Chartres Notre-Dame de la Brèche

Chartres
Notre-Dame de la Brèche

 File:Chapelle Notre-Dame de la Brèche Chartres Eure-et-Loir (France).jpg

La modeste chapelle de Notre-Dame de la Brèche, et la procession que le Chapitre de la Cathédrale y faisait chaque année le 15 mars, se rattachent à des faits non moins intéressants pour le sentiment national que pour la piété chrétienne.
L'énergique défense de la ville, assiégée par les Protestants, rappelle un des exploits les plus glorieux de nos compatriotes, en même temps qu'un des plus signalés bienfaits de Celle qui a détruit à elle seule toutes les hérésies de l'univers.
L'histoire du Protestantisme est encore à faire. Luther et Calvin viennent d'être démasqués par une main habile : c'était le commencement de l'œuvre. Maintenant que l'arbre est connu, il reste à apprécier le fruit à sa juste valeur. Le jour de la vérité viendra ; il approche. L'histoire se lassera de dissimuler ou d'amnistier les féroces initiatives de l'insurrection huguenote, pour n'insister que sur les égarements et les excès passionnés d'une défense légitime. Que chaque province compulse ses monuments ; et, après une sérieuse étude des faits respectifs, l'histoire pourra finir par comprendre qu'elle a servi d'écho trop complaisant aux criailleries du loup, et qu'elle n'avait pas compté tous les agneaux mangés par cette intéressante bête, pour laquelle elle a réservé si longtemps et si exclusivement toute sa sympathie.
En ce qui concerne le pays chartrain, les chiffres sont là. Nous sommes prêt à montrer que si la Saint Barthélémy n'a pas même égratigné un seul Protestant de la contrée, en revanche il y a eu trente Saint Barthélemy des Huguenots contre les Catholiques.
Le récit des événements dont Notre-Dame de la Brèche consacre le souvenir, nous offrira quelque spécimen de la cruauté impie et sanguinaire du parti protestant.
 Les hérétiques, ayant à leur tête le prince de Condé, qu'ils avaient proclamé roi sous le nom de Louis XIII, venaient de prendre Blois et se dirigeaient sur Chartres.
Cette ville, très-importante alors, avait grandement démérité aux yeux de la Réforme.
Marot, l'enfant gâté du parti, avait été atteint par une courageuse sentence de l'évêque de Chartres, Louis Guillard, qui, sans égard pour le poète, avait fait incarcérer le prédicant dans la geôle de l'officialité.
Depuis ce temps, malgré la protection publique de la duchesse Renée, et l'orthodoxie équivoque du second Guillard, la nouvelle doctrine n'avait pu se populariser parmi ce peuple obstinément Catholique, qui réparait par de solennelles processions l'injure faite à sa Vierge Noire, qui déchirait et livrait aux flammes les placards blasphématoires affichés au coin des rues, et qu'on vit plus tard poursuivre à coups de pierre, jusque dans le carrosse de l'évêque, un moine des Vaux de Cernay qui avait avancé des propositions hérétiques dans la chaire de Notre-Dame.
Le roi des Huguenots, en particulier, avait gardé rancune à cette ville de Chartres ; il se souvenait de la Renardière. Ainsi se nommait la prison de l'abbaye de St-Père, où il avait été enfermé à la suite de la bataille de Dreux. Aussi avait-il juré qu'il désolerait l'église de Notre-Dame, jetterait au vent ses reliques, et ferait manger son cheval sur le grand autel d'icelle.»
Le prince était accompagné de son neveu, D'Andelot, donl le seul nom faisait frissonner de peur les Catholiques.
Ce sectaire haïssait tellement les prêtres, qu'il avait fait un collier de leurs oreilles, disant priser davantage ledit collier que celui de l'ordre du roi.
La première chose qu'il faisait, arrivant dans une ville, était de faire épandre le sang de ceux de cet ordre sur les autels dédiés pour le sacrifice du sang du fils de Dieu, comme pour expiation de l'idolâtrie qu'ils imposaient au peuple.» 
Le 1er mars 1568, la ville se trouva investie. Elle était défendue au-dedans par Anthoine de Linières, chevalier des ordres du Roi, envoyé par lui à cet effet avec deux compagnies de cavalerie et cinq enseignes d'infanterie.
Jean de Bourdeilles, baron d'Ardelay, frère du célèbre abbé de Brantôme, avait été également introduit dans la ville avec six compagnies de Gascons, que leur défaut de discipline avait fait repousser quelque temps par les habitants.
La nécessité d'enlever à l'ennemi des abris favorables pour l'attaque, fut cause de la destruction de plusieurs monuments de très ancienne fondation, situés dans les faubourgs.
On vit disparaître en un même jour le couvent des Cordeliers avec sa magnifique bibliothèque, au faubourg des Épars ; l'abbaye de Saint-Jean, précieuse création du grand Yves de Chartres, qui avait voulu que son corps reposât au milieu de ses frères les chanoines réguliers ; enfin, l'hôpital des Six-vingts aveugles, fondé dès le 13e siècle au faubourg Saint-Maurice, à l'instar de celui des Quinze-vingts à Paris.
Les efforts des assiégeants se portèrent principalement du côté de la porte Drouaise.
Le clocher de l'église de St-Maurice permettait de voir ce qui se passait dans cette partie de la ville, dominée d'ailleurs par le côteau du Clos-l'Évêque. 
Il existe à la Bibliothèque de la ville de Chartres, un tableau qui retrace d'une manière frappante et conforme aux récits des historiens, les principaux détails du siège.
Ce fut le 6 mars au matin que les Protestants ouvrirent le feu contre la porte Drouaise avec cinq pièces de canon, tandis que quatre autres, placées en arrière des Filles-Dieu, prenaient en flanc les défenses.
Le lendemain, un pan de mur de vingt pas de long était renversé ; l'ennemi s'était emparé du ravelin qui couvrait la porte, et dont l'occupation rendait la prise de la ville inévitable.
Si le Ciel n'avait inspiré dans ce moment une résolution courageuse, le triomphe des hérétiques était assuré. Mais le gouverneur apprend le danger ; il appelle ses capitaines, échange avec eux la promesse de vaincre ou de mourir, et, après leur avoir serré la main, il s'élance à leur tête sur deux planches jetées en travers du fossé à la place du pont détruit par le canon. Quarante volontaires le suivent, et leur attaque est si impétueuse, qu'après avoir perdu deux cents des siens, l'ennemi est chassé de cette position qu'il ne put jamais reprendre.
En même temps échouait, du côté de la porte Saint Michel, une tentative d'escalade, qui n'eut d'autre résultat fâcheux que la mort du brave d'Ardelay.
Comprenant qu'il fallait revenir vers la porte Drouaise, le prince de Condé changea ses batteries et les dirigea contre la Tour des Herses et les murailles adjacentes.
L'artillerie dura, le 9 mars, depuis six heures du matin jusqu'à neuf heures du soir.
Une brèche de trente pas de long fut ouverte, et la Tour des Herses fut renversée au milieu de l'Eure.
Mais déjà Linières, aussi actif qu'intrépide, avait élevé en arrière un retranchement si formidable, que les assiégeants n'osèrent donner l'assaut ; et, après une nouvelle et inutile attaque du ravelin, ils abandonnèrent les fossés où ils étaient écrasés par le feu de la huguenote.
C'était une forte pièce de canon, enlevée aux Protestants et amenée à Chartres après la bataille de Dreux ; on l'avait placée sur une plate-forme qui existe encore entre le couvent des Jacobins (aujourd'hui des Sœurs de St-Paul) et la porte Drouaise. Elle rendit tant de services dans ce siège, que les habitants la reconnurent gaîment pour bonne catholique.

Le 12 mars, une hostilité d'un nouveau genre commence : la rivière ayant été détournée, les moulins à bras ne suffisent pas pour approvisionner la ville qui redoute la famine et plus encore la réduction ; chacun frémit à l'idée des meurtres, des profanations dont ou est menacé : quand, au grand étonnement de tous, un messager arrive, annonçant la suspension d'armes, et, le 15 au matin, l'ennemi se relire. S'il en fallait croire nos manuscrits, les Protestants avaient perdu 3 500 hommes, tandis qu'il n'en était mort que 250 du côté de la ville.
Nos pères ne balancent pas à reconnaître là le doigt de Dieu, la protection de la Vierge, Patronne et Dame de leur cité, et le secours de St Lubin, évêque de Chartres, dont le quatorzième jour de mars était alors la principale fête.
En effet, outre l'intervention générale de la Providence dans les événements humains, plusieurs circonstances du siège justifièrent la pieuse persuasion des habitants.
Par exemple, nous avons vu que le véritable danger pour la ville avait été dans l'occupation du ravelin de la porte Drouaise.
Or, tandis que toute la population était en prières, et que la sainte grotte souterraine regorgeait d'hommes, de femmes, d'enfants qui ne cessaient d'implorer la glorieuse et puissante Dame de Chartres, quelque chose de merveilleux se passait.
Une statue de la Vierge surmontait la porte Drouaise, avec l'inscription : Carnutum Tutela.
Les Huguenots se gabans que Marie pouvait autant en icelle ville que Diane en Ephèse, et prenant ladite image pour objet de leur rage et fureur, tirèrent contre icelle tant de coups de canons et artilleries, que tout ce qui était à l'entour demeura foudroyé jusqu'à quatre doigts près, selon que les vestiges y sont ores récents : néanmoins ils ne purent jamais atteindre la dite sainte image... »
Et ce fut à leur courte honte qu'ils l'éprouvèrent pour Dame tutélaire de Chartres : d'autant que repoussés, plutôt par sa puissance que des armes humaines, ils furent contraints après grande perte et tuerie de leurs gens de rebrousser arrière, et donner encore pour la seconde fois le nom aux Prés des Reculés au milieu des quels ils avaient superbement dressé leurs tentes exécrables.»
N'est-ce pas ce fait qui a donné lieu à la tradition si répandue dans le pays chartrain, et dont notre enfance à tous a été bercée, savoir : « Que la sainte Vierge recevait les balles ennemies dans son tablier ?» Ou bien faut-il en croire le récit plus merveilleux d'un de nos historiens, qui assure que les Huguenots s'étant approchés (le 9 mars) pour entrer dans la ville par la brèche qu'ils avaient faite, il se trouva qu'il se présenta, sur la dite brèche, à leur opposite, une grande Dame tenant un enfant dans ses bras, contre laquelle ils se mirent à tirer et à redoubler avec grandes des charges de paroles injurieuses, sans qu'ils pussent l'atteindre ni la frapper aucunement : au contraire, les balles qu'ils tiraient tombaient sans effet ni force aux pieds de la muraille, et eux pensant entrer se trouvaient reculés : Ce que les Chartrains ayant reconnu, et que c'était la Sainte Vierge qui avec son cher fils prenaient visiblement la défense de la ville en main, les ecclésiastiques et sexe féminin se mirent en prière, et les hommes en état de porter les armes s'assemblèrent et firent sortie sur les assiégeants qu'ils repoussèrent vigoureusement. »
 Les Huguenots se retirèrent pleins de dépit et de fureur.
Ils avaient compté sur le pillage de la ville et de l'église, dont le trésor, qui passait pour un des plus riches de la chrétienté, leur promettait un gros butin.
Le prince de Condé avait même vendu à l'avance les plombs de la Cathédrale ; « mais, dit naïvement le chanoine Souchet,  il ne put les livrer : d'autant que la Vierge glorieuse défendit cette ville, qu'elle reconnaît comme sienne, contre ses haineux et de son fils ; ce qui se peut tenir pour constant par les vestiges des balles qui se voient dessus, dessous et à côté de l'image de la Vierge en grand nombre ; desquelles, par un signalé miracle, pas une ne toucha ladite image, quoique les Huguenots eussent tiré contre plus de mille coups.»
Les crimes dont ces forcenés hérétiques se souillèrent en se retirant, prouvèrent assez aux Chartrains combien ils devaient rendre grâces au ciel de leur délivrance.
Les églises de la Maladrerie Saint-Georges (aujourd'hui la ferme de la Banlieue), de St-Barthélemy, de St-Cheron, du Grand-Beaulieu, de Morancez, de l'Abbaye de l'Eau, etc., furent pillées, profanées, incendiées.
On trouva dans l'église des Filles-Dieu les corps à demi brûlés de plusieurs ecclésiastiques tombés entre les mains de ces monstres.
Un religieux dominicain qui avait été attaché sur un gril, et posé sur les charbons comme un saint Laurent, ne fut sauvé de la mort que par une intervention surnaturelle et un prodige que Nicolas Lefebvre mentionne au long dans un de ses discours sur l'établissement de son Ordre à Chartres.
L'étude des histoires particulières de nos abbayes et de nos paroisses, révèle mille atrocités semblables de la part de ces inoffensifs Protestants, qu'on est convenu aujourd'hui de regarder comme d'innocentes et malheureuses victimes du fanatisme catholique.
 La population chartraine ne se montra pas ingrate à la suite de cet heureux événement.
De nobles courages s'étaient signalés pendant le siège, et le ciel avait fait sentir son assistance.
Redevable au glaive du Seigneur et au glaive de Gédéon, la ville voulut consacrer à la fois le souvenir des hommes héroïques et celui de la protection divine.
 Sur la muraille rebâtie à l'emplacement de la Brèche, c'est-à-dire entre la porte Drouaise et l'Eure, par décision de MM. de la ville, du 24 août 1568, fut engravé l'épitaphe suivant, qu'on y lit encore fort distinctement :
POSTERITATI.
Dùm nova relligio studia in contraria scissas Gallorum mentes agit, et bello omnia miscet, Carnutum premitur magnà obsidione, globisque Machina sulphureis oppugnat mania, quœ nunc Sarta et tccta vides. Salva incolumisquc remansit Urbs, duce I.ignerio, populi curàque fidelis, Atque manu parvâ numerosum reppulit agmen. Quàm pro rege suo, patriâque, arisque, focisque Sit pulchrum pugnare, atque hosti cedere nunquàm, Exemple hoc discant nati, serique nepotes. Carnutum obsessum anno Domini M. D. LXVIII, pridiè kal. Martii. Solutum obsidione Idibus.
La même inscription se retrouve en vers hexamètres et pentamètres , moins élégants peut-être , mais plus religieux :
Dùm nova relligio studia in contraria Gallos
Scindit, et insanus cogit ad arma furor;
Carnutum premitur magnâ obsidione, ruuntque
Crebrô conflictis mamia fulminibus.
Sed Pater Omnipotens casus avertit acerbos,
Prastôque adest Urbi Virgo Beata sua;.
Et,'duce Lignerio, clero adnitentc potenter
Ac populo, hostiles terga dedêre manus.
Sic pro Rege tuo, patriâque, Arisque, focisque,
Disce patrum exemplo vincere Posteritas.

Mr Sébastian Rovillard de Melun, Aduocat en Parlement, dans sa Parthenie ou histoire de la Très Auguste et Très-Dévote Église de Chartres, a exercé sa muse sur ces distiques, lesquels, dit-il, se peuvent paraphraser en cette rythme française :
« Tandis qu'une nouvelle, et fausse opinion
» Divise les cœurs français leur antique union :
» Et qu'on voit çà et là onder à grosses flottes
» Les traitres étendars des troupes Huguenotes :
» Chartres est assiégé, et ses murs sont battus ;
» Mais qui ores de Tours et Dongeons reuestus,
• Témoignent que la Vierge a sauvé cette ville
» Du furieux assaut de la guerre civile :
» Lignière y étant chef sur maints bons citoyens,
» Qui n'y ont épargné leur vie, et leurs moiens.
» Apprend par là combien c'est œuvre méritoire
» De défendre sa Foi, et de son Roi la gloire :
» Apprend-le sans oubli, ô race des Neveux,
• Et rechante l'honneur de tes braves aïeux. »
Jean Grenet, Conseiller au Baillage, auteur de celle inscription latine, lit imprimer en outre un poème sur le siège de Chartres et sur la délivrance miraculeuse de la ville. Nous n'avons pu nous le procurer. Mais ou verra que les muses chantâmes continuèrent longtemps à s'exercer sur ce sujet patriotique et religieux à la fois.
Le 27 janvier 1569, l'époque anniversaire de l'heureuse délivrance approchant, MM. de la ville délibérèrent, et, conformément au vœu des habitants, le 6 février, on commet deux de MM. les Échevins pour se transporter vers M. l'Évêque, retiré en son château et baronnie de Pont-gôen, afin qu'il ordonne et statue et rende célèbre et solennel dans la ville et banlieue de Chartres, à perpétuité, le Quinzième jour de mars, en considération et reconnaissance du grand bénéfice que toute la ville et diocèse du pays chartrain a reçu de Dieu au dit jour, l'ennemi ayant décampé et levé le siège devant la ville, et qu'il ordonne du service, sermons, et prières nécessaires avec processions générales et autres choses requises. »
Cette demande de la ville était trop conforme aux dispositions de l'Évêque et de son clergé, pour être refusée.
Une ordonnance de Charles Guillard, datée de Pont-goen, institua la procession de Notre-Dame de la Brèche, qui fut célébrée pour la première fois le mardi 15 mars 1569.
Trois ans après, Me Marie Sallier, Chanoine, annonça en Chapitre assemblé qu'il désirait fonder à perpétuité ladite fête de Notre-Dame de la Brèche ou de Notre-Dame de la Victoire, en l'honneur de la Vierge, pour être célébrée par chacun an le 15e jour du mois de mars, pareil jour que, moyennant la grâce de Dieu, le camp et assiégement fait par les ennemis de la religion catholique, apostolique et romaine, fut levé de devant les environs de cette ville de Chartres.
Le fondateur dota le Chapitre à cet effet d'une somme de 2060 livres, formant 105 livres de rentes, qui, par suite d'un arrangement capitulaire, étaient perçues sur les Prestrières d'Archevilliers et Macelin. De ce revenu, 75 livres étaient affectées à la fondation de l'Office susdit, avec Procession dans la ville, et Motet devant Notre-Dame de la Brèche ; les 30 autres livres, à l'obit solennel pour le repos de l'âme du dit Sallier. »
Cependant la chapelle de Notre-Dame de la Brèche n'existait pas encore ; mais seulement, à l'emplacement où elle a été bâtie un peu plus tard, il y avait une Image de la Vierge, ayant une grande robe, sous laquelle au côté droit elle couvrait un nombre d'Écclesiastiques et habitants à genoux, et de l'autre plusieurs hommes armés, tirant contre la Vierge : en mémoire des hagiomaques repoussés par la dite Vierge.
 La procession de Notre-Dame de la Brèche se célébrait avec une grande solennité, puisque cette procession et celle de la Fête-Dieu étaient les deux seules processions générales ordinaires auxquelles les compagnies séculières assistaient, à savoir le Baillage et Présidial, le Corps de la ville et les autres corps, qui étaient tenus de s'y rendre sans y estre invités.»
Le clergé séculier et régulier de toutes les paroisses et contents d'hommes, de la ville et banlieue, faisait toujours partie de cette procession.
Le cortège descendait la rue Muret, saluait la Vierge célèbre de la porte Drouaise, et s'arrêtait devant l'Image de Notre-Dame de la Brèche, au coin de la ruelle du Pont du Massacre ; puis, il se rendait à l'église de Saint-André, d'où, après avoir dit plusieurs prières pour le repos des âmes de ceux qui sont trépassés dans la défense de la ville, (chose très sainte, puisqu'ils sont morts non seulement en Dieu, mais pour Dieu même et son sacré service), on rentrait à la Cathédrale. »
Les choses se passaient ainsi depuis plus de vingt ans déjà, lorsque, le 12 février 1591, Henri de Navarre vint mettre le siège devant Chartres. Nous espérons faire ressortir ailleurs toutes les circonstances trop peu connues de ce siège mémorable, qui forme assurément une des plus belles et des plus glorieuses pages de l'histoire de la Ligue.
Les intrépides défenseurs de la ville montrèrent, dans leurs personnes, le véritable type du Ligueur Catholique. Oubliant tous les motifs d'opposition passionnée et d'intérêt particulier qui avaient pu se mêler à la naissance de la Ligue, les Chartrains résistèrent uniquement pour la défense de leur religion, et pour le maintien d'un droit écrit implicitement dans le pacte fondamental de la monarchie, et non moins incontestable que le principe même de la légitimité héréditaire : le droit du peuple français, essentiellement catholique, de n'être régi que par un Roi catholique.
Du reste, ils ne cessèrent de témoigner la disposition où ils étaient de reconnaître Henri de Navarre pour leur souverain, dès l'instant que son retour à l'Église catholique lui rendrait ses titres au trône du Roi Très-Chrétien, Fils aîné de l'Église.
 Il se passa durant le siège des choses si singulières, que les assiégeants eux-mêmes ne pouvaient s'empêcher de dire que Dieu s'était fait Ligueur.
Le peuple, de son côté, donnait ses interprétations à tout ce qui lui semblait renfermer des présages.
Le premier boulet qui fut lancé par les ennemis, passa par dessus la grande salle de l'évêché, et alla renverser les poteaux de ce qu'on appelait alors la Chambre du Roi : or, ceux de la ville tenaient pour certain que le premier complot de l'assassinat du duc de Guise avait été formé en cette chambre.
Un autre boulet, non moins intelligent, alla chercher au milieu des autres cloches et briser en éclats la cloche Renée, ainsi appelée du nom de la Duchesse apostate. De là, que de conclusions ? 
Parmi toutes les prières qui se faisaient journellement aux pieds de la Madone pendant les deux mois que dura le siège, et les processions, tant à l'intérieur de l'Église haute et basse, que dans les rues de la ville, on n'oublia pas la procession de Notre-Dame de la Victoire.
Elle fut célébrée le 15 mars 1591 avec une pompe inaccoutumée et un éclat extraordinaire, au son de toutes les cloches, dont la mélodie émerveilla le bon Henri, qui défendit de tirer le canon toute la journée, ne voulant pas qu'on troublât la dévotion des habitants.
Le Roi dès lors valait mieux que la plupart des mauvais Catholiques qui s'étaient associés à sa cause, et sans les flatteries desquels il eût beaucoup moins lardé à abjurer ce culte mal-né et trop jeune, dont son esprit droit et son cœur généreux savaient faire justice.
C'est ce que le maire de Chartres, Suyreau répondait hardiment un jour au célèbre Biron, qui lui objectait que lui et plusieurs autres de l'armée du Roi de Navarre étaient Catholiques : « Nous vous réputons tels que vous êtes, lui disait-il, et plus médians que lui, traîtres à vôtre mère l'Église puisque vous bataillez contre elle : si vous ne flattiez point le Roi, il y a longtemps qu'il serait converti, et que nous aurions mis fin à tous nos différents ; il n'y a que vous qui l'en empêchez par des respects humains qui n'ont apparence de raison. »
 Trois ans plus tard (le 27 février, premier Dimanche de Carême, 1694), Henri IV, Roi Très-Chrétien de France et de Navarre, Fils aîné de l'Église, recevait la consécration royale dans l'Église Cathédrale de Chartres, des mains de l'Évêque Nicolas de Thou.
Le Protestantisme, qui s'était flatté d'envahir le royaume et de monter sur le trône, venait ainsi se briser aux pieds de la Vierge de Chartres ; comme le Paganisme y avait expiré par la défaite des Normands et la conversion d'Hasting et de Rollon ; comme y avait échoue encore, par suite du miracle et du traité de Brétigny, l'invasion des Anglais, qui nous eussent infaillement doté, deux siècles plus tard, de leur schisme et de leur hérésie : malheur plus déplorable encore que la perte de notre nationalité. Ainsi se dissipèrent à nos portes toutes les calamités qui menaçaient la foi de la France.

La dévotion à Notre-Dame de la Brèche, que les auteurs de cette époque appellent quelquefois Notre-Dame du Rempart, sembla encore augmentée après ces derniers événements.
L'an 1598, le Dimanche des Rameaux tombant le 15 mars, on crut que, dans cette concurrence, la procession de la Brèche devait l'emporter sur la procession générale des Palmes, que l'on faisait chaque année à l'église abbatiale de Saint-Cheron.
Les deux solennités furent donc combinées ; et, après la station ordinaire devant la Brèche, on procéda à l'adoration de la croix dans le cimetière de St-André.
Enfin, deux ans plus lard, la petite Chapelle de la Brèche fut érigée, à la grande satisfaction des habitants de la ville et principalement de ceux du quartier.
Laissons parler un de nos historiens. « En l'an 1600, c'est-à-dire neuf ans depuis le siège mis devant la ville par le Roi Henry-le-Grand, et trente-deux ans depuis celui mis par les Huguenots sous la conduitte du Prince de Condé, en un lieu proche et qui regarde la muraille où la brèche avait été faille, Me Simon Sauquet, Chanoine de St-André, exécuteur du testament de M° Simon Berthelot, son oncle, Chanoine de la même église, a fait bâtir une chapelle qui a reçu le nom de Notre-Dame de la Brèche.
En la place où elle est, il y avait autrefois une image de la Saincte Vierge, revêtue d'un grand manteau, sous  lequel au côté droit elle couvrait un grand nombre d'Ecclésiastiques et de peuples à genoux, et de l'autre côté plusieurs hommes armés, tirant de leurs armes contre l'image de la Vierge ; en mémoire de ce que les Huguenots ayant tiré un nombre infini de coups de mousquets contre la Sainte Vierge qui est au dessus de la porte Drouaise, ne l'avaient pu frapper quoiqu'ils tirassent autour et même derrière l'image : dont les marques ont paru fort longtemps depuis, et jusqu'à ce qu'un bourgeois de la ville, pensant bien honnorer la Sainte Vierge, a fait réparer, peindre et dorer la niche dans la quelle cette image est posée, ôtant par cet ornement la mémoire et le souvenir de ces glorieuses marques de l'assistance de la Sainte Vierge, notre illustre Patronne. »
En commémoration des secours que les habitants reçurent de la Sainte Vierge en ces deux sièges de 1568 et de 1591, et même en ceux des Normands longtemps auparavant, pendant lesquels les assauts ont toujours été donnés en cet endroit, à la procession générale qui se fait par chacun an le 15 mars en ce quartier, et à la quelle l'on porte les Reliques ordinaires de Notre-Dame, le clergé s'arrête devant la Chapelle de la Brèche, et y fait et dit plusieurs prières dehors, parce que la chapelle étant petite le clergé n'y saurait entrer. »
La susceptibilité huguenote fut blessée de ces témoignages de reconnaissance des Catholiques envers la Vierge qui les avait protégés.
Le tableau en bas-relief excitait surtout leur colère.
Un de nos derniers historiens se prend d'un beau zèle contre cette manifestation vive et cette haine des Orthodoxes. Je le conçois. Que les Protestants tirent des coups de mousquets et de canon contre les Catholiques, à la bonne heure ; mais que les Catholiques, sur un inoffensif tableau, représentent le fait historique de l'aggression des Protestants, c'est là une intolérance qu'il faut réprimer et flétrir. Permis aux loups de croquer les agneaux ; mais de quel droit ces fanatiques agneaux oseraient-ils s'en plaindre ou même s'en souvenir ? — Voilà justement dans quel esprit est écrite l'histoire de nos trois derniers siècles.
— Or donc, à propos du bas-relief en question, les pacifiques réformés firent grand bruit, présentèrent requête au conseil en 1603.
M. Mauger, Maître des Requêtes, et depuis Garde des Sceaux, vint exprès et en personne à Chartres pour faire disparaître ces tableaux injurieux.
Plus tard néanmoins ils furent rétablis, et, au dix-huitième siècle, il en existait encore plusieurs, tant dans l'oratoire de la Brèche qu'à Saint-André et ailleurs. 
Une nouvelle délibération de MM. de la ville, ajouta beaucoup à la popularité de la cérémonie du 15 mars.
De temps immémorial, la ville de Chartres était dans l'usage d'entretenir devant l'image de Notre-Dame, un cierge appelé la Chandelle du Tour, le Tour de Cire, le Tour de Ville ; lequel, fait et institué d'ancienneté de la part du corps et communauté de la dite ville, pour être présenté par oblation pour le salut d'icelle, doit brûler et ardre devant la dite image (t). » Ce Tour de Ville consistait dans une bougie de cire jaune, d'une longueur démesurée, roulée sur un cylindre en bois, et pesant jusqu'à 220 livres ; chaque jour on coupait un morceau de cette bougie, et on l'allumait sur le chandelier de la ville.
Il est fait mention aux Registres municipaux, de 10 sols tornois payés le 30 septembre 1508 à Jean François, attacheur de chandelles en l'église de Notre-Dame de Chartres, pour une année de ses peines pour une chandelle de cire du tour de la ville, qu'il allume chaque jour et chaque nuit pendant la dite année devant l'image de la Vierge en la nef de l'Eglise. »
En 1529, l'éteigneur de chandelles recevait 20 sols tornois pour son salaire d'allumer et entretenir le feu du tour de la ville. »
Pendant longtemps, le Tour de la Ville était présenté indistinctement à quelqu'une des fêtes de l'année ; c'était assez souvent le 17 octobre, fête de la dédicace de l'Église de Chartres, et on le portait à la procession qui se faisait par l'Église haute et basse.
Mais dans le courant du XVIIe siècle, la cérémonie annuelle de la présentation du Tour de Cire, fut fixée au 15 mars.
Tout le Corps de ville se rendait, avant la procession, devant la Vierge Noire du Jubé ; c'était ordinairement le Maire qui allumait la première bougie détachée du Tour ; mais quand il se trouvait à Chartres quelque prince ou homme de considération, on lui cédait cet honneur.
Le Tour de Ville était ensuite porté à la procession solennelle de la Brèche, et ce n'en était pas l'ornement le moins remarqué. 
 La procession était ordinairement précédée d'un sermon, prêché alternativement par un religieux Cordelier et par un Dominicain.
Le 15 mars 1690, un Jacobin prit pour texte de son sermon cet acrostiche, qu'il avait composé sur le mot Carnulum :
C hristum
A doremus
R edemptorem
N ostrum.
U rbis
L utelam
U eneremur
M ariam.
La piété et la reconnaissance des Chartrains s'étaient encore manifestées en suspendant devant la porte et au-dessus de l'autel de la Chapelle de la Brèche, un grand nombre de boulets de canon, recueillis au bas de la porte Drouaise et des remparts de la ville, à la suite des deux derniers sièges.
Plusieurs de ces boulets, et quelques autres qui étaient suspendus devant la Vierge Noire de la Cathédrale, ont été remis à notre disposition par des habitants qui les conservaient depuis 1791.
Jusqu'au remaniement du Bréviaire fait en 1783, outre la Procession et la Messe solennelle de Notre-Dame de la Brèche, il y avait tout un Office du jour : In festo commemorationis Beatœ Mariœ Firginis, infrà muros Vrbis Carnotensis, pro Victoria contrà hœrelicos obtentâ et ipsius vrbis ab obsidione Calvinistarum liberatione.
Celte fête, indiquée double-solennelle dans le Missel de Léonore d'Estampes de Valençay (1624), a continué d'être solennelle-mineure depuis le Bréviaire et le Missel de Ferdinand de Neufville de Villeroy (1669).
D'après les rubriques établies par ce dernier évêque, cette solennité devait être remise au lendemain lorsqu'elle tombait le Dimanche, et anticipée au 13 mars lorsqu'elle coïncidait avec le Dimanche des Rameaux.
En 1624, cette fête était d'obligation pour toute la ville, et entraînait la cessation de toute œuvre manuelle.
Le Calendrier chronologique et historique du Livre d'Église donné par Charles de Monstiers de Mérinville en 1738, nous apprend que cette fête n'était plus dès-lors que de dévotion pour le peuple.
 Nous avons parlé de plusieurs poésies faites à diverses époques, pour consacrer l'événement du 15 mars 1568 ; on en trouvera quelques unes à la fin de cette Notice.
Les deux premières cantates sont extraites d'un Recueil de Motets composés par P. Bourcy, maître de musique à Chartres, et imprimé en 1693 ; la traduction en vers français est de Danchel, régent de rhétorique au collège de Chartres. C'étaient ces pièces de chant qui formaient les beaux mottets dont parlent nos historiens.
Jusqu'à la Révolution française, la Chapelle de Notre-Dame de la Brèche, dépendante du Chapitre de Saint André, était desservie par un de ses membres.
Dans les registres capitulaires de cette collégiale, il est question du chanoine semainier des messes de la Brèche, et, à chaque Chapitre général, un de MM. les Chanoines est chargé d'avoir soin de ladite Chapelle.
Le trésor de la Brèche n'était pas difficile à garder ; lorsque la Nation vint faire son inventaire et apposer les scellés en 1790, elle n'y trouva pour toute argenterie qu'un calice, une patène et un petit cœur, avec quatre ornements de différentes couleurs et les linges nécessaires à la célébration de la messe.
Nous savons par la tradition de plusieurs familles, que, le jour de Notre-Dame de la Brèche, le pain bénit était offert à tour de rôle par les maisons voisines : pieuse pratique que plusieurs habitants du quartier demandent à renouveler.
Un pieux pèlerinage s'était établi dans la Chapelle de la Brèche ; outre les nombreux concours de fidèles qui s'y succédaient dans la journée du 15 mars, le Chanoine semainier y récitait fréquemment des Evangiles à l'issue de la Messe.
Les mères en particulier venaient invoquer la Vierge de la Brèche, et aussi la Vierge de la porte Drouaise, pour leurs fils exposés aux périls de la guerre.
— Que de fois, pendant les vingt années qui suivirent la destruction de l'un et l'autre de ces monuments, le cœur des mères dut-il regretter de ne plus pouvoir déposer ses prières, baignées de larmes, aux pieds de Celle qui détournait les coups et qui recevait les balles dans son tablier ?  
La procession se fit pour la dernière fois à la Brèche, le 14 mars 1789. M. le Duc de Doudeauville, récemment nommé par le Roi gouverneur de Chartres, fit les honneurs du Tour de la Ville. Nous transcrirons ici en partie le procès-verbal du Registre de l'Hôtel de Ville : un acte à peu près semblable se retrouve chaque année à la date du 15 mars.
• Du 14 mars 1789. Fête de N.-D. de la Victoire, et Présentation à la Vierge du nouveau tour de Bougie de la ville faite par M. le Duc de Doudeauville gouverneur.
« Aujourd'hui samedi 14 mars 1789, 8 heures 1/2 du matin, fête de N.-D. de la Victoire (qui a été remise aujourd'hui et non lundi par M. l'Evêque ainsi que la Procession générale, attendu que lundi est le jour que  les trois ordres du Baillage s'assemblent pour les États Généraux), le corps de ville, précédé des deux fouriers, des gardes de MM. les gouverneurs, des tambours et musiciens, a rencontré à la porte de son hôtel MM. les officiers du Baillage présidés par M. le Lieutenant Général et précédés de leurs huissiers. Les dites deux compagnies réunies ensemble, le Baillage tenant la droite, et la ville la gauche, auraient été conduites à l'Évêché pour prendre M. le Duc de Doudeauville et l'auraient amené à leurs têtes jusqu'à l'église Cathédrale Notre-Dame de cette ville : où étant arrivées par la Porte Royale, le Présidial se 
• serait rendu dans la chapelle de quatre heures, et le
• corps de ville ayant à sa tête M. le Gouverneur aurqit été conduit jusqu'à l'endroit de la nef vis à vis l'image de la Sainte Vierge où était le nouveau tour de Bougie de cire jaune que la ville est dans l'usage de présenter de temps immémorial pour être consumé devant l'image de la Sainte Vierge ; et à l'instant l'un des portiers aurait allumé un cierge de cire Blanche qu'il aurait remis au plus ancien fourier, qui l'aurait présenté à M. Triballet du Gort Maire, qui l'aurait remis aussitôt à M. le Gouverneur qui aurait allumé la dite Bougie ; pendant la quelle cérémonie les tambours et musiciens auraient battus et joués de leurs instruments ; après quoi le dit fourier avec le dit cortège auraient été déposer icelui cierge dans un chandelier de fer qui était devant la dite image de la Sainte Vierge. Ensuite le corps de ville ayant à sa tête M. le Gouverneur aurait été conduit à la Chapelle de Vendôme rejoindre le Présidial ; et à l'instant la procession s'étant mise en marche, la dite Bougie n'y aurait point été portée vu le mauvais temps. La compagnie du Présidial tenant la droite et ayant à sa tête M. le Grand Bailly, et le corps de ville la gauche, aux deux côtés desquelles deux compagnies étaient les dix fusiliers pompiers, auraient assisté à la dite procession qui aurait  parcouru les rues accoutumées ; et icelle procession rentrée en l'Eglise Cathédrale, et le motet chanté devant la nef, les dites deux compagnies seraient entrées dans le chœur et auraient entendues la messe haute qui aurait été célébrée par M. Poulain, chanoine, etc... »
On trouve dans les pièces de la propriété, la note suivante : « 28 octobre 1791. Devant le District de Chartres, procès-verbal constatant la vente d'une maison, et d'une petite chapelle appelée Notre-Dame de la Brèche attenant à ladite maison.» Il résulte de ce procès-verbal, que la vente de cette propriété religieuse avait été ordonnée par arrêté du département, du 17 juillet 1791.
L'acquéreur ne tarda pas à faire abattre le toit du petit oratoire ; monument plus précieux par son objet que pour son mérite archéologique. Au-dessus de la porte, conservée jusqu'à nos jours, on lit encore l'inscription Notre-Dame de la Brèche, gravée sur la pierre, ainsi que les armes et les initiales du Chanoine fondateur : S. S.
Quelques années après, la porte Drouaise fut détruite par suite d'une délibération municipale ; avec l'Image antique disparurent les dernières traces monumentales, qu'une restauration maladroite avait déjà en grande partie effacées.
 Depuis 1790 jusqu'en 1863, les choses restèrent en cet état. La Procession de Notre-Dame de la Brèche, interrompue pendant les mauvais jours de la Révolution, recommença de se faire aussitôt après le rétablissement du culte catholique ; mais seulement dans l'intérieur de la Cathédrale, avec station devant la Vierge Noire.
Les paroisses, couvents et séminaires de la ville n'étant pas dans l'usage, même avant la Révolution, de se rendre aux processions générales lorsque quelques circonstances empêchaient qu'elles se fissent dehors, il fut réglé par l'Ordo diocésain, que la messe commémorative serait célébrée dans toutes les églises et chapelles intrà urbem, et qu'elle serait précédée de la procession dans les églises paroissiales de St-Pierre et de St-Aignan.
Il n'était pas rare, jusqu'à ces derniers jours, de voir de pauvres femmes, prosternées à terre, baiser pieusement le seuil du sanctuaire de la Brèche, ruiné et profané, dans lequel il ne leur était plus permis d'entrer.
Le 25 mars 1843, jour de l'Annonciation de la Sainte Vierge, M. l'abbé Baret, Chanoine honoraire et premier Vicaire de la Cathédrale, s'est rendu adjudicataire de la maison et du jardin de la Brèche. Le vendredi de la Compassion de la Sainte Vierge, 7 avril, la première pierre de la nouvelle Chapelle était bénite et posée par M. Lecomte, Vicaire général, Chanoine Théologal et Archiprêtre de la Cathédrale, délégué spécialement par Mgr Claude-Hippolyte Clausel de Montals, Évêque de Chartres.
L'inscription historique, renfermée dans la première pierre, se termine par cette prière, imitée des paroles de l'Écriture : « Dominus sit in circuitu populi sui, et Sancta Domini Mater conservet in œlernum civitatern suant ab otnni hœreticâ labe et morum corruptelâ impollutam ! »
— « Que le Seigneur fasse la garde autour de son peuple, et que la Sainte Mère du Seigneur conserve à jamais sa ville pure de toute tache d'hérésie et de toute souillure de mœurs ! » 
Dans quelques mois, la rue de la Brèche aura retrouvé sa Patronne, dont elle se glorifiait tant jadis, et que depuis un demi-siècle elle déplorait d'avoir perdue.
L'Oratoire sera reconstruit sur le même emplacement et dans des proportions un peu moins étroites que celui qui a été renversé.
La ville entière y sera représentée par les sept patrons des sept anciennes paroisses intrà muros.
La reconnaissance et la prière reviendront déposer leurs vœux aux pieds de l'Image sainte ; le sacrifice d'action de grâces et d'expiation sera célébré sur l'autel ; et le cortège sacré pourra faire retentir de nouveau les rues Muret et Chantault des cantiques si bien appropriés, qu'elles ont redit pendant plus de deux siècles. 
Source : Livre "Notice historique sur Notre-Dame de la Brèche" par Louis-Édouard Pie

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