Reliques du Saint lait
Les reliques de la grotte du Lait de la Vierge furent importées durant des siècles dans toute l'Europe.
Par
leurs propriétés, elles correspondaient un peu à l'eau de Lourdes de
nos jours, un « souvenir » ramené d'un lieu saint, aux vertus réputées
curatives.
Récits de pèlerins
Grotte du lait
Voici
plusieurs siècles tout le monde ne pouvait aller en Terre Sainte, mais
on connaissait des lieux par les récits de pèlerins et de voyageurs : le
premier récit qui nous soit parvenu de la visite de la Grotte du Lait
est celui de Philippe de Busseriis au XIIIe siècle.
Le
récit de François Quaresmius, gardien des lieux saints, est le plus
connu, enfin on possède aussi celui de Marcel Ladoire, frère mineur de
passage en Terre Sainte, ainsi que celui de très nombreux autres
franciscains et pèlerins.
Vertu de cette grotte
Grotte du Lait
La légende
La
légende rapporte que la roche de la grotte a contracté cette vertu,
depuis que la Vierge Marie, s'y étant un jour retirée, donna le sein à
l'Enfant Jésus, et laissa tomber quelques gouttes de son lait sur une
anfractuosité de la grotte : une source en aurait aussitôt jaillit, et
la roche serait immédiatement devenue tendre et blanche comme une masse
de lait, et la grotte serait alors devenue entièrement blanche : les
gouttes de lait de la Vierge Marie se seraient mélangées à la poussière
du sol. Depuis lors la terre calcaire blanche de la Grotte du lait
s’appela « lait de la Vierge ». Les reliques du saint lait étaient donc
des morceaux de pierre de la grotte du lait appelée par extrapolation
« reliques du saint lait de la Vierge ».
«
Non loin de l'église de la Bienheureuse Vierge Marie se trouve l'église
Saint-Paule, noble dame romaine qui fit pénitence avec sa fille
Eustochium, vierge consacrée et religieuse. Sous cette église se trouve
une crypte et une chapelle. On raconte que la Vierge Marie quelquefois y
demeura avec son fils unique Jésus-Christ Notre Seigneur, et on raconte
que la Madone laissa tomber de ses mamelles, en les pressant, un peu de
lait sur la terre, et à cause de cela la terre devint si blanche, que
l'on pouvait la prendre pour du lait. On raconte aussi que pour ce motif
une femme ayant similairement perdu son lait, mit une peu de terre sur
un peu d'eau et la but et immédiatement retrouva son lait »
— Fr. Philippe de Busseris, OFM , Liber Peregrinationum (1285-1291)
« On
dit que tandis qu'on massacrait ces petits enfants, vous vous cachâtes
en une grotte trois jours et trois nuits, lorsque vous eûtes une si
grande abondance de lait en vos sacrées mamelles, que vous en répandîtes
en cette grotte: à cause duquel la terre d'icelle porte médecine voire
plus qu'une « terra sigillata », de sorte que si les nourrices, voire
les brebis et autres animaux qui n'ont plus de lait, prennent de cette
terre détrempée en eau, le lait leur vient en abondance. c'est pourquoi
les Maures et les Turcs en portent vendre en Perse et en Éthiopie,
lesquels sachant toutefois d'où vient cette vertu, ils l'attribuent au
naturel du terroir. »
— F.J. Benedicti, La somme des péchés et le remède d'iceux, 1587
«
A peu de distance de la grotte de la Nativité et de l'église de la
sainte Vierge, à Bethléhem se trouve un souterrain dans lequel sont
creusées trois grottes ; dans celle qui est au milieu, le saint
sacrifice de la messe a été souvent célébré en mémoire du miracle qui
s'y est opéré : on l'appelle communément la grotte de la Vierge ou
l'église de Saint-Nicolas. Une bulle du pape Grégoire XI (mort en 1378)
mentionne cette chapelle de Saint-Nicolas à Bethléem, et permet aux
franciscains d'y bâtir une maison avec clocher et cimetière. » On lit
encore dans un ancien manuscrit sur les lieux saints : « Item, l'église
de Saint-Nicolas, où est la grotte dans laquelle, suivant la tradition,
la sainte Vierge s'est cachée avec l'Enfant-Jésus. » Quaresmius, après
avoir rapporté la tradition vulgaire sur cette grotte, ajoute que la
terre de cette grotte est naturellement rouge ; mais qu'étant réduite en
poussière, lavée et séchée au soleil, elle devient blanche comme la
neige, et que, mêlée avec de l'eau, elle ressemble parfaitement à du
lait. La terre ainsi préparée s'appelle lait de la sainte Vierge. On en
fait une potion salutaire pour les femmes qui ne peuvent pas nourrir, et
on l'emploie aussi avec succès contre d'autres maladies. Même les
femmes turques et arabes en retirent une telle quantité de terre pour
l'employer ainsi, que ce qui était autrefois une seule grotte en forme
trois aujourd'hui. Les reliques qui, dans plusieurs lieux de pèlerinage,
portent le nom de Lac beatæ Virginis, et donnent lieu à beaucoup de
moqueries, ne sont le plus souvent que de la terre de cette grotte de
Bethléem dont parle Catherine Emmerich. »
— D'après Frère Franciscus Quaresmius (en) 1632
«
Ce Turc mit la main sur son turban, me jurant par son Mahomet, que je
pouvois m'y fier , qu'il nous conduirait en toute dureté dans la grotte,
qu'il nous ramenerait de même dans nôtre Convent, & qu'il
s'engagezit de ne voir ses femmes de quinze jours, s'il nous arrivait la
moindre chose de fâcheux. Quand nous vîmes qu'il persistzit a ne
vouloir pas parler plus avant nos truchements , nous nous déterminâmes à
retourner sur nos pas, ne nous souciant pas de son jurement turquesque :
avant d'entrer dans le Convent, nous entrâmes dans la grotte de Lait,
qui fe nomme ainsi , parce que selon diction , la sainte Vierge y entra
pour fe cacher pendant que faint Joseph étoit allé à la ville prendre
quelques provisions four leur voyage d'Egypte , où un Ange lui avait
ordonné de la part de Dieu de fuir avec l'Enfant Jesus et sa sainte
Mère ; &: comme durant le peu de tems qu'elle fut obligée de fe
tenir cachée dans cette grotte , elle donnait à têter à son Enfant
divin, elle répandit quelques gouttes de son lait virginal fur la terre,
qui en a contracté la vertu de faire venir du lait aux nourrices quand
elles l'ont perdu , & d'en donner à celles qui en ont peu : non
seulement les femmes Chrétiennes profitent de ce bienfait, mais les
Infidèles , & qui plus est, les bêtes elles-mêmes participent à
cette faveur extraordinaire , quand on leur fait boire de l'eau dans
laquelle on a mis détremper un peu de cette terre : cette grotte est
dans un rocher, pour y descendre on allume des bougies , la porte est
basse & étroite. »
— Frère Marcel Ladoire O.F.M., Voyage fait a la Terre Sainte en l'année, 1719
La roche calcaire
La
roche de cette grotte est très friable, une craie blanche (tuf) qu'on
réduisait en poudre : on en faisait de petits pains qu'on envoyait dans
tout le pays. Cette roche, serait du lait de lune ou de microcristaux,
composée de minéraux, principalement de carbonates, tels que le soufre,
le calcium, la silice, le carbone, la craie et qui, au contact avec de
l'eau, forme une substance épaisse et crémeuse blanche ou sèche, une
poudre blanche de poussière calcaire. Un phénomène tout à fait naturel,
dans certaines conditions géologiques, en la présence de cours d'eau
souterrains, créa ça et là un peu partout, de véritables « rivières de
lait », de l'Italie à l'Espagne au Canada et, plus précisément au
Moyen-Orient, ce qui pourrait expliquer les nombreuses reliques du Saint
Lait dispersées dans toute l'Europe par les anciens combattants de
retour des Croisades. En plus de cette craie, on recueillait dans des
fioles la substance liquide dont les murs de la grotte suintaient durant
les temps humides, sous le nom de lait de la Vierge.
Vertu de cette grotte
La
roche de cette grotte est très friable, une craie blanche (tuf) qu'on
réduisait en poudre : on en faisait de petits pains qu'on envoyait dans
tout le pays. Cette poudre aurait la vertu favoriser la lactation, de
rendre le lait aux femmes qui l'ont perdu par quelque maladie, ou de
l'augmenter à celles qui en ont peu : selon la légende, grâce à la
Vierge Marie qui retrouva là son lait. On la donnait à toutes les
nourrices qui manquaient de lait. La roche est blanche. Comme la
poussière de cette roche empêchait les nourrices de perdre leur lait,
mélangée la la nourriture, ou bien dans la boisson, eau, bouillon ou vin
blanc, les femmes et les pèlerins de toute confession et nationalité
(grecs, arméniens, russes, musulmanes, juives ou chrétiennes, venaient
chaque jour en emporter un peu après avoir récité une prière dans la
grotte qui était continuellement creusée par les habitants et s'était
agrandie au fil du temps. Les Turcs et Arabes en en faisaient grand
commerce et en emportaient en Afrique, en Syrie, et en Turquie. On en
envoyait dans tous les pays d'Europe, Russie, Portugal, Grèce (Lemnos),
Arménie, dans de petits paquets ou sachets avec le sceau de Bethléem
qu'on portait parfois sur la poitrine.... Sainte Véronique en aurait
emporté un morceau ce qui donnait son nom à Soulac - sous le lait -
c'est-à-dire la dernière goutte de lait de la Vierge, selon la
légende... On disait qu'elle avait contractée cette vertu, depuis que la
Sainte Vierge s'y étant un jour retirée, donna le sein au petit Jésus,
et laissa tomber quelques gouttes de son lait sur une anfractuosité de
cette roche : une source en aurait aussitôt jaillit, ou bien la grotte
serait devenue entièrement blanche. Cette terre blanche portait le nom
de Lait de la Vierge.
La terre sacrée de la Grotte du lait
La terre calcaire blanche de la Grotte du lait s'appelait Lait de la Vierge.
Les
reliques du saint lait étaient des morceaux de pierre de la grotte du
lait appelée par extrapolation « reliques du saint lait de la Vierge »
Ces
reliques étaient, pour les croyants, le signe visible de l'incarnation
du Verbe fait chair dans un petit enfant : Dieu venu sur la terre, but,
comme tous les nourrissons, le lait de sa Mère, Marie.
Les
chrétiens découvrirent cette Grotte lors des croisades pour la
délivrance des Lieux Saints, comme le montre le miracle du pèlerin et de
l'aubépine, lorsqu'il étaient fait prisonniers par les sarrasins, et
lors de l'acquisition de la Grotte par les franciscains, ou par les
voyages et pèlerinages en Terre sainte.
Ils
rapportèrent en Europe, ces sachets de poudre blanche vénérée sous le
nom de « lait de la Vierge », qui est le nom donné à Bethléem à cette
poudre quoiqu'on ne absolument soit pas certain qu'elle ait réellement
allaité l'enfant Jésus en cette grotte.
Selon
la légende la grotte du lait serait devenue blanche et cette craie
ressemblait mystérieusement à du lait coagulé : tous les témoignages
rapportent que ses propriétés de rendre de lait aux nourrices étaient
réelles, et ces vertus continuaient dans les paroisses et cathédrales où
ces reliques étaient rapportées : on en fit donc le commerce dans toute
l'Europe et en Afrique.
Il
était plus difficile de critiquer cette relique que les autres dans la
mesure où il s'agissait de véritables souvenirs de la Grotte du Lait.
On
raconte en effet que Saint Bernard reçu un trait du Lait de la Vierge :
trois gouttes de son lait l'aurait aidé à écrire la prière du Salve
Regina . Rien ne dit que ce fut dans la grotte du lait ; cette histoire
était cependant très populaire et souvent représentée.
Collégiale de Montevarchi, autel et relique du saint Lait
Procession religieuse autour d'une relique du Saint Lait
Ses vertus curatives
Relique de la terre de la Grotte du Lait
Article détaillé : Géophagie.
Repas dans une habitation modeste
Bethleem, en 1898
Calcaire blanc de la Grotte du lait à usage pharmaceutique
terra sigillata, reliques de la Grotte du lait
Au XIXe siècle encore, les franciscains distribuaient des tablettes faites de terre de la grotte, moulées dans des petits moules et transformées en terra sigillata, en forme de pastilles de Vichy, demandant aux pèlerins auxquels ils les donnaient de la mélanger à de l'eau et de la boire, homme et femme ensemble et de réciter durant neuf jours le troisième mystère joyeux du rosaire, la Nativité : ces tablettes avec pilules de sainte Colette guérissant la stérilité, faisaient partie de la « pharmacie franciscaine ». Et de nos jours encore cette tradition se perpétue, mais les femmes viennent surtout chercher un bon remède à la stérilité. De nombreuses photos de nourrissons, nés après la consommation de terre de la grotte par leurs parents, après le pèlerinage, ornent désormais ce lieu.
Les reliques de la grotte auraient également été bonnes pour l'ophtalmie.
Des reliques
Ces reliques étaient, pour les croyants, le signe visible de l'incarnation du Verbe fait chair dans un petit enfant : Dieu venu sur la terre, but, comme tous les nourrissons, le lait de sa Mère, Marie. Les chrétiens découvrirent cette Grotte et ses parois avec le calcaire lors des croisades pour la délivrance des Lieux Saints, comme le montre le « miracle du pèlerin et de l'aubépine », faits prisonniers par les sarrasins, lors de l'acquisition de la Grotte par les franciscains, ou par les voyages et pèlerinages en Terre sainte : Ils rapportèrent alors en Europe, ces sachets de poudre blanche
Andrea
Pisano : «La Vierge-Mère enfante le Fils saintement ; elle donne le
lait à celui qui nourrit le genre humain ; elle soutient sur ses genoux
celui qui soutient tout ; elle est vierge, et elle est mère ! Mais
qu'est-ce donc qu'elle n'est pas ? » (saint Ephrem).
« Les gens râclaient la poudre blanche de nitrate des parois et la latérite du sol. Ensuite ils égrugeaient cette dernière, la lavaient et l'exposaient au soleil jusqu'à ce qu'elles devienne blanche. Les croisés et les pèlerins la rapportaient tantôt en poudre dans des fioles, tantôt en tablettes en Europe. »
— Jure Mikuž
Innombrables les récits de visite de la Grotte du lait et des mystérieuses reliques qu'on en rapportait :
« Nous sommes allés à la Grotte du Lait, bien sûr, une caverne où Marie se cacha un certain temps avant la fuite en Égypte. Ses murs étaient noirs avant qu'elle y soit entrée, mais en allaitant l'Enfant, une goutte de son lait tomba sur le sol, et instantanément changea l'obscurité des parois en sa propre teinte neigeuse. Nous avons pris beaucoup de ces petits fragments de pierre avant de partir d'ici, car il est bien connu dans tout l'Orient qu' il suffit à une femme stérile de les toucher des ses lèvres et cette infirmité s'en ira. Nous avons pris beaucoup de spécimens en vue d' apporter du bonheur à bien de nos foyers. »
— Mark Twain, The Innocents Abroad; Or, The New Pilgrim's Progress
Son commerce
Les Turcs et Arabes en en faisaient grand commerce et en emportaient en Afrique, en Syrie, et en Turquie. On en envoyait dans tous les pays d'Europe, Russie, Portugal, Grèce (Lemnos), Arménie, dans de petits paquets ou sachets avec le sceau de Bethléem qu'on portait parfois sur la poitrine.Article détaillé : Grotte du lait.
Les reliquaires
On trouvait des reliques dans des coffres aux reliques, mélangées à d'autres reliques, du Christ, des saints, qui faisaient l'objet d'un inventaire détaillé les accompagnant, ou séparé : on trouve par exemple au XIe siècle trois inventaires de reliques. Elles étaient sinon, placées et mises en valeur dans des précieux reliquaires.
Jeanne
d'Evreux, épouse du roi Charles IV le Bel, avait en 1339 offert à l'
abbaye de Saint-Denis sa couronne, une châsse contenant un
échantillonnage des reliques de la Sainte Chapelle et une statuette
reliquaire de la Vierge à l'Enfant. La Vierge tient à la main une fleur
de lys d'orfèvrerie et de cristal dans laquelle étaient enfermées les
reliques : vêtements, cheveux et lait de la Vierge. (Musée du Louvre )
Croix-reliquaire
de l'église Saint-Hilaire d'Orval, comportant aux quatre extrémités,
des capsules de cristal, pour abriter la relique de la poudre dite « du
Lait de la Vierge » venue de la Grotte du lait, et au centre, une épine
de la sainte Couronne d'épines du Christ donnée par Saint Louis
- des reliquaires,
- des autels (Cîteaux, 1193),
- des statuettes de la Vierge,
- des croix-reliquaires, comme la Croix impériale d' Isaac II Ange empereur de Constantinople, au XIIe siècle, qu'il abandonna en prenant la fuite lors de la bataille contre Asen Ier, ou la Croix de l'église Saint-Hilaire d'Orval
- des colombes, des ostensoirs, qui constituaient de véritables œuvres d'art, trésors d'orfèvrerie, faits d'or, d'argent, de cristal, de pierres précieuses (améthyste, diamants), de perles fines, rappelant que Marie et Joseph et l'enfant Jésus, le « roi des juifs » qui venait de naître, avaient alors reçu les présents des rois mages. Reliquaires dont en France on ne retrouve plus que de rares vestiges, tel le reliquaire du Saint-Lait de Sainte-Radegonde-des-Pommiers, découvert dans la paroi de l'église paroissiale. En Belgique, la « croix reliquaire de Robermont », en argent repoussé et gravé, contenait six habitacles ovales, contenant des reliques dont celle du lait de la Vierge, et de sa chemise. En Espagne et en Italie, les reliquaires rivalisaient de splendeur. L'utilisation des pierres précieuses était courante au Moyen Âge et Hildegarde de Bingen leur attribuait de nombreuses vertus.
Emplacement des reliques du Saint Lait
On
trouvait des « reliques du Saint - Lait », rapportées de Terre sainte,
dans tout le monde chrétien : dans les cathédrales et les grandes
villes, Amiens, Aix-en-Provence, Fécamp, Lille, Laon, etc...,
Noyon, Orléans, Paris, Reims, Tournay, Toulon, Maastricht, dans des
abbayes, comme l'Abbaye Sainte-Croix de Poitiers de Poitiers, Avignon
chez les Célestins, dans des églises.
Un
sanctuaire très connu était la Collégiale San Lorenzo de
Montevarchi (it) en Italie. On trouvait aussi des fioles en Italie à
Rome dans plusieurs églises, à Saint-Nicolas in Carcere, à Sainte Marie
in Campitelli, Sainte Marie du Peuple, et Saint Alexis, à Padoue, à
Venise dans la Basilique Saint-Marc, pour les nourrices et à Gênes où
elle guérissait les maux de seins, et enfin à Saint Louis de Naples,
comme le sang de saint Janvier, il devenait liquide les jours de fêtes
de la sainte Vierge et mais il restait caillé le reste du temps. Enfin à
Guimaranès, au Portugal.
On
vénérait à Chartres une fiole du lait de la Vierge recueilli en Judée
pendant qu’elle allaitait l’Enfant-Jésus et un autre vase de lait encore
plus miraculeux ramassé sur les joues desaint Fulbert. A Reims c'était
un véritable Trésor, orné de pierres précieuses : Du « précieux laict do
la Sainte Vierge, enchâssé dans une Nostre-Dame d'argent. » On les
mettait souvent dans un reliquaire en cristal, vase, colombe et un
précieux parchemin sur lequel était écrit en latin : « LAC VIRGINIS
MARIAE » attestait parfois son authenticité. Elles étaient mélangées aux
innombrables reliques médiévales. Une relique en fut vendue à saint
Louis par la roi Baudoin de Jérusalem et placée en la Sainte-Chapelle. À
chaque fois il s'agissait probablement de la terre de cette Grotte du
Lait mais de pieux auteurs laissèrent entendre qu'il s'agissait du vrai
lait, d'origine miraculeuse.
Quelques villes :
- en Anjou Notre-Dame de Cunault
« L'étymologie de ce mot Cunault vient, à ce qu'on prétend, de Cuna, Cunarum, berceau, parce qu'on y révère la sainte Vierge dans ses couches ; aussi garde-t-on dans cette église une relique précieuse du lait de la Sainte Vierge, dans une petite fiole de cristal de roche ; les nourrices et les mères sèches, qui n'ont point de lait, et celles qui en ont de trop, viennent invoquer la sainte Vierge, pour le leur faire venir ou pour le faire régler ; elles en reçoivent des secours merveilleux. »
(Grandet, Notre-Dame angevine, début du XVIII° s.)
- Soulac
« La chapelle de Soulac, érigée par Saint-Martial à la Vierge Marie, reçut son nom de ce que le lait de la Mère de Dieu était la seule relique que Véronique y déposa... véritable. On tient par tradition et selon quelques auteurs, que Sainte-Véronique y estant décédée, y avoit laissé du lait de la Très-Sainte-Vierge, et qu'elle avoit coustume de dire que ce précieux trésor lui suffisent pour toute richesse. Sufficit mihi, disaitelle, Solum lac. »
- Chelles
- Dombasle
- Berre... -en-Provence
Témoignages historiques
Les
chrétiens s'en servirent au Moyen Âge pour se donner du courage au
combat : « Les infidèles, enorgueillis, s'assemblent au nombre de
quarante » mille, pour chasser les chrétiens de leur territoire, et
réunissent tous leurs bagages à Ascalon. Les chrétiens, n'espérant qu'en
Dieu, commandent, à l'exemple des Ninivites, un jeûne aux deux sexes.
Les enfants à la mamelle sont privés du sein de leurs » mères et les
troupeaux même de leur pâturage. On arrête le jour du combat. Les
chrétiens s'avancent au nombre de trois » mille au plus, tant cavaliers
que piétons. Les princes marchent » à leur tête. Le patriarche portait
la croix du Christ pour étendard ; Ponce, qui avait été abbé de Cluny,
tenait la lance qui perça le flanc du Seigneur. L'évêque de Bethléem
avait en main un vase où était renfermé du lait de la Sainte-Vierge :
Episcopus Bethleemi in pixide « lac Sanctœ Mariœ Virginis ». Les croisés
durent rapporter en Occident, à Rome surtout, une relique si précieuse à
leurs yeux.»
Guibert
de Nogent, parlant du lait de la Vierge, conservé, de son temps, en
l'église de Laon, dans une colombe de cristal, ne croyait pas qu'il pût
être naturel et son argumentation ne manque point de vigueur il y fait
allusion dans un traité intitulé De Pignoribus sanctorum (1124) : « Quod
si objicitur beatam Virginem matrem » id potuisse servare et quasi
superstitiosa ipsius posterorum cutui voluisse traducere, ita
suspicietur, sicut Laudini apud nos lac ipsius benedictae, in columba
cristallina hue usque retineri dicitur. Quando quantum a vero et etiam a
verisimili exorbitet, facili argumento liquet : quia neque ipsa
asservavit ; praesertim cui nunquam in Jesu infantia tanlum otii,
tantumque securitatis exstilit, ut sui memoriam tanti penderet, quatenus
de sui in futura secula lactis produclione curaret, cui vix intra
natale lateresolum, vix vivere tune liceret. »
Fulbert de Chartres fut guéri par le lait de la Très-Sainte Vierge, dont il s'était montré le fidèle disciple.
Guillaume de Malmesbury fait également allusion au Lait de la Vierge.
Reliquaire du Saint Lait, Massimiliano Soldani-Benzi
La Réforme
Lors
de la Réforme et de la critique du catholicisme, Calvin se moqua de
cette coutume de conserver une relique du lait de la Vierge, dans son
Traité des Reliques et la tourna en dérision. Le cas de Reims montre
qu'il s'agissait probablement de la poudre de la « Grotte du Lait » et
qu'on vénérait un souvenir de la Grotte et non du lait véritable : mais
il semble qu'on le faisait parfois passer cette craie pour le véritable
lait de la Vierge et pour un miracle, ce qui était peut-être du Lait de
Lune ! Dachery explique ainsi que nombre d'auteurs sérieux pensaient que
le Saint-Lait conservé jusqu'à nous, cette liqueur d'une blancheur
éclatante, avait été épanchée par la Très-Sainte Vierge, reine des
cieux, en faveur de ses plus fervents serviteurs » tel Saint Bernard, à
preuve les miracles que cette relique effectuait.
Erasme
dans ses Colloques conte l'histoire de Guillaume pèlerin à
Constantinople et grand amateur de reliques qui crut soudain être « plus
riche de Crésus » lorsqu'on lui confia ce précieux trésor.
Autour d'une relique du Lait de la Vierge
Emplacement des reliques du Lait
Une évocation des « reliques du lait » est faite par Nicéphore Calliste : l'impératrice Pulchérie au Ve siècle
en aurait obtenu pour le Monastère des Hodèges de Constantinople, avec
le fuseau de la Vierge et les langes de l'Enfant Jésus.
On retrouve ensuite au Moyen Âge ces reliques du lait de la Vierge dans (au moins) soixante-neuf sanctuaires européens.
Mais
nos reliquaires d'aujourd'hui ne sont pas représentatifs de la
réalité : il y avait sans doute d'innombrables petits pains de terre de
la grotte du lait dans toute l'Europe, -autant que de pèlerins-, comme
les petites bouteilles d'eau de (la grotte de) Lourdes de nos jours.
En Allemagne
- Cologne, couvent des frères prêcheurs.
En Angleterre
- La plus ancienne liste de reliques faisant allusion au lait de la Vierge Marie, la « liste de Bath», conservée à Cambridge (Corpus Christi manuscript) , date de la seconde moitié XIe siècle.
- Glastonbury.
- Walsingham : première mention est faite sous Édouard Ier de la relique du lait de Marie ( « lac beate Mariae »), incluse dans le grand autel.
- Westminster.
En Italie
Reliquaire, Musée de la Collégiale San Lorenzo de Montevarchi
On
trouvait aussi des fioles en Italie à Rome dans plusieurs églises, au
couvent de Saint-Damien des religieuses clarisses à Assise, à
Saint-Nicolas in Carcere, à Sainte Marie in Campitelli, Sainte Marie du
Peuple, Saint-Clément-du-Latran, saints Côme et Damien, Saint-Alexis et
Saint Chrysogone ; à Padoue, à Venise dans la Basilique Saint-Marc, pour
les nourrices et à Gênes où elle guérissait les maux de seins, à Sainte
Patricia et Saint-Louis des Minimes de Naples (comme le sang de saint
Janvier, il devenait liquide les jours de fêtes de la sainte Vierge et
mais il restait caillé le reste du temps) et plusieurs autres églises de
cette ville, enfin en Sicile à Agira, amenée de Palestine par les
moines du couvent saint Philippe au XIIe siècle.
La collégiale San Lorenzo de Montevarchi
Autour d'une relique du Lait de la Vierge
Un sanctuaire très connu du Saint Lait (it) était la Collégiale San Lorenzo de Montevarchi (it) en Italie province de Arezzo dans la région Toscane, avec une fraternité du Saint Lait (it) érigée au XIIIe
s. suite au don de la relique par Charles frère de saint Louis, et
encore aujourd'hui, une procession est organisée le 8 septembre. On peut
aussi visiter le Musée de la Collégiale. (article détaillé : Sacro Latte : Saint Lait de Montevarchi (it))
Support du reliquaire du saint Lait,
manufacture toscaneXVIIIe siècle
Collégiale de Montevarchi, autel et relique du saint Lait
Procession religieuse autour d'une relique du Saint Lait
don
d'une relique du lait par le comte Guido Guerra VI prieur de l'église
Saint Laurent de Montevarchi. (Montevarchi, Collegiata di San Lorenzo
Museum)
Andrea della Robbia, petit temple pour les reliques du saint lait, XVe siècle.
Les chapelles du saint lait formaient une extension "hors les murs" du
territoire sacré de la grotte du lait en Terre Sainte, dans toute
l'Europe : on ramenait la relique, mais aussi, la présence du sacré.
Espagne
Musée de la cathédrale de Murcie, « Vierge du lait », retable de Modène
L'Arca Santa d'Oviedo, contenant une des plus anciennes reliques du Lait
Selon
le témoignage de Mariano de Sicile on trouvait ces reliques à Oviedo et
Tolède mais aussi à Murcie, dans la cathédrale: la relique est
conservée dans une fiole de verre ornée d'une étoile d'or, et protégée
dans un ostensoir en argent et diamants. Le lait reste coagulé toute
l'année, jusqu'à ce que le miracle de la liquéfaction se produise,
devenant liquide tous les 15 août, durant la fête de l'Assomption. Le
musée de la Cathédrale de Palma de Majorque contient un magnifique
reliquaire, ampoule de cristal enchassée dans de l'or, avec deux anges.
À
Oviedo, on sait que dans son récit de l'ouverture solennelle du coffre
aux reliques, l' Arca Santa, qui eut lieu le 13 mars 1075, l'évêque
d'Oviedo Pelayo mentionna avec la chasuble d' Ildefonse de Tolède et les
autres reliques dont une très ancienne inscription faisait
l'inventaire, le lait de la Vierge : « De lacte sancte Marie, de Cruce Domini, de Corona spinea, de lapide Sepulcri ... ».
El Greco, La Sainte Famille
La légende voulait qu'elle date d'un temps très ancien, rapportée de Terre-Sainte aux premiers siècles.
À
Tolède, les reliques furent également envoyées par le roi Louis IX
comme on peut le lire dans cette Lettre au Clergé de Tolède :
«
Louis par la grâce du Roi de France à nos chers amis en Jésus Christ
les chanoines et tout le clergé de l' Église de Tolède, salut et
dilection. Ayant le dessein d enrichir votre Église d'un excellent
Trésor, en considération de notre très cher ami et vénérable D. Jean
Archevêque de Tolède qui nous en a fait de très humbles et de très
instantes prières, nous vous envoyons avec plaisir quelques parties
considérables des saintes reliques que nous avons eues du Trésor de l
'Empire de Constantinople, tirées de nos sacrés et précieux Sanctuaire;
ces reliques sont une partie du bois de la Croix de Notre Seigneur, une
épine de sa sainte couronne, un peu de Lait de la sainte Vierge, des
morceaux de la robe de pourpre dont le Seigneur fut couvert, du linge
dont il se ceignit lorsqu' il lava les pieds de ses Apôtres, du Suaire
avec lequel il fut enseveli, et mis dans le Sépulcre, et des langes de
son Enfance. Nous prions donc votre charité, et nous vous demandons au
nom de Notre Seigneur, que vous receviez et gardiez avec le respect qui
est dû ces susdites saintes reliques, nous vous conjurons encore de
vouloir bien vous souvenir de nous dans vos messes et dans vos prières.
Donné à Étampes au mois de mai de l' année mil deux cent quarante huit.
»
Portugal
Autrefois précieusement conservées à : Alcacer do Sal, Aviz, Belver, Coimbra, Constantim, Guimarães, Lisbonne.
En Belgique
Colombe d'or, reliquaire du saint-Lait, « Trésor d'Hugo d'Oignies », TreM.a (Musée provincial des Arts anciens du Namurois -Trésor d'Oignies)
« Placard de Tongres », inventaire des reliques du trésor de Tongres Sur le coin gauche inférieur (cliquer pour agrandir), une statuette de la Vierge dont l'inscription mentionne qu'elle contient une relique du lait de la Vierge
- Bruges, Eglise Notre-Dame de la Poterie (nl) Légende du reliquaire volé.
- Trésor du Prieuré d'Oignies, colombe d'Or d' Hugo d'Oignies.
- Grammont.
- Louvain.
- Maastricht
- Tongres.
En France
On
trouvait des reliques du précieux lait de la Vierge rapportées de
Terre sainte, dans tout le monde chrétien, renfermées dans de précieux
reliquaires, conservées dans les trésors, parfois une colombe d'or ou
d'argent : dans les cathédrales et les grandes villes, Amiens, Arras,
Aix-en-Provence, Besançon, Châlons, Chelles, Compiègne, Coutances,
Dombasle, Douai, Entremont, Fécamp, Lille, Laon, Le Puy, Loudun, Nantes,
Noyon, Orcival, Orléans, Paris, Pouilly-en-Auxois, Reims, Remiremont,
Rodez, Rocamadour, Saint-Omer, Sainte-Radegonde-de-Pommiers, Semur en
Bourgogne, Sisco, Soissons, Tournay, Toulon, Verdun, Viviers : on en
trouvait aussi dans les abbayes, comme l'Abbaye Sainte-Croix de
Poitiers, Avignon chez les Célestins, à Troyes au couvent des Jacobins,
conservée dans un cristal tenu par l'Enfant Jésus de la statue de N.D.
du Rosaire, aux monastères de Cîteaux, chez les carmes de la Place
Maubert à Paris, et bien en d'autres endroits encore.
Paris, Sainte-Chapelle, chapelle basse, abside, côté nord
- Paris : dans la Sainte Chapelle se trouvait une relique du saint Lait, vendue avec la Couronne d'épines et un certains nombre d'autres reliques supposées par Baudouin II de Courtenay empereur de Constantinople, à Louis IX, dont un morceau fut donné comme un en cadeau, par Charles frère de saint Louis, et amenée en Italie où elle fut accueillie en grande pompe, dans la collégiale de San Lorenzo de Montevarchi.
- Chartres : On vénérait à Chartres une fiole du lait de la Vierge recueilli en Judée pendant qu’elle allaitait l’Enfant Jésus et un autre vase de lait encore plus miraculeux ramassé sur les joues de saint Fulbert.
- en Anjou : l'église prieurale Notre-Dame de Cunault :
Cette église conserve une fiole de poussière de la grotte de la Nativité qui aurait contenu du lait de la Vierge Marie
« L'étymologie de ce mot cunault vient, à ce qu'on prétend, de cuna, cunarum,
« berceau », parce qu'on y révère la sainte Vierge dans ses couches ;
aussi garde-t-on dans cette église une relique précieuse du lait de la
Sainte Vierge, dans une petite fiole de cristal de roche ; les nourrices
et les mères sèches, qui n'ont point de lait, et celles qui en ont de
trop, viennent invoquer la sainte Vierge, pour le leur faire venir ou
pour le faire régler ; elles en reçoivent des secours merveilleux. »
Comme à Bethleem, y viennent en pèlerinages les femmes et les nourrices n’ayant pas assez de lait, ou trop de lait.
- Soulac possède la châsse de Sainte Véronique, qui serait morte à Soulac vers l'an 70, et quelques gouttes du lait de la Vierge rapportées de Terre Sainte. Une des significations du nom de la ville de Soulac est « le lait de la Vierge » (Solum lac en latin).
« La chapelle de Soulac, érigée par Saint-Martial à la Vierge Marie, reçut son nom de ce que le lait de la Mère de Dieu était la seule relique que Véronique y déposa... véritable. On tient par tradition et selon quelques auteurs, que Sainte Véronique y estant décédée, y avoit laissé du lait de la Très-Sainte-Vierge, et qu'elle avoit coustume de dire que ce précieux trésor lui suffisent pour toute richesse. Sufficit mihi, disaitelle, Solum lac. »
Article détaillé : Basilique Notre-Dame-de-la-fin-des-Terres.
Chapelle du Saint-Lait de Reims
La Chapelle du saint Lait, autrefois dans la cathédrale de Reims
On
trouvait jadis dans la Cathédrale Notre-Dame de Reims un autel dit du
Saint-Lait : la richesse de l'ornementation de l'autel et de la statue
évoquait très mal la pauvreté de la naissance de Jésus mais autrefois en
France et en Europe les pierreries décoraient les reliquaires et les
évangéliaires.
«
Cette chapelle Saint-Lait, détruite encore par le Chapitre dans le
siècle dernier ... devait son nom à une relique envoyée, suivant les uns
en1155, par le pape Adrien IV, suivant d'autres en1276, par le pape
Adrien V ; c'était une pâte blanche qui passait pour contenir du lait de
la Vierge. Elle était renfermée dans une statuette de la Vierge, faite
en or en 1278, aux frais de Blanche, comtesse de Champagne. Elle coûta
cinq marcs d'or ; la sainte figure portait une couronne enrichie de
diamants et de perles. On la déposait dans un élégant coffre d'argent
ciselé et doré, et chaque soir on la mettait à l'abri en la reportant
dans le trésor. Avant la messe du matin on lui rendait sa place. L'autel
du Saint-Lait était en outre décoré d'un tabernacle de cuivre sur
lequel reposait une Vierge d'argent ; derrière était une niche aussi en
cuivre dont le fond s'ouvrait et renfermait différentes reliques. »
« Cette
relique était un paquet renfermant une poudre blanche et fine et le
papier qui l'accompagnait étaient écrits ces mots en caractères
anciens : Reliques du Saint-Laict de la Très-Sainte Vierge ». D'autres
reliques l'accompagnant comme la « Ceinture de la Vierge » pourrait
indiquer comme dans l'histoire de Guillaume rapportée par Erasme un lien
avec Constantinople.
Cathédrale de Reims
Auprès
du dict tabernacle, est conservée une grande image (3) de la Vierge,
qui se met les iours solemnels sur le grand-autel, ct qui est portée en
processions generales, laquelle est d'argent doré, comme aussy la
couronne garnie de pierres et perles, a laquelle y a deux saphyrs, et le
reste sont des grenats; il y manque cinq perles et quatre pierres au
pied; elle tient le petit Jésus dans son bras gauche, qui est d'argent
doré, lequel tient une boulle d'argent doré, au-dessus de laquelle est
une croix de Lorraine ; de même la dicte image tient un reliquaire Quand
nous parlerons du trésor de l'église St-Nicaise, nous dirons un mot des
difficultés longues et fréquentes qui s'élevèrent au sujet de la
possession des reliques du saint entre les moines de cette abbaye et le
Chapitre de Notre-Dame. On a remarqué cette croix de Lorraine au-dessus
du globe terrestre. Ce fait a de l'importance : il ne s'agit pas ici
d'un détail purement artistique. Au xvic siècle, époque de la confection
du reliquaire, la maison de Lorraine faisait publier qu'elle était
issue de Charles-de-Lorraine, le dernier descendant de Charlemagne. Sans
doute MM. de Guise et de Mayenne étaient de bons catholiques, mais ils
étaient aussi de grands ambitieux. sur sa main droite, dans lequel est
du laict de la Vierge ; elle est posée sur un pied de cuivre doré;
l'image avec le petit Jésus, le reliquaire et la couronne avec un
priant, le tout d'argent doré, pèsent vingt-deux marcs, et le pied de
cuivre doré pèse trente marcs. Elle a esté donnée par Guillaume de
Esternay, chanoine de Reims, comme il se voit par un écriteau qui est
sur une lame d'argent émaillée, attachée au pied de la dicte image,
portant ces mots : GuiUetmnes de Estanaye, canonicus Remensis quondàm
prœpositus Laudunensis, dedit istam imaginent ecclesiœ Jiemensi. Orate
pro eo. Au-devant de la dicte Vierge est une croix d'or remplie de
plusieurs diaments faux, donnée par M. Bailly, chanoine, en l'année
1617. Et le jaseret, ou chesne d'argent doré, pour la suspendre, a esté
faict aux despens de la fabrique.Monsieur Nicolas Colbert, chantre et
chanoine de la dicte église et abbé de Saint Sauveur, a donné une rose
de diaments, qui est attachée au devant de la dicte image ; elle est
d'or, enrichie d'un gros saphyr par le milieu, d'un gros diament et de
plusieurs autres saphyrs, rubis et diaments. Au tabernacle, proche des
dessus dicts, se met l'image du saint Laict après que la grande messe
est dicte, laquelle, depuis la messe du iour iusqu'à la dicte heure,
'est dans la chapelle du saint Laict (2), à la garde du clerc d'icelle.
En l'année 1278, Blanche comtesse de Champagne et de Troyes, donna cinq
marcs d'or pour faire la dicte image de Nostre-Dame, dans laquelle est
enchâssé le saint Laict de la Vierge, envoyé à l'église de Reims par le
pape Adrien cinquième, éleu pape en 1276, iadis cardinal Ottobon, nepveu
d'Innocent A"", dernier chancelier de l'église de Reims, puis
archidiacre et chanoine d'icelle. La dicte image est d'or, comme aussy
la couronne, enrichie de plusieurs petits diaments et perles; le pied
est d'argent doré, et le tout pèse huit marcs; elle se met dans une
custode couverte d'argent doré. Dans la dicte image, outre le saint
Laict, il y a aussy de la robe de la sainte Vierge, du suaire et sandale
de Nostre - Seigneur ; ladite image faicte de neuf et les dictes
reliques remises dans icelle, le 10 février 1653, par ordre du Chapitre
La chapelle du saint Lait était une des merveilles de notre cathédrale ;
l'élégance de ses sculptures en avait fait un des chefs-d'œuvre de
l'art gothique. Elle était détruite bien avant la révolution. M. Louis
Paris en a retrouvé le dessin ; il doit en publier l'histoire et la
description
Témoignages historiques
Au Moyen Âge
- Les deux premiers exemplaires connus de ces reliques sont celui d’Oviedo, où elles ont a été apportées au VIIe siècle ; une seconde relique apportée par Charlemagne au début du IXe siècle, fut donné à une église de Picardie.
- En 1123, pendant le siège d’Ascalon, l’évêque Ascétin de Bethléem se rendit au camp de Baudouin II avec une relique de cette grotte.
- Guibert de Nogent, parlant du lait de la Vierge, conservé, de son temps, en l'église de Laon, dans une colombe de cristal, ne croyait pas qu'il pût être naturel et son argumentation ne manque point de vigueur il y fait allusion dans un traité intitulé De Pignoribus sanctorum (1124) (On a retrouvé dans la cathédrale, un coffre à reliques avec une fiole, mais on ignore si elle contenait ce fameux lait de la Vierge rendu célèbre par Guibert de Nogent.)
- Fulbert de Chartres fut guéri par le lait de la Très-Sainte Vierge, dont il s'était montré le fidèle disciple. Cependant cette célèbre légende n’a rien à voir avec les reliques de la Grotte du lait, tout comme la lactatio de Saint Bernard. Au Moyen-Age, le lait de la Vierge était mentionné, durant l'élévation de la messe chaque jour.
- Guillaume de Malmesbury fait également allusion au Lait de la Vierge.
Reliquaire du Saint Lait, Massimiliano Soldani-Benzi
- Les chrétiens s'en servirent au Moyen Âge pour se donner du courage au combat :
- Cette croyance populaire de la guérison des femmes n'ayant pas de lait est mentionnée la première fois par Perdicas d’Ephèse en 1250 et c'est à partir de ce moment là que les reliques du saint-lait de la Vierge connurent une très grande diffusion.
« Le pèlerin, l'aubépine, et le lait de Notre-Dame »
Evron, Abbaye Notre-Dame d'Évron
Fleur d'aubépine
« Un pèlerin, allant visiter les saints lieux de la Judée, où le mystère de notre rédemption a été consommé, fut, en l'an 614, fait captif par un sarrasin, lequel, après 14 ou 15 ans de service, lui rendit la liberté, et, pour récompense, lui donna, quoique avec regret, une fiole de cristal, dans laquelle il assure qu'il y avait du lait de la Vierge, mère de son Dieu. Ce pèlerin, extrêmement joyeux d'un si rare présent, repassa la mer, et traversant la France, fatigué du chemin, s'endormit sur le bord d'une fontaine dans la forêt d'Évron, ayant pendu son sac dans lequel était la fiole à la branche d'une aubépine. À son réveil, il fut surpris de voir ce petit arbre grossi et haussé: il appelle un bûcheron pour l'abattre, mais inutilement, la cognée semblait retourner vers lui. Étant dans ce triste état, il apprit que le pieux Hadouin, 12e évêque du Mans, faisait la visite de son diocèse ; il va le trouver et lui conte son aventure. Ce prélat s'étant transporté sur le lieu et ayant dévotement imploré le secours du ciel, l'aubépine où était suspendu ce lait virginal reprit miraculeusement sa première forme, si bien qu'il reçut, avec vénération, cette fiole sacrée. L'évêque, par révélation divine, fit bâtir une église au même endroit, la dota de bons revenus, la dédia à la Vierge Marie, sub patronata bratae dei partane anno DCXXX et l'ayant érigée abbaye, Hadouin y établit des moines de l'ordre de St Benoît, pour vaquer à l'oraison et à la célébration du service divin. Cette église d'Évron fut ensuite visitée par un peuple nombreux, à cause des grands miracles que la main de Dieu y opérait en faveur de sa sainte mère. Ce sacré lait y a toujours été depuis révéré, par les merveilles spéciales que les femmes nourrices reçoivent en invoquant le nom et le secours de cette mère de Miséricorde. »
- À Évron on chantait :
« Lac gloriosœ Virginis, | « Honneur au lait de la glorieuse Vierge, à ce lait saint et d'une douceur immense. |
et à Paris en antienne des vêpres (Missel manuscrit de l'église Saint-Gervais)
|
En savoir plus :
Reliques de la Sainte Vierge à Lille
La Bonne-Fierté, renfermant le Saint Lait et les cheveux de la Sainte Vierge
Le
Seigneur, qui a préservé l'âme de Marie de la tache du péché originel,
n'a pas voulu que sa chair subît les suites ordinaires de la mort, de la
mort, salaire du péché, et il a soustrait à la corruption du tombeau ce
corps virginal où le Sauveur daigna prendre naissance Semblable au
sépulcre du Fils de l'Homme, la tombe où Marie reposa trois jours n'aura
rien à rendre au grand jour de la résurrection ; son corps glorifié
habite les célestes demeures, avant que la trompette de l'ange ait sonné
pour réveiller la cendre des morts au fond des tombeaux. La terre n'a
donc rien gardé de cette nouvelle Eve, par qui le salut et la vie sont
venus aux hommes ?....
De
pieuses croyances nous assurent le contraire, et l'on vénère en divers
lieux, des reliques de la Sainte Vierge, auxquelles les âges de foi et
d'amour ont attaché le plus grand prix.
Lille s'honorait de posséder quelques-uns de ces sacrés vestiges, et le plus bel ornement de sa procession célèbre c'était la châsse qui renfermait des cheveux et du lait attribués à la Sainte Vierge.
Ces
mots exciteront peut-être les réclamations de nos lecteurs, car nous
n'avons plus la foi naïve de nos pères, et l'impitoyable main de la
critique a desséché les sources où jadis se régénérait la piété du
peuple ; elle a dépouillé la religion de ses légendes, comme elle a
dépouillé l'histoire de ses récits colorés, traditions dramatiques.
Peut-être a-t-elle pu réfuter quelques erreurs, abolir quelques
pratiques superstitieuses, mais ne s'est-il pas englouti dans ce commun
naufrage des faits dignes d'intérêt, des coutumes respectables, et
méritant, tout au moins, d'exciter les curieuses recherches de
l'écrivain catholique ? Nous ne pouvons, à moins de décerner à tous nos
ancêtres un brevet de sottise et de niaise crédulité, condamner sans
examen préalable ce qu'ils ont vénéré, brûler ce qu'ils ont adoré,
fouler aux pieds ce qu'ils ont religieusement placé sur les autels.
Examinons donc quelles étaient, en particulier, ces reliques qui ont
obtenu, à Lille, durant six siècles, un culte si persévérant de
confiance et d'amour.
Constatons
d'abord que la châsse, qui faisait le principal ornement de la
procession, était unanimement reconnue pour renfermer du Lait et des
Cheveux attribués à la Sainte Vierge Marie. Voici ce que dit à cet égard
Turbelin, prêtre de la Collégiale de Saint-Pierre, et notaire
apostolique :
«
La principale Fierté ou chasse portée en cette procession est celle de
Notre-Dame, d'argent très richement doré et embellie de plusieurs
pierreries et joyaux précieux, environnée de plusieurs nuages, aussi
d'argent doré, avec une couverture pareille, faite d'artifice admirable,
tenue en grand honneur et pieuse révérence de tout le peuple, pour le
sacré lait de Notre-Dame, qu'elle contient en soi, si connue aussi par
les cheveux de la dite Vierge, et elle est portée dessous de quelque
pavillons, après le clergé, éclairée de plusieurs torches et flambeaux.
Une
oraison spéciale fut composée pour honorer ces reliques, elle a été
publiée plusieurs fois avec la permission de l'ordinaire.
L'Hermite dit, en son "Histoire des Saints de Lille et d'Orchies" :
« A cette église (de Saint-Pierre), sont donnés les gages de la protection de Marie, à savoir : Son lait virginal que sans doute la Mère de Dieu a distillé de son sein à quelqu'un de ses favoris, et ses cheveux d'une longueur remarquable, deux présents d'une valeur inestimable, faits à Lille par l'Empereur de Constantinople, père, oncle ou la mère de la comtesse Marguerite. Ce « lait , qui a été le nectar de Dieu même, est gardé dans une petite colombe d'argent doré, qu'un ange de même étoffe, artistement paré, tient en son sein, et la contemplant tendrement, montre à l'œil la relique divine et les cheveux précieux, tournes dans un cercle d'or. Le tout est enfermé dans une grande châsse de ce riche métal, miraculeusement travaillée par l'antiquité, avec ses statues aux environs, et repose en un lieu haut , élevé derrière le grand autel.
L'Hermite dit, en son "Histoire des Saints de Lille et d'Orchies" :
« A cette église (de Saint-Pierre), sont donnés les gages de la protection de Marie, à savoir : Son lait virginal que sans doute la Mère de Dieu a distillé de son sein à quelqu'un de ses favoris, et ses cheveux d'une longueur remarquable, deux présents d'une valeur inestimable, faits à Lille par l'Empereur de Constantinople, père, oncle ou la mère de la comtesse Marguerite. Ce « lait , qui a été le nectar de Dieu même, est gardé dans une petite colombe d'argent doré, qu'un ange de même étoffe, artistement paré, tient en son sein, et la contemplant tendrement, montre à l'œil la relique divine et les cheveux précieux, tournes dans un cercle d'or. Le tout est enfermé dans une grande châsse de ce riche métal, miraculeusement travaillée par l'antiquité, avec ses statues aux environs, et repose en un lieu haut , élevé derrière le grand autel.
Enfin, le judicieux et savant historien de la Flandre catholique, Buzelin, s'exprime en ces termes :
«
L'église de St-Pierre possède deux reliques précieuses de la Vierge
Marie : quelques-uns de ses cheveux et un peu de son lait obtenu par
miracle. Le Saint Lait se conserve dans un reliquaire d'un fort
beau travail, représentant un ange qui tient dans son sein une petite
colombe. Les cheveux sont renfermés dans un globe de cristal. Ces
précieux objets sont contenus dans une châsse fort élégante, en vermeil,
et dont le travail atteste une haute antiquité. C'est là la Fierté
principale portée en la procession instituée par Marguerite de Flandre.
»
On
voit, par ce qui précède, quelle origine on attribuait ordinairement à
ces reliques. On croyait les devoir à la main généreuse de Marie de
Champagne, qui avait suivi son époux, Bauduin IX, à la croisade, et qui
succomba, à Saint-Jean-d'Acre, par suite des fatigues d'un pénible
voyage et de l'émotion qu'elle ressentit en apprenant que son mari
venait de recevoir la couronne impériale sous les voûtes de
Sainte-Sophie de Constantinople.
C'est
aux croisades, en effet, que l'Europe doit la plus grande partie des
précieux trésors qu'elle vénère sur les autels. Les reliques des saints
et des martyrs, et surtout celles de la vraie Croix, formaient le prix
que mettaient à leurs services les princes et les barons qui
combattaient pour la délivrance du Saint-Sépulcre. Suénon, prince de
Suède, vint, durant la seconde croisade, rejoindre l'armée avec une
troupe valeureuse et disciplinée ; il ne voulut ni terres, ni baronnies,
mais il demanda un morceau du bois de la Sainte Croix. Thierry
d'Alsace, comte de Flandre, consentit à laisser aux saints lieux sa
femme Sybille, qui désirait se vouer au service des lépreux et des
pèlerins : mais il exigea en échange de la compagne de sa vie une fiole
de cristal, conservée de temps immémorial à Jérusalem, renfermant
quelques gouttes du sang de Jésus-Christ, recueillies par le pieux
Joseph d'Arimathie. Cette insigne relique fût confiée par Thierry à la
chapelle de Saint-Basile, à Bruges, où on la vénère encore de nos jours.
Quand Byzance, prise pour la seconde fois, livra aux croisés ses
trésors, ses manuscrits, ses tableaux, ses statues, les soldats de la
Croix ne demandaient qu'une chose : des reliques, des restes précieux de
leurs pères dans la foi, qui rapportés aux églises et aux monastères de
l'Occident pussent augmenter la piété des femmes, des vieillards
empêchés de concourir à la guerre sainte. Les Vénitiens prirent, pour
leur part de butin, le corps de l'Evangéliste Saint Marc, dont le nom
fut si longtemps leur cri de guerre, dont l'image était portée sur les
mers à la poupe de leurs vaisseaux. Saint Louis acheta, à haut prix, aux
mêmes Vénitiens, la couronne d'épines, que l'empereur de Byzance leur
avait engagée ; le saint Roi alla la recevoir pieds nus, la montra au
peuple avec allégresse, et fit bâtir pour l'y déposer, cette
Sainte-Chapelle, qui est encore l'un des chefs-d'œuvre légués par le
moyen-âge aux temps modernes. Le même Roi adressait aux chanoines de
Tolède la lettre suivante :
«
Louis, par la grâce de Dieu, roi des Français, à nos bien-aimés, les
chanoines et tout le clergé de Tolède, salut et dilection.
Voulant
honorer et enrichir votre église par de précieuses étrennes, à la
prière et par les mains de notre cher et vénérable Jean, archevêque de
Tolède, nous vous faisons part des choses les plus saintes que nous
ayons dans notre trésor, et que nous avons reçues de celui de l'empire
de Constantinople, savoir : Du bois de la croix de notre Seigneur, une
des épines de sa couronne, du lait de la glorieuse Vierge Marie, sa
Mère, d'un morceau de sa robe de pourpre et des petits drapeaux (langes)
de son enfance.
On attribuait à Marie de Champagne la même généreuse piété, et on voyait dans les reliques de la sainte Vierge un souvenir des vertus de cette princesse, de ses lointains pèlerinages, et du tendre souvenir qu'elle avait conservé à la patrie de son époux.
D'autres églises, au reste, vénéraient également des reliques du Saint Lait. Venise, Soissons, Verdun, Chartres, s'enorgueillissaient de ce précieux vestige. Voici comment, dans la dernière de ces villes, la chronique rapporte l'ori gine de cette relique. Fulbert, évêque de Chartres, était un fervent serviteur de Marie. Il fit, le premier, célébrer en France la fête de la Nativité de la Sainte-Vierge, et recueillant d'abondantes aumônes, il commença, en 1020, la magnifique cathédrale qui subsiste aujourd'hui, et qui est dédiée, on le sait, sous le vocable de Notre-Dame. Il tomba gravement malade ; Marie alors daigna visiter et consoler son serviteur fidèle, et le guérit miraculeusement, en répandant sur son visage trois gouttes du lait bienheureux dont Jésus fut nourri. Ce lait, recueilli par Fulbert, fut conservé au trésor de l'église de Chartres jusqu'à la révolution.
On attribuait à Marie de Champagne la même généreuse piété, et on voyait dans les reliques de la sainte Vierge un souvenir des vertus de cette princesse, de ses lointains pèlerinages, et du tendre souvenir qu'elle avait conservé à la patrie de son époux.
D'autres églises, au reste, vénéraient également des reliques du Saint Lait. Venise, Soissons, Verdun, Chartres, s'enorgueillissaient de ce précieux vestige. Voici comment, dans la dernière de ces villes, la chronique rapporte l'ori gine de cette relique. Fulbert, évêque de Chartres, était un fervent serviteur de Marie. Il fit, le premier, célébrer en France la fête de la Nativité de la Sainte-Vierge, et recueillant d'abondantes aumônes, il commença, en 1020, la magnifique cathédrale qui subsiste aujourd'hui, et qui est dédiée, on le sait, sous le vocable de Notre-Dame. Il tomba gravement malade ; Marie alors daigna visiter et consoler son serviteur fidèle, et le guérit miraculeusement, en répandant sur son visage trois gouttes du lait bienheureux dont Jésus fut nourri. Ce lait, recueilli par Fulbert, fut conservé au trésor de l'église de Chartres jusqu'à la révolution.
A
Reims, l'on vénérait également une relique du Saint Lait, envoyée par
le Pape Adrien V, au chapitre de cette ville. Elle était placée dans une
chapelle magnifique où se réunissait une foule immense de pèlerins.
(Histoire de la métropole de Reims, par Don Marlot. P. 275. V. 2.)
Le
bréviaire des Capucins renfermait un office pour la Fête du Saint Lait
de la bienheureuse Vierge Marie, donné par elle à Saint Bernard.
D'autres
églises faisaient la fête des cheveux de la très sainte Vierge,
notamment celle de Bruges, le 21 mars, celle d'Oviédo, le 2 mai, celle
de Saint-Omer, le 23 mai.
Les reliques vénérées de la collégiale de Saint-Pierre ont disparu dans la tourmente révolutionnaire.
Toutes ont été dispersées, sauf le bois de la Vraie Croix, dont
l'église de Saint-Étienne est enrichie aujourd'hui. Mais la douce
Providence qui préside aux innocentes joies des serviteurs de Dieu, a
permis qu'une de ces reliques perdues pour la ville de Lille fût
remplacée et offrît un nouvel aliment aux affectueux sentiments des
enfants de Marie. Voici, en peu de mots, l'origine de la précieuse
relique des cheveux de la Sainte-Vierge, qui appartient aujourd'hui a
une communauté religieuse de notre ville.
Isabelle-Claire-Eugénie,
infante d'Espagne et femme de l'archiduc Albert, désirait ardemment un
fils qui pût succéder à son époux dans le gouvernement des provinces
belgiques, et voulant rendre le ciel même complice de ses vœux, elle
entreprit le pèlerinage de Bollezeele, village situé sur le territoire
de Cassel. La Vierge est honorée dans cette paroisse sous le titre de
Notre-Dame de la Visitation, et les pèlerinages remontent jusqu'au XIIIe
siècle. L'archiduchesse, après avoir pieusement invoqué Marie aux pieds
de son image, se retira en laissant à la chapelle de riches présents,
témoignages de sa visite et gages de sa confiance. Parmi ces présents se
trouvait un reliquaire contenant des cheveux de la Sainte-Vierge, donné
à l'infante en la sainte maison de Lorette. Cette relique insigne,
reconnue à différentes époques par l'autorité diocésaine, et
spécialement en 1693 par M. Delieres, vicaire-capitulaire de Saint-Omer,
a été reconnue de nouveau et authentiquée, le 20 décembre 1844, par
Mgr. Giraud, de vénérée mémoire.
Divers
événements où l'on voit se manifester la main fin Seigneur ont permis
qu'une partie de cette insigne relique fût donnée, au mois de septembre
de l'année 1849, par M. le curé de Bollezeele, à la communauté des
religieuses de Notre-Dame de la Treille ; cet institut, créé pour
honorer la Vierge de Lille, conserve maintenant ce précieux dépôt, et
les fidèles sont admis à certains jours de l'année dans la chapelle du
couvent, pour y rendre leurs hommages à la relique, qui rappelle tant de
pieux souvenirs et nourrit de si ferventes espérances.
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