d'Antioche aux Magnésiens à la fin du Ier siècle.

Les chrétiens croient que Jésus de Nazareth est le Messie que prophétisait l'Ancien Testament, et qu'il est le fils de Dieu, à la fois de nature divine et de nature humaine. Les trois principales Églises chrétiennes, c'est-à-dire les catholiques, les orthodoxes et les protestants, étudient l'interprétation des textes.

La Bible hébraïque est l'un des deux textes fondateurs du christianisme, qui la nomme Ancien Testament ou Premier Testament. Le Nouveau Testament, centré sur la personne de Jésus-Christ, est le second texte fondateur.

Le christianisme est la religion la plus répandue dans le monde et a profondément marqué différentes civilisations au cours de l'histoire alors qu'il était initialement considéré comme une secte juive parmi d'autres. Il est présent sur tous les continents.

Doctrines

Article détaillé : Dogmes chrétiens
Les croyances et pratiques chrétiennes se sont beaucoup diversifiées au fil des siècles et autour du monde. De ce fait, il n'y a pas de définition synthétique de la foi chrétienne et de ses doctrines. Cependant, il existe certains éléments d'homogénéité tels que la croyance centrale en Jésus-Christ. Le plus grand nombre des chrétiens définissent leur foi par le Credo, socle de foi commun affirmant l'unicité de Dieu, la vie, la mort et la résurrection de Jésus, « la résurrection de la chair et la vie du monde à venir » (par opposition à l'au-delà des Égyptiens ou des Grecs). Une modification du Credo par Rome a inauguré la controverse du filioque : si le saint-esprit découle aussi du Christ, et pas seulement de Dieu, une âme ne peut être sauvée que si la personne est chrétienne, ce qui change complètement le rapport aux incroyants et aux autres croyances. Cette controverse a conduit au schisme de 1054 entre catholiques et orthodoxes. Quelques siècles plus tard, d'autres contestations de positions de Rome ont conduit au catharisme et au protestantisme. Ces questions sont détaillées plus bas.

Christ

Le nom de Jésus-Christ a été donné par les chrétiens à Jésus de Nazareth qui est considéré comme étant le Messie prophétisé dans l'Ancien Testament. Le terme de « Christ » vient du grec Χριστός, l'équivalent du terme sémitique Messie (de l'hébreu מָשִׁיחַ - mashia'h), littéralement « celui qui est oint », et de lui découle l'appellation « Jésus-Christ ». Le terme est repris par les chrétiens arabophones pour désigner le Christianisme المسيحية (al-massihiya). "Christ" est donc un adjectif et non un nom propre.

Jésus-Christ est la figure centrale du christianisme. Le fondement de la religion chrétienne est la foi en sa résurrection.

Profession de foi

Le kerygme, la profession de foi fondamentale des chrétiens contenue dans l'Épitre de saint Paul aux Corinthiens, stipule que, si Jésus-Christ n'est pas ressuscité, la foi chrétienne est vide. Deux autres professions de foi sont venues préciser la foi chrétienne, le Symbole des Apôtres et le Symbole de Nicée-Constantinople (ou credo). Cependant, tous les chrétiens n'accordent pas une valeur à ces deux derniers. Ces professions de foi sont divisées en quatre parties. La première confirme la doctrine monothéiste du christianisme en stipulant qu'il n'y a qu'un seul Dieu qui est aussi le Créateur. La seconde partie énonce que Jésus-Christ est le fils unique de Dieu et qu'il a souffert, est mort, a été enseveli et est ressuscité avant de monter au ciel afin de juger les vivants et les morts. L'expression de fils relève de la continuité de la tradition biblique, mais les chrétiens proclament que c'est Dieu qui se révèle de façon unique en son fils Jésus-Christ. Les catholiques insistent davantage sur la filiation biologique dans la doctrine de la virginité perpétuelle. La troisième partie des professions de foi dit que l'Esprit Saint intercède pour les hommes et, finalement, la quatrième partie énonce que Jésus-Christ a institué une Église sur Terre.

Trinité

La Trinité découle directement de ces professions de foi. La Trinité est le fait que le Dieu unique se révèle en trois « personnes », le Père, le Fils et l'Esprit Saint. Le terme de personne a donné lieu à de nombreuses interprétations et saint Augustin précise que ce terme, humain, ne définit qu'imparfaitement la Trinité. La triple invocation du baptême, « au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit » fut conceptualisée sous forme du dogme de la Trinité lors des grands Conciles du IVe siècle. Les interprétations de la Trinité sont différentes selon les chrétiens qui se revendiquent des Églises des deux conciles, des Églises des trois conciles ou des Églises des sept conciles. De plus, certains chrétiens tels que les unitaristes, certains groupes adventistes, les Témoins de Jéhovah et l'Église de Dieu (Septième Jour) n'admettent pas le dogme de la Trinité. Ces derniers sont appelés antitrinitaires.

Historicité

 
Le développement historique des principales églises ; dans ce diagramme la position des branches n'a pas de signification autre que chronologique et démographique approximative.

L'étude historique des fondements du christianisme, la vie de Jésus de Nazareth, est ardue. Une étude historique scientifique demande de comparer ces textes à d'autres récits relatant les mêmes faits. 

Cependant, en dehors du Nouveau Testament, les sources écrites précises traitant de la vie de Jésus sont très rares. Ajouté à l'absence de preuves archéologiques de l'existence de Jésus et aux divergences des textes existants, cette incertitude de la véracité historique des textes a poussé certains auteurs du tournant du XIXe siècle et du début du XXe siècle à faire l'hypothèse de l'inexistence de Jésus. Depuis les années 1930, cette hypothèse n'est plus prise en compte par les historiens.

Ancien et Nouveau Testament


La Bible, recouverte de symboles catholiques romains
Aux Écritures issues du judaïsme, qui correspondent à ce que les chrétiens nomment l'Ancien Testament, la tradition des premiers siècles du christianisme a adjoint le Nouveau Testament. On emploie souvent l'appellation « Premier » Testament au lieu d'Ancien, pour signifier que le Nouveau Testament ne vient pas remplacer l'« Ancien » mais l'accomplir. L'Ancien et le Nouveau Testament sont réunis dans la Bible chrétienne.

Le contenu officiel du Nouveau Testament, selon l'Église catholique, exclut de nombreux textes chrétiens apocryphes, parmi lesquels une douzaine d'Evangiles et, en particulier, celui de Thomas, d'usage gnostique.

Le Nouveau Testament est composé de quatre évangiles (selon Matthieu, Marc, Luc et Jean), des Actes des Apôtres, des Épîtres et de l'Apocalypse (aussi appelé Révélation). On considère que la rédaction de ces textes s'étend de la seconde moitié du Ier siècle jusqu'au début du IIe siècle. Cependant, les manuscrits les plus anciens remontent au IVe siècle EC. Toutefois, l'on dispose de fragments d'évangiles antérieurs (Magadalen, Ier siècle, Rylands 457: IIe siècle). Ces quatre livres présentent entre autres une éthique de bienveillance envers autrui. Cette bienveillance peut s'exprimer de diverses manières : le pardon, la charité, la miséricorde, le désintéressement.

On appelle « évangiles synoptiques » les évangiles de Matthieu, Marc et Luc, qui sont construits sur le même plan. L'évangile de Jean est différent.
Les épîtres de Paul de Tarse (saint Paul) semblent être les plus anciennes. On date la première d'entre elles, la 1re épître aux Corinthiens, de l'année 40 environ, en particulier le chapitre 15, qui rappelle le dogme central de la foi, le Kérygme. Cette antériorité donne à Paul une place particulière, certains le considérant comme le véritable fondateur de la religion.

L'évangile selon Marc est généralement considéré comme celui qui a été rédigé en premier (vers les années 65-70 ?), et constituerait une des sources ayant servi à rédiger les deux autres synoptiques. Viendraient ensuite les autres évangiles (Matthieu et Luc, dans leur rédaction définitive vers l'an 70, mais il existe de nombreux documents antérieurs), Jean après 90. Les évangiles ont été rédigés sur la base de traditions et de documents plus anciens. Leur rédaction est contemporaine de la disparition des témoins directs de la vie de Jésus, et manifeste la volonté de conserver l'essentiel de la prédication du Christ.

L'Épître aux Hébreux semble être le texte le plus récent.

Le canon ainsi constitué (ensemble des textes reconnus officiellement) écarte les textes dits apocryphes. Le Nouveau Testament est donc le fruit d'un choix parmi une multiplicité de documents témoignant de la vie et de la prédication de Jésus, ainsi que de la vie de l'Église primitive. Ce choix a été effectué au IVe siècle, lors du premier concile de Nicée.
Article détaillé : Canon (Bible)

Église et baptême

C'est la foi en Jésus-Christ et en son œuvre de rédemption qui définit le christianisme, et non la pratique de la loi mosaïque : « Un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu » proclame l'Épître aux Éphésiens (Ep 4,5). On devient chrétien par le sacrement du baptême.

Histoire du christianisme

Critique de la religion, le mouvement des Lumières reprochait, entre autres, au christianisme d'avoir eu une histoire sanglante de l'Antiquité à son époque.

Religion issue du judaïsme

D'après les Évangiles, Jésus « n'est pas venu abolir la Loi, mais accomplir ». Sa perspective est donc celle d'un accomplissement de la foi juive, dans une interprétation particulière à Jésus lui-même, et non la création d'une nouvelle religion : Jésus, les apôtres, Marie la mère de Jésus, tout le groupe primitif était juif. Cette perspective se retrouve dans de nombreuses phrases de Jésus rapportées par les évangiles ; Si le salut est apporté á tous, c'est d'abord aux siens -« aux brebis perdues d'Israël » (Matth. 10:6)- qu'il réserve le privilège de son enseignement. D'ailleurs la plupart de ses interlocuteurs sont juifs, à quelques exceptions près, comme le centurion romain de Capharnaüm ou la femme samaritaine.
Le christianisme a repris, de façon plus ou moins importante selon ses courants, plusieurs éléments présents dans le judaïsme de la période suivant la destruction du Second Temple, tels que :
  • l'adaptation de la forme du culte synagogal aux églises de paroisses, (le culte synagogal était déjà présent en Galilée) ;
  • l'utilisation de l'ensemble des textes bibliques, au premier rang desquels les psaumes juifs, issus du livre des Louanges ; ces textes peuvent être lus sur des cycles variables, pouvant atteindre jusqu’à trois ans pour l'Église catholique ;
  • un calendrier religieux, partiellement mobile, dans lequel certains évènements notables ou certains points de foi donnent lieu à des célébrations annuelles ;
  • l'utilisation de chants et d'hymnes dans la prière ;
  • dans les célébrations et les réunions communautaires, l'utilisation de certains mots venant de l'hébreu biblique (par exemple : amen, hosanna, alléluia).
Pour les chrétiens, la ligne de partage avec le judaïsme passe par la reconnaissance ou non du Messie en la personne de Jésus. Du point de vue juif, le christianisme s'écarte fondamentalement du judaïsme ; il ne « l'accomplit » donc pas - en rejetant le « joug de la Torah et des mitsvot » – et ne respecte pas non plus le monothéisme. Marcion, au IIe siècle, va plus loin que l'Église chrétienne : il conteste la filiation judaïsme-christianisme et souligne l'origine autonome du christianisme vis-à-vis du judaïsme. Il fut qualifié d'hérétique par l'Église. La séparation effective des deux religions, aussi bien parmi les premiers chrétiens que vis-à-vis des autorités romaines, occupa au minimum deux siècles, peut-être davantage, selon les historiens.

Christianisme primitif

Article détaillé : Origines du christianisme
Le christianisme s'est développé à partir du Ier siècle dans le contexte des communautés juives du Moyen-Orient et en particulier les communautés juives hellénisées. Le nom « christianisme » vient du mot grec Christos, qui traduit l'hébreu Messie (« celui qui a reçu l'onction »). Ce mot, originellement appliqué à différents personnages de la Bible (prophètes et rois), désigne dans le judaïsme tardif un personnage qui viendra à la fin des temps restaurer la royauté de Dieu en Israël. Il est, depuis, quasi-exclusivement réservé à Jésus.

Jésus est la figure fondatrice du christianisme, sans toutefois en être le fondateur au sens historique : le débat est encore ouvert sur le fondateur du christianisme « Paul ou Jésus », d'un point de vue théologique ; mais surtout, d'un point de vue historique, le christianisme en tant que religion separée du judaïsme ne naît pas du vivant du ou des prophètes historiques inconnus, qui ont servi de modèle au personnage évangélique de Jésus. Deux écoles se partagent chacune un consensus : pour d'aucuns, le christianisme naît avec la reformulation de la Birkat haMinim (la 12e bénédiction de la Amida) ; pour d'autres, il commence avec le tournant du IIe ‑ IIIe siècle avec le début d'établissement d'un canon du Nouveau Testament, pères apologètes, début d'une théologie chrétienne (rencontre entre le mythe chrétien et la philosophie grecque).

À l'exemple de la diversité régnant dans le judaïsme (saducéens, pharisiens, esséniens, baptistes...), le paléochristianisme recouvre différentes communautés comme, par exemple : 1. la communauté (postpascale) judéo-chretienne de Jérusalem autour de Jacques, frère de Jésus, appartenant au judaïsme mais reconnaissant le messianisme de Jésus et vivant dans l'attente du Royaume de Dieu ; 2. la communauté galiléenne regroupée autour d'une interprétation prépascale et sapientale de la vie de Jésus, probablement à l'origine de la source Q commune aux évangiles de Luc et de Matthieu ; 3. la communauté helléno-chrétienne autour des figures emblématiques des sept préposés au service de table et d'entretien des veuves, et d'Étienne, à l'origine probable de l'évangile de Matthieu ; 4. la communauté apocalyptique qui sera à l'origine, probablement en recueillant des éléments esséniens après la chute du Temple, de l'évangile de Jean ; 5. la communauté paulinienne qui permettra dans le sillage des hellénistes, l'ouverture aux gentils (notamment après la rupture entre Paul et l'église de Jérusalem en 48/49), et un début de divergence théologique (centralité et prééminence de la Croix sur la Loi, et de la Foi sur les Œuvres). Ces communautés paléo-chrétiennes (car toujours incluses dans le judaïsme) vont progressivement soit quasiment disparaître comme les judéo-chrétiens, soit diverger du judaïsme à la faveur d'interprétation différentes des Écritures, de l'intégration de nouvelles traditions orales puis textuelles (paléo-évangiles, épîtres), de facteurs historiques (soulèvements de 66-70 puis de 135), changement de langue (de l'araméen/hébreu au grec/latin), de centre démographique (de la Palestine vers la totalité de l'Empire romain), des relations politiques avec Rome pour rester religio licita...., et des relations conflictuelles avec le judaïsme rabbinique qui prolonge le pharisianisme après la chute du Temple (70).
La divergence d'avec le judaïsme s'accélèrera au tournant du premier siècle.

Expansion

Graffiti antichrétien du IIe siècle représentant un âne crucifié. Le commentaire Alexamenos respecte dieu suggère que ce dessin raille un soldat converti.
« Nous ne sommes que d'hier et nous avons déjà conquis la terre » dit le philosophe Tertullien au IIe siècle. Les chrétiens, d'abord petite minorité de disciples de Jésus ainsi que les apôtres, se répandirent surtout à l'ouest de l'Empire romain en Occident, en s'appuyant sur les communautés juives préexistantes de l'Empire.

Ensuite un problème se posa : doit-on convertir les non-juifs ? Rapidement, Paul de Tarse décide d'ouvrir la nouvelle religion aux autres (à la gentilité), et sa renonciation à la circoncision leva les réticences de beaucoup d'hommes pubères.

Les apôtres disent alors propager la "Bonne Nouvelle" (la résurrection de Jésus). Au Ier siècle, les chrétiens sont très peu nombreux en Occident. Ils grossissent la communauté d'Alexandrie déjà importante, puis traduisent la Bible en plusieurs langues (grec et latin) afin d'assurer la communauté chrétienne. Alors ils s'installent de l'Afrique du nord à l'Espagne et en Gaule.

Dans l'Empire romain, les autorités ne font pas une différence très nette entre juifs et chrétiens, ces derniers n'étant perçus que comme une secte juive.

La conversion de Constantin et la christianisation de l'Empire romain : avec l'édit de Milan en 313, les persécutions contre les chrétiens s'arrêtèrent. Vers la fin du IVe siècle, le christianisme devient la religion officielle de l'Empire romain, remplaçant ainsi le culte romain antique et retournant la persécution. Cette date marque symboliquement le début de la chrétienté : période de l'histoire de l'Europe où le christianisme est la seule religion admise dans la mesure où il persécute les autres (depuis Justinien), et d'abord ses propres dissidents puis le judaïsme.

Cette victoire sur le paganisme antique s'accompagna d'une réinterprétation de la philosophie, notamment celle de Platon, dans le sens de la nouvelle religion, et de l'utilisation de nombreux motifs mythiques du monde ancien pour l'inculturation du christianisme dans le respect de la tradition apostolique.

Expansion mondiale du christianisme

Articles détaillés : Christianisme par pays et Chrétienté.

Répartition du christianisme dans le monde, toutes tendances confondues
À partir de la découverte de l'Amérique par les Européens en 1492, l'expansion du christianisme a été parallèle à l'expansion coloniale. L'activité de mission a souvent été considérée par les puissances coloniales comme un instrument permettant d'introduire les intérêts occidentaux, voire de légitimer des interventions politiques ou militaires. Mais cette cohabitation n'alla pas sans heurts, l'Église heurtant directement de front les intérêts coloniaux quand elle affirme que la dignité de l'Homme doit être défendue (comme dans la célèbre controverse de Valladolid). En Martinique, les âmes pieuses durent se battre pour obtenir que les secours de la religion soient apportés aux esclaves.

Les rites indiens ou africains ne furent plus officiellement tolérés, mais le candomblé et nombre de cultes vaudous témoignent d'un syncrétisme et de la perduration des cultes africains ou amérindiens. Spécifiquement, les christologies afro-américaines témoignent que ces cultes n'ont jamais disparu. Aujourd'hui la religion chrétienne est la religion la plus répandue dans le monde.

Recul dans les pays occidentaux

Depuis une cinquantaine d'années, les média évoquent un recul progressif de la pratique régulière du christianisme dans les pays les plus développés (où le niveau d'instruction est généralement élevé). Il est impossible de quantifier un recul croyance au christianisme, mais l'obéissance active aux préceptes et la pratique régulière des rites a décru de manière conséquente. Ce recul est cependant moins net dans ce que l'on peut appeler la croyance passive : de nombreuses personnes se déclarant toujours chrétiennes par tradition familiale.

Ce que les média ont appelé l'indifférence religieuse, étudiée par différentes personnalités de l'Église catholique concerne surtout les églises majoritaires, tandis que les religions minoritaires, de même que le néo-paganisme, l'athéisme, voire l'antithéisme militant, semblent progresser mais ce n'est peut-être qu'un effet secondaire de la liberté de conscience et d'expression (possible grâce à la laïcité). D'antiques critiques, chez certains intellectuels, reviennent au goût du jour, à l'instar du Contre les chrétiens du philosophe Celse et des écrits de l'empereur romain Julien.

Le christianisme demeure cependant une référence historique, culturelle et éthique. Les épiscopats nationaux sont souvent consultés par les gouvernants avant le vote de lois qui engagent le sens et la valeur de la vie humaine (débat sur l'euthanasie, bioéthique...).

Églises

Article détaillé : Branches du christianisme
Il existe trois grands groupes d'Églises : les catholiques, les orthodoxes et les protestantes. Le mot « chrétien » n'est pas le mot utilisé habituellement par le Nouveau Testament pour désigner les disciples de Jésus. Ceux-ci s'appellent, ou sont appelés, la « Voie », « l'Église », « les Églises » ou les « Nazaréens » (du nom de Nazareth, la ville d'origine de Jésus). Le livre des Actes des Apôtres nous apprend que c'est à Antioche, donc dans une ville de langue grecque, que l'on donna pour la première fois aux disciples le nom de « chrétiens ». Sans doute ce nom n'a-t-il servi à l'origine que pour désigner ceux des disciples de Jésus qui étaient de langue grecque (« chrétien » signifie « disciple du christos », terme grec équivalent à messie).

Dans le premier siècle du christianisme, la prédication de Jésus a été reçue de manière sensiblement différente selon les cultures et les communautés. Un écho de ces différences se perçoit dans les textes du Nouveau Testament et la diversité de leurs présentations de cette prédication. Les divergences sont plus importantes encore quand on prend en considération l'abondante littérature dite apocryphe, dans laquelle se reflètent les convictions d'Églises dont on a aujourd'hui perdu le souvenir.

Ces différences de compréhension de la prédication et de la personne de Jésus ont été à l'origine de conflits internes au christianisme et à la création de nombreuses hérésies, chaque Église locale considérant comme hérétiques les traditions et les dogmes retenus par les autres mais qu'elle rejetait.

La nécessité de s'entendre sur un langage commun sur Dieu et sur Jésus est donc apparue très tôt, d'où la pratique des lettres de communion, lettres délivrées par une Église pour s'assurer qu'un de ses membres en voyage est bien dans la communion de toute l'Église.

Conciles

Le christianisme est né et s'est d'abord développé dans la partie orientale de l'Empire romain. Les villes de Jérusalem, d'Antioche et d'Alexandrie jouent le rôle de capitales ecclésiastiques. En 330, l'empereur Constantin Ier transfère la capitale de l'empire de Rome à Constantinople (rebaptisée Nea Roma, « Nouvelle Rome »), qui devient un grand foyer intellectuel. Avec l'accès du culte chrétien parmi les cultes reconnus de l'Empire, le pouvoir politique a pris l'initiative de réunir des assemblées d'évêques (conciles) pour régler les différends. Lorsque la majorité des évêques s'accordait sur un point, les évêques minoritaires ne choisissaient pas forcément d'adopter la formulation retenue. À Rome, première capitale impériale, l'évêque de la capitale impériale (qui fait remonter la fondation de son Église à l'apôtre Pierre) a rang de patriarche, avec les titres (initialement purement honorifiques) de « pontife » et de « premier parmi ses pairs » (en latin Primum inter pares). Le premier concile de Constantinople en 381 place le siège de Constantinople au second rang, juste après celui de Rome.

On aboutit alors à ce qui est connu sous le nom de Pentarchie : les cinq centres historiques de Rome, Constantinople, Alexandrie, Antioche et Jérusalem (dans leur ordre de préséance et de primauté). En dehors de l'Empire romain, les chrétiens étaient libres de s'organiser en Églises indépendantes. Ce fut notamment le cas de l'Église arménienne et de l'Église géorgienne. Au fil des siècles et des conciles, le monde chrétien va ensuite connaître plusieurs controverses christologiques, ainsi que des crises et bouleversements idéologiques et politiques.
  • 301 (ou 314) : conversion de l'Arménie au christianisme. Ainsi, ce pays devient le premier état officiellement chrétien, avant même l'Empire romain.
  • 424 : les Églises chrétiennes de l'Empire perse se proclament indépendantes, pour ne plus être soupçonnées de soutenir l'Empire romain.
  • 431 : les thèses nestoriennes sont considérées comme hérétiques au concile d'Éphèse. Les nestoriens affirment que deux personnes différentes coexistent en Jésus-Christ : l'une divine et parfaite, l'autre humaine et faillible (Eli, Eli, lama sabachtani : « mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné »). Le concile d'Éphèse proclame que le Christ n'a qu'une seule nature et qu'elle est divine, cette dernière ayant absorbé sa nature humaine.
  • 451 : le concile de Chalcédoine proclame l'unique personne du Christ, de nature à la fois divine et humaine. Ce dogme, accepté par la majorité des églises tant en Occident qu'en Orient (de la Grèce au Caucase), est rejeté par certaines églises d'Orient : ce sont celles dites « des trois conciles », et appelées « monophysites » car elles considèrent, comme le concile d'Éphèse, que le Christ n'a qu'une seule nature, divine. C'est le cas, entre-autres, des Égyptiens, des Éthiopiens et de la majorité des Arméniens. On appelle « chalcédoniens », « orthodoxes » ("de la juste foi") ou « melkites » ("partisans de l'empereur") les chrétiens acceptant les dogmes du concile de Chalcédoine, par opposition aux monophysites. Le concile de Chalcédoine marque une étape décisive dans l'histoire du christianisme en ce sens que la doctrine sur la Trinité et sur la double nature du Christ y est définie. À partir de cette date, elle ne variera plus.
  • 484 : les chrétiens de l'Empire perse adoptent le nestorianisme comme doctrine officielle (c'est l'origine des Églises des deux conciles et de l'Église catholique chaldéenne).
  • VIIe - VIIIe siècles : trois des centres du christianisme oriental (Alexandrie, Antioche et Jérusalem) tombent aux mains des musulmans : la vie chrétienne y continue, avec le statut de « dhimmis » ("protégés"), mais seules Constantinople et Rome gardent leur liberté politique.
  • 687 : l'Église maronite (bien que chalcédonienne) rompt avec Constantinople.
  • IXe siècle : évangélisation des peuples slaves : les slaves occidentaux (au sens géographiques, non linguistique : polonais, tchèques, slovaques, slovènes, croates) se rattachent à Rome, les slaves orientaux (serbes, bulgares et Rus' de Kiev) à Constantinople.
  • 1054  : lors de ce schisme, Constantinople et Rome s'excommunient mutuellement. Les Églises restées en « communion des sept conciles » (dont Constantinople est le principal centre) constituent ce qui est appelé l'« Église orthodoxe », tandis que l'église de Rome, appelée « Église catholique », aura encore 14 conciles. Parmi ces 14 conciles, celui de Florence (1439-1445) fixe dans l'Église catholique les innovations théologiques et canoniques par rapport aux sept premiers conciles, innovations comme le filioque, le purgatoire, le célibat des prêtres, l'infaillibilité papale et quelques autres. Le filioque est particulièrement lourd de conséquences historiques, car il postule que l'Esprit-saint ne découle pas seulement du Père (Dieu) mais aussi du Fils (Jésus-Christ) ce qui implique que Dieu ne sauve que les baptisés, les âmes chrétiennes : cette doctrine catholique justifiera l'inquisition et la politique de conversion forcée menée contre les cathares, les camisards, ou les populations colonisées.

Séparation de l'Orient et de l'Occident


On retient souvent la date de 1054 comme celle de la séparation des Églises d'Orient et d'Occident, mais l'éloignement des deux églises commence bien avant, car la chute de l'Empire romain d'Occident a amené un rapprochement progressif entre l'Église de Rome et les royaumes germaniques (Ostrogoths, Lombards, Francs), et son éloignement de l'Empire romain d'orient, officiellement son protecteur, mais trop éloigné. Au IXe siècle, les papes rompent politiquement avec les empereurs de Constantinople et recherchent la protection des empereurs ou des rois Francs. En 1054, deux évêques furent envoyés par Rome à Constantinople. Après un certain nombre de malentendus, ils lancèrent l'anathème (excommunication) contre le patriarche Michel Cérulaire, qui réplique par un anathème contre ces deux évêques. Les choses auraient pu en rester là et les anathèmes auraient pu être levés, comme cela était déjà arrivé, mais, entre-temps, l'église de Rome organisa de nouveaux conciles qui l'éloignèrent de la « communion des sept conciles » jusque-là en vigueur dans toute l'Église : le Filioque, le Purgatoire, l'autorité temporelle des papes, le célibat des prêtres, l'inquisition et bien d'autres innovations doctrinales ou canoniques ont fini par rendre le schisme irréversible.
Sur le plan politique, la rupture a été définitivement consommée en 1204 lorsque les Croisés latins ravagèrent Constantinople et déposèrent le patriarche. Depuis lors, Rome et Constantinople se traitent réciproquement de « schismatiques et anathèmes ». La tentative de réunion de Jean Bessarion au Concile de Florence au XVe siècle échoua. Aujourd'hui, pas moins de 14 conciles séparent l'église latine de l'église orthodoxe, qui s'en tient toujours aux 7 premiers. L'affaiblissement de l'Empire romain d'orient par les Croisés a permis, deux siècles après, la prise de Constantinople par les Turcs, ce qui a aggravé le ressentiment qui s'était installé entre les Églises, catholiques d'un côté, orthodoxes de l'autre. La réconciliation et la levée des anathèmes n'intervinrent qu'en 1965 avec les déclarations du pape Paul VI et du patriarche Athenagoras Ier.
Toutefois, après une quinzaine d'années de « détente », les relations entre les deux églises se sont à nouveau progressivement tendues, surtout après l'an 2000, avec le recadrage de l'église catholique par les papes Jean-Paul II et Benoît XVI, et avec l'interdiction de tout prosélytisme catholique dans leur juridictions par des patriarcats comme ceux d'Athènes, Belgrade ou Moscou.

Protestantisme (Églises issues de la Réforme)

Article détaillé : Protestantisme
Le protestantisme tire son origine dans la Réforme instaurée par Martin Luther au début du XVIe siècle. Martin Luther était un moine révolté par les abus de l'Église catholique et proposant une réinterprétation de la foi chrétienne fondée sur un retour à la Bible. Par la suite de nombreux personnages historiques ont instauré la réforme des églises se démarquant alors de l'Église catholique qu'ils considéraient en dérive. Les protestants refusent alors l'autorité du pape, et décident de ne dépendre d'aucune institution hiérarchique. Ce courant a donné naissance à de nombreuses Églises protestantes luthériennes ou réformées ainsi qu'à de nombreuses églises évangéliques (baptistes, méthodistes, pentecôtistes...).

Dialogue œcuménique

Article détaillé : œcuménisme
La version unioniste de l'œcuménisme est la volonté de bâtir une Église unique. Ce fut un temps la pensée de l'archevêque luthérien d'Uppsala Nathan Söderblom, prix Nobel de la Paix en 1929. Mais ce fut d'abord la nécessité d'une meilleure coopération entre les sociétés bibliques protestantes qui amena, à la fin du XIXe siècle, les premières tentatives de dialogue inter-confessionnel. En 1948, ces dialogues ont donné naissance au Conseil œcuménique des Églises (COE).

Dès 1927, plusieurs Églises orthodoxes ont participé au travail œcuménique de la conférence mondiale Foi et Constitution. Elles ont rejoint en 1961 le COE.

Avec le Concile de Vatican II, en 1962, l'Église catholique s'est engagée dans le dialogue œcuménique. Elle n'est pas membre du COE pour des raisons doctrinales (par exemple, depuis la déclaration Dominus Jesus l'Église catholique ne parle plus d'« Églises » pour les protestants mais parle de « communautés ecclésiales ») et de volonté de primauté. Cela ne l'empêche pas de participer à divers travaux de dialogue œcuménique.

Le christianisme face aux questions sociétales

Question sociale

La révolte des Canuts en 1831 fut l'un des premiers événements où se manifesta la misère ouvrière. Frédéric Ozanam en fut particulièrement bouleversé. À la suite de l'apostrophe d'un saint-simonien lors de l'une de ses conférences d'histoire, il décida de fonder la société de Saint-Vincent-de-Paul pour l'aide aux pauvres. Ce fut le début de l'action du catholicisme social, qui aboutit en 1891 à l'encyclique Rerum Novarum de Léon XIII, qui reconnaît les droits des ouvriers et cautionne solennellement le développement d'un mouvement social. Certains des premiers syndicats furent des syndicats chrétiens : par exemple le SECI, qui deviendra la CFTC, fut créé en 1887, trois ans seulement après la levée de l'interdiction de se syndiquer. Elle est créée après la Fédération nationale des syndicats, d'inspiration socialiste, en 1886, qui deviendra la CGT en 1895.

Depuis cette époque, en ce qui concerne le catholicisme, les papes ont régulièrement mis à jour la doctrine sociale de l'Église. Celle-ci comprend un ensemble de principes et de valeurs qui doivent dicter l'action des catholiques en matière sociale. L'action sociale des chrétiens peut aujourd'hui intervenir en France dans le cadre du bénévolat dans des associations.








 

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