Vénérable Yves Mahyeuc († 1541)

Vénérable Yves Mahyeuc († 1541)
évêque de Rennes

Vénérable Yves Mahyeuc, évêque de Rennes († 1541)


Yves Mahyeuc (en breton Eozen Maeeuc), né dans une famille de marchands à Kervoyec, paroisse de Plouvorndiocèse de Léon, fut évêque de Rennes.

 

Carrière ecclésiastique

Yves Mahyeuc embrassa la vie religieuse au couvent des frères prêcheurs de Morlaix avant que de rejoindre celui de Bonne Nouvelle à Rennes.
Tour à tour confesseur d'Anne de Bretagne, de Charles VIII puis de Louis XII, il fut nommé évêque de Rennes par le pape Jules II le 29 janvier 1507.
Il accompagna la duchesse Anne lors de son voyage en Bretagne en 1505 et fut l'auteur d'un Veni Creator latin-breton, chanté lors du passage au Folgoët, signé Yves Caervoyec.
En 1532 il accueilli le dauphin François de France à l'occasion de son entrée dans la ville de Rennes et le couronna duc de Bretagne en sa cathédrale sous le nom de François III.
À cette occasion on put admirer sur un « grand tableau attaché, escript en lettres d'or le vroy langaige de Troye ». Il s'agissait d'un poème en breton composé par l'évêque.
Yves Mahyeuc mourut en odeur de sainteté au manoir épiscopal de Saint-Armel de Bruz le 20 septembre 1541 et fut enseveli dans le transept méridional de sa cathédrale, près de l'autel Saint-Sébastien.

 

Armes

D'argent à trois hermines enlevées de sable, deux, une, au chef de gueules chargé de trois couronnes d'épines de sinople, le tout entouré d'une couronne d'épines de même.
Yves Mahyeuc naquit l'an 1462, dans le territoire de Plouvorn, paroisse du diocèse de Léon, à quatre lieues de Morlaix.
Ses parents, qui étaient de riches marchands, lui apprirent de bonne heure à craindre Dieu, et l'envoyèrent à Saint-Paul s'instruire des belles-lettres et de la philosophie.
Il évita soigneusement la compagnie des écoliers déréglés, et, assidu à la prière, il répandait fréquemment son cœur devant le Seigneur au pied des autels.
Les louanges de Dieu avaient plus de charmes pour lui que les jeux et les plaisirs qui touchent si vivement la jeunesse, et il mettait son plaisir à se rendre assidu au service divin, tantôt dans l'église cathédrale, et tantôt dans celle des religieux carmes.
Quand il eut achevé sa philosophie, il vint à Morlaix, et se chargea d'instruire les enfants d'un riche bourgeois de la ville.
Ce fut à cette époque que le vicaire général de la congrégation de Hollande, de l'ordre des Frères Prêcheurs, envoya seize religieux pour mettre la réforme dans le couvent du même ordre, à Morlaix.
Frère Guillaume Du Rest, prieur de Nantes, vicaire et commissaire du Père général Salvio Cassetta, était à leur tête, et prit possession du couvent le 27 août 1481 Les bons, exemples des nouveaux religieux firent une grande impression sur l'esprit des Bretons, et en portèrent plusieurs à embrasser avec ardeur un institut qui se faisait remarquer par une si grande régularité.
Yves Mahyeuc fut des premiers à suivre l'attrait de la grâce et à postuler l'habit de Saint-Dominique.
Il le reçut en 1483, et passa son noviciat dans la pratique de l'oraison, dans l'exercice de la pénitence, dans l'obéissance et la mortification, avec tant de ferveur et de persévérance, que les religieux, bien persuadés qu'il était trop bien appelé, et qu'il s'était rendu trop fidèle pour se démentir jamais, le reçurent avec joie à la profession, comme un sujet dont les rares vertus devaient donner un nouvel éclat à leur ordre.
Peu de temps après, il fut envoyé à Nantes pour y étudier la théologie, science à laquelle il s'appliqua pendant quatre ans, et eut pour maîtres les PP. Hervé Cam et Yves Scotus, religieux du couvent de Morlaix, docteurs en théologie et professeurs dans l'Université de Nantes.
Un président de la Chambre des Comptes", établie dans cette ville, prit un soin particulier de frère Yves, et l'entretint de livres et de toutes les autres choses nécessaires.
Après les études de théologie et des cas de conscience, les supérieurs destinèrent Yves Mahyeuc pour le couvent de Rennes, où il fut envoyé en 1489, et employé à entendre les confessions.
Ce fut dans l'exercice de cet emploi qu'il eut occasion d'être connu de la jeune duchesse de Bretagne, Anne, fille aînée du dernier duc François II.
Elle trouva dans cet excellent religieux tant de ressources pour la consolation de son esprit et le règlement de ses mœurs, que, non contente de lui donner toute son estime, elle voulut aussi lui procurer celle de Charles VIII, son époux, qui le choisit également pour confesseur, et lui donna la qualité d'aumônier de la reine, avec une pension considérable, dont le P. Yves ne disposait qu'avec la permission de son supérieur.
La reine lui confiait souvent de grandes sommes d'argent, et, pour les employer utilement, il s'informait avec soin des nécessités des pauvres, surtout de ceux qui avaient honte de faire connaître leur misère, et les soulageait libéralement.
Il ne craignait point de se rendre importun à la reine à ce sujet ; et cette pieuse princesse, de son côté, persuadée de la sainteté de son confesseur, secondait sans réserve son zèle affectueux et sa charité sans bornes.
En 1505 le pape Jules II, ayant créé cardinal Robert Guibé, évêque de Rennes, il le transféra en même temps à l'évêché de Nantes.
Le siège de Rennes demeura vacant par cette translation, et le chapitre élut le 5 mars messire Gui Le Léonnais, chanoine de Rennes et abbé de Beaulieu en Megrit, près de Dinan.
La reine et le roi Louis XII, son second mari, n'approuvèrent point cette élection, et l'élu s'en désista volontairement.
La reine nomma messire Pierre Le Baud, son aumônier et historiographe, doyen de Saint-Tugdual de Laval, et le présenta au chapitre de Rennes, qui l'élut, mais sans effet pour ce doyen, car il mourut avant d'avoir été sacré.
Enfin la reine présenta au chapitre de Rennes frères Yves Mahyeuc.
Aussitôt qu'il eut été informé des dispositions de la reine, il alla se jeter à ses pieds pour la supplier de faire cette faveur à quelque autre, et protester que, si elle persévérait dans sa résolution, il prendrait la fuite et se cacherait si bien qu'on ne le trouverait jamais.
La reine ne laissa pas de poursuivre son élection, qui fut faite unanimement, au grand contentement de toute la ville. 
 Yves, voyant que ses larmes et sa résistance étaient inutiles, et que tout le mal qu'il pouvait dire de lui-même n'empêchait pas qu'on ne le souhaitât ardemment pour pasteur, s'avisa enfin de dire qu'il ne pouvait acquiescer à son élection sans le consentement de ses supérieurs ; et afin que ce consentement lui fut refusé, il écrivit au P. Jean Clareo, vicaire général de l'ordre, confesseur du roi Louis XII, et depuis général, pour le supplier, avec toutes les instances imaginables, de ne pas permettre qu'il fût élevé à une dignité dont il tâcha de lui persuader que le poids surpassait infiniment ses forces.
Cette dernière ressource lui fut inutile ; le vicaire général, bien informé de sa piété et de ses talents, lui commanda, en vertu de l'obéissance qu'il lui devait, de se soumettre à son élection, et d'offrir à Dieu, pour la rémission de ses péchés, les peines et les travaux de l'épiscopat.
Ce fut au grand réfectoire du couvent de Bonne Nouvelle, à genoux, et dans une posture humiliée, qui marquait combien son âme était pénétrée de douleur, qu'il reçut des députés du chapitre ses bulles, datées du 29 janvier de l'an 1506 \ et l'obédience de son général, par les mains du prieur du même couvent.
Le nouveau prélat tint table ouverte le jour de son sacre, mais ce ne fut que pour les pauvres, qu'il servit lui-même, après leur avoir donné à laver, et, en les congédiant, il leur distribua à chacun une pièce d'argent.
Obligé de prendre un sceau et des armoiries, il montra sa piété dans le choix qu'il en fit.
Son écu était d'argent, à trois mouchetures d'hermine, pour marquer sa reconnaissance à la reine, sa bienfaitrice.
Il surmonta cet écu d'un chef chargé de trois couronnes d'épines, en mémoire de la passion du Sauveur, et entoura son écu d'une grande couronnes d'épine, dans la même vue.
Il garda l'habit blanc de son ordre, et n'usa point de linge, pas même pour les draps de son lit.
Il conserva de ses règles tout ce qui ne se trouva point incompatible avec les fonctions de sa charge, surtout le jeune de sept mois, qu'il se faisait scrupule de rompre, même pendant le cours de ses visites.
Quelques années après son ordination, c'est-à-dire en 1520, la discipline se relâcha dans la maison de Bonne Nouvelle.
Ce malheur n'eut d'autre effet pour le saint prélat que de le porter à s'attacher avec plus de constance aux pratiques régulières, et, pour se fortifier dans l'amour de l'observance, il appela auprès de lui quelques religieux, distingués par leur mérite et leur piété, et leur donna de l'emploi dans son diocèse et dans sa maison, trouvant ainsi un double avantage dans leur société, sa propre édification et la sanctification de son peuple, dont il confiait le soin à des ministres zélés, remplis de l'esprit de Dieu, et qui pouvaient dignement le seconder dans ses travaux pour le salut des âmes.
Le vertueux prélat était à peine à la tête de son diocèse, qu'il fut éprouvé par l'affliction.
Dès la première année de son épiscopat, un fléau terrible, la peste, se manifesta dans la ville de Rennes et y fît de grands ravages.
Il montra, en cette occasion, quelle était l'étendue de sa charité envers les malades.
Bien plus occupé de les soulager que de sa propre conservation, il s'exposait généreusement à tous les dangers de la maladie, par l'assiduité qu'il mettait à les visiter, à les consoler, à leur administrer les sacrements et à soulager, par ses libéralités, ceux à qui leur indigence rendait ses aumônes nécessaires.
Dieu, qui avait des desseins de miséricorde sur le diocèse de Rennes, ne permit pas que le vertueux évêque fût atteint de la contagion, et conserva le pasteur pour la sanctification du troupeau.
Yves connaissait trop bien les devoirs de l'épiscopat, et avait trop à cœur de les remplir, pour manquer à la résidence ; il ne s'en dispensa jamais : aussi, quoique la reine Anne de Bretagne lui eût conservé toute sa confiance et qu'elle l'eut tellement fait partager aux rois ses époux, qu'ils l'avaient choisi pour leur confesseur, dès qu'il fut placé sur le siège de Rennes, elle ne put plus le voir que rarement.
Elle n'eut pas même la consolation de l'avoir, lorsqu'elle fut atteinte de sa maladie mortelle.
On remarque seulement que le vertueux prélat fit un voyage à Paris à l'époque de la mort de Louis XII, en 1515, qu'il y prononça l'oraison funèbre de ce monarque dans l'église de Notre-Dame, et qu'après avoir présenté ses hommages au nouveau souverain, il se hâta de rentrer dans son diocèse, où, pendant vingt-six ans qu'il continua à le gouverner, il fut constamment occupé du soin de son salut et de celui des fidèles confiés à sa sollicitude pastorale.
Il n'était pas possible qu'un pasteur aussi pénétré de ses devoirs que. lui souffrît le désordre dans les autres ; aussi travailla-t-il avec fruit à réformer le clergé de son diocèse, tant séculier que régulier, sans se rebuter des peines et des difficultés qui accompagnent ordinairement de pareilles entreprises.
Il eut besoin de la faveur et de l'appui du roi François Ier et de la reine Claude, pour rétablir la régularité dans l'abbaye de Saint-Georges de Rennes, et ne fit point de difficulté de fortifier son autorité paternelle de ses secours temporels, pour rétablir l'esprit de S. Benoît parmi les religieuses de cette abbaye, qui avaient peut-être un peu trop pris celui du monde.
Frère François-Silvestre de Ferrare, général de l'ordre de Saint-Dominique, étant venu en Bretagne, fut reçu à Rennes par le saint prélat, dont les vertus faisaient tant d'honneur à cet illustre corps.
Le général alla à Vannes visiter le corps de S.Vincent Ferrier.
Il y tomba malade, et s'étant fait apporter à Rennes en litière, il y décéda l'an 1527, au mois de septembre, et Yves, qui l'avait assisté pendant sa maladie, officia solennellement à ses obsèques.
L'amour de la retraite avait engagé ce saint prélat à se conserver une chambre dans le dortoir du couvent de Bonne-Nouvelle, et il s'y renfermait, quand les soins de son troupeau lui donnaient quelques heures de relâche ; mais il trouvait une solitude plus tranquille à Brutz, maison épiscopale auprès de Rennes, vers le -pont Réant, sur le bord de la Vilaine ; là, après avoir fini ses visites pastorales, il allait se cacher aux hommes mondains, pour n'avoir de conversation qu'avec Dieu.
Mais ce n'était pas aux pauvres, aux misérables, aux veuves et aux orphelins qu'il se dérobait dans cette retraite ; au contraire, là, croyant, ce semble, ses œuvres plus cachées et moins exposées au dangereux poison de la flatterie et des louanges, il ouvrait son cœur avec plus d'affection aux indigents, et donnait moins de bornes à ses libéralités.
Il parlait aux pauvres avec une familiarité qui attirait leur confiance, il entrait dans le détail de leurs besoins, il les logeait dans sa maison, il les servait et mangeait avec eux ; il les prévenait, quand il voyait que la timidité leur tenait la langue liée, et n'avait pas plutôt appris de quoi ils avaient besoin, qu'il le leur donnait, ou de l'argent pour l'acheter.
Son attention était allée jusqu'à faire venir dans sa maison de Brutz des maîtres artisans, tels que tailleurs, bonnetiers, cordonniers et autres, auxquels il donnait des gages, pour enseigner leur métier aux enfants des pauvres, afin de les mettre en état de gagner leur vie.
Il ne se portait pas avec moins de zèle et d'ardeur à répandre l'aumône spirituelle; il faisait l'office de catéchiste envers ceux qui avaient besoin d'instruction ; il prêchait, baptisait, entendait les confessions, donnait la communion, visitait les pauvres malades, les consolait, leur administrait lui-même l'extrême-onction, assistait à leurs funérailles, et y officiait très-souvent.
Il redoubla ses aumônes, tant dans la ville qu'à Brutz, pendant une famine qui affligea son diocèse.
Il faisait cuire du pain, et le distribuait lui-même aux pauvres ; et quand ses officiers murmuraient de ses pieuses profusions, il prenait le temps de leur absence pour satisfaire les mouvements de sa charité.
Le soin qu'il avait de se cacher d'eux le portait souvent à distribuer la pâte crue, ou à tirer du four le pain à demi cuit, pour le donner à la hâte aux pauvres qui imploraient son assistance.
Voyant un jour que son maître d'hôtel avait fermé la porte à quelqu'un, en lui disant que M. de Rennes avait tout donné et n'avait plus rien, il défit ses jarretières, et les fit passer par-dessous la porte à cet indigent.
Quand il venait à lui quelque pauvre 'femme chargée d'enfants, il cachait de l'argent dans les pièces de pain qu'il lui donnait, et l'avertissait en secret qu'elle trouverait dans ce pain de quoi la dispenser d'essuyer le chagrin de ses officiers, rebutés d'un si grand concours de mendiants.
Un jour, pendant un grand froid, ayant rencontré quatre pauvres presque nus, et n'ayant autre chose que ses vêtements pour satisfaire aux mouvements de sa compassion, il dépouilla sa grande robe blanche, la mit en quatre, en donna une portion à chacun, et s'en retourna à sa maison de Brutz en petite robe de nuit.
Persuadé que le ministère de la parole est un des principaux devoirs de l'épiscopat, il s'appliqua sans relâche à la prédication, tant pour combattre les vices que pour s'opposer à l'erreur, surtout à celle de Luther, qui commençait à pousser quelques racines dans la province.
Le P. Guillaume Supremus, docteur, premier gradué en théologie depuis la réforme du couvent de Bonne-Nouvelle, et inquisiteur de la foi, le seconda puissamment dans cette œuvre de zèle, et fit une si exacte recherche des hommes ennemis, qui avaient répandu cette mauvaise semence à la faveur des ténèbres, qu'ils furent contraints d'abândonner le pays.
Chasser le démon des esprits qu'il occupe, n'est pas une œuvre moins merveilleuse que de le chasser des corps qu'il possède, et nous croyons sans peine que celui dont Dieu a voulu se servir tant de fois pour la première de ces œuvres, lui a aussi servi pour la seconde.
On en rapporte un exemple, c'est celui d'une femme tourmentée par l'esprit de ténèbres.
Par des mouvements dont elle n'était pas maîtresse, elle avait une répugnance extrême à se voir conduire vers le saint évêque.
Elle fut cependant amenée dans la cour du palais épiscopal, et le B. Yves lui donna du pain sur lequel il avait imprimé le signe salutaire de la croix.
La possédée s'échappa, en jetant de grands cris ; mais, ayant été reprise et liée, elle fut ramenée à l'évêque, qui, l'ayant fait conduire dans sa chapelle et s'étant revêtu de ses habits sacrés, l'exorcisa et chassa le démon.
Il n'y a pas lieu de douter que ce ne fût ce saint évêque qui, en 1532, couronna à Rennes François Ier, duc de Bretagne, alors dauphin de France et le dernier des princes qui aient reçu cette couronne ducale.
On dit aussi qu'en 1541, le 15 septembre, il posa la première pierre au portail de son église cathédrale, à la construction duquel il contribua généreusement.
Peu de jours après, il tomba malade dans sa maison de Brutz, la trente-cinquième année de son pontificat, et, après avoir reçu tous ses sacrements avec une piété exemplaire, il rendit l'esprit à Dieu, le 20 septembre 1541, la soixante-dixneuvième année de son âge et la trente-sixième de son épiscopat.
Quand on le dépouilla après sa mort, pour laver son corps, les religieux de son ordre, qui l'avaient assisté à ses derniers moments et qui lui rendirent ce dernier devoir, trouvèrent sa poitrine marquée d'une grande croix, de la figure de celles qu'on appelle de Jérusalem, et d'une blancheur éblouissante.
Le chirurgien qui devait faire l'ouverture du corps, apercevant ce signe merveilleux, et déjà pénétré d'une grande vénération pour le bienheureux prélat, se prosterna, et le regardant comme un ami de Dieu, jouissant de la gloire céleste, il lui recommanda son fils paralytique depuis dix mois.
Comme il s'en retournait à Rennes, après avoir fait son opération, son domestique vint lui annoncer en chemin que son fils avait été guéri tout d'un coup, et avait l'usage libre de ses pieds et de ses mains dont il avait été privé si longtemps ; vérité qui fut confirmée parle fils lui-même, qui en donna sa déclaration authentique.
On dit qu'une femme dévote de la paroisse de Brutz ayant ramassé les draps dans lesquels était mort le B. Yves, s'en servit depuis y avec des succès qui tenaient du miracle, à procurer une heureuse délivrance aux femmes enceintes qui étaient à leur terme, en étendant ces draps sur leur lit ; et l'on ajoute qu'ils demeurèrent blancs plils de trente ans.
Quand on régla l'ordre des funérailles, il s'éleva une grande contestation entre les chanoines de Saint-Pierre et les religieux de Bonne-Nouvelle, au sujet du lieu ou l'on enterrerait le corps.
Les religieux rie voulaient pas s'en dessaisir, et s'appuyaient sur la dernière volonté du défunt, qui avait laissé le choix du lieu de sa sépulture à la disposition du prietir des Dominicains.
Le convoi était déjà au carrefour Jouaud, à l'endroit où se séparent les deux chemins qui conduisaient du faubourg appelé le fiourg l'Évêque, l'un à l'église cathédrale, et l'autre à celle des Dominicains, et la contestation n'était pas encore terminée par une décision dont les parties fussent d'accord.
On dit que le brancart, porté sur des chevaux, demeura immobile, sans avancer ni reculer ; et cela ne signifie peut-être pas autre chose, Sinon que les chevaux furent arrêtés réciproquement par les chanoines et par les religieux, qui se disputaient encore la possession du corps.
Enfin le prieur de Bonne-Nouvelle jugea qu'il ne pouvait faire un meilleur usagé du pouvoir qui lui avait laissé le défunt, que de donner des marques de Sa déférence pour l'église de Rennes, en lui cédant la possession d'un trésor qu'elle disputait avec tant d'ardeur.
Ayant donc pris sur-le-champ l'avis de ses religieux, il abandonna le corps aux chanoines, qui l'enterrèrent dans leur église cathédrale, dans un tombeau élevé, pratiqué sous la vitre de la grande croisée du côté du midi.
Ce fut là, et non pas sous les pieds de ses frères, dans le chapitre de Bonne-Nouvelle, comme l'avait tant de fois souhaité l'humble prélat, que fut déposé frère Yves Mahyeuc, qui, malgré l'obscurité de son extraction, n'a pas laissé d'être un des plus grands ornements de l'Église de Rennes, et d'honorer le siège sur lequel il avait été placé.
Dans le peu de mois qui restaient de la même année, on vit arriver à Rennes plusieurs personnes des diocèses voisins, qui, par les déclarations signées de leur main, rendaient témoignage des guérisons miraculeuses opérées en leur faveur par les mérites du saint prélat.
Un prêtre du diocèse de Saint-Malo, guéri d'une fièvre quarte de quinze mois, donna sa déclaration le 27 novembre "; une femme de la paroisse de Vigneu, qui avait reçu la même faveur après treize mois de fièvre, donna sa déclaration le 5 décembre ; une autre déclaration du lendemain fait foi d'une guérison signalée arrivée dans la paroisse de Ranrouet ; et le 30 du même mois, un pareil témoignage assuré la vérité d'une autre grâce du même genre.
Il y a encore des déclarations pareilles des années suivantes.
Le bruit de tant de miracles a pendant longtemps attiré tan assez grand concours de peuple au tombeau d'Yves MahyeUc, que le peuple continuait toujours d'appeler Bienheureux.
Au côté oriental de la croisée où il avait été enterré, se trouvait une chapelle au delà du tombeau de Raoul de Tréal, autrefois évêque de Rennes ; on exposa sur l'autel de cette chapelle une image en relief du B. Yves, où il était représenté à genoux en habits pontificaux, tendant les mains pour recevoir l'enfant Jésus que la sainte Vierge lui présentait.
Le jour de S.Yves,19 mai, le peuple confondait assez souvent S.Yves de Kermartin et Yves Mahyeuc, et, n'ayant point de jour marqué pour honorer celui-ci, prenait le jour destiné à célébrer la mémoire de S. Yves, pour aller faire ses prières et ses offrandes au tombeau de ce pieux évêque.
Ce qui arriva à la mort d'Aimar Hennequin, son troisième successeur, augmenta beaucoup la dévotion et la confiance du peuple envers le serviteur de Dieu.
Ce prélat, qui avait une affection singulière pour la mémoire du B. Yves; avait ordonné, en mourant, que son corps fût enterré dans le tombeau de ce saint homme. Pierre Oger., chanoine de Rennes, archidiacre du Désert et exécuteur testamentaire de l'évêque Aimar, fit ouvrir le sépulcre du B.Yves le soir du 15 janvier de l'an 1596.
On trouva son corps sans corruption, et ses habits même étaient aussi entiers que le jour qu'il fut mis en terré.
L'archidiacre, voyant une si grande merveille, fit refermer le sépulcre, et enterrer le corps de l'évêque Aimar à plate terre, auprès du tombeau d'Yves Mahyeuc.
 On gardait autrefois, avec un respect religieux, dans plusieurs églises, comme à Saint-Georges de Rennes, à Bonne-Nouvelle et autres, le portrait de ce bienheureux prélat.
Quant à son corps, on prit sans doute des précautions pour le conserver, lors de la démolition de l'église cathédrale de Rennes, en, 1755; mais nous ne savons ce qu'il est devenu.

Fête le 20 septembre.









 

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