Saint Théodose de Kiev († 1074)
abbé
Notre Saint Père Théodose naquit à Vasiliev, ville proche de Kiev, de parents chrétiens qui s'installèrent ensuite à Koursk.
Dès son enfance il fuyait les rires et les jeux pour se consacrer à la méditation des Livres Saints et à la prière.
Âgé
de treize ans à la mort de son père, il entreprit de mener une vie plus
strictement conforme aux enseignements évangéliques.
Désirant
imiter le Seigneur qui s'est abaissé jusqu'à la condition d'esclave, il
allait travailler aux champs avec les serviteurs et se faisait de bon
gré le dernier de tous.
Sa
mère était fort irritée par cette conduite et considérait qu'il jetait
ainsi le discrédit sur sa lignée en se mêlant aux gens de basse
condition.
Malgré
les corrections répétées, l'esprit de Théodose n'en restait pas moins
attaché au souci de plaire à Dieu, et il nourrissait le désir ardent de
faire un pèlerinage aux Lieux Saints.
Un jour, il quitta de nuit, secrètement, la maison familiale pour suivre un groupe de pèlerins en marche vers la Terre Sainte.
Dès
qu'elle s'aperçut de sa fugue, sa mère s'élança à leur poursuite. Les
ayant rejoints, elle attrapa son fils par les cheveux et, après l'avoir
frappé à coups de pieds, elle le ramena à la maison comme un criminel.
Théodose
promit de ne plus la quitter tant qu'il pourrait travailler au salut de
son âme, et il reprit sa vie pieuse, assistant chaque jour à la
Liturgie et confectionnant lui-même les prosphores.
Au bout de quelque temps, craignant les railleries de leurs proches, sa
mère voulut lui interdire de s'abaisser ainsi à la tâche de boulanger ;
mais Théodose lui montra, à l'aide de citations tirées de la Sainte Écriture, qu'il n'y a pas de plus noble activité que de préparer les
offrandes pour le Saint Sacrifice, et elle le laissa en paix.
Une
année plus tard, persécutions et mauvais traitements recommencèrent
contre le serviteur de Dieu, et sa mère le rudoya plus violemment encore
lorsqu'elle découvrit la ceinture de fer qu'il portait serrée autour de
son corps et qui avait laissé des traces de sang sur sa chemise.
Finalement,
à l'âge de vingt-trois ans (1032), il s'enfuit à pied vers Kiev et,
guidé par Dieu, atteignit la grotte où vivait Saint Antoine (cf. 10
juillet).
Tombant aux pieds de l'Ancien avec larmes, il le -supplia de le recevoir comme disciple.
Antoine
essaya d'abord de dissuader le jeune noble, en lui évoquant les
difficultés de ce genre de vie, mais voyant son ardent amour de Dieu, il
l'accepta et chargea Saint Nicon (cf. 23 mars) de le revêtir du Saint
Habit angélique.
Théodose commença aussitôt de grands combats ascétiques, jeûnant strictement et veillant toute la nuit.
Lorsque sa mère le retrouva après de longues recherches et demanda à le voir, Théodose refusa de la recevoir.
Comme
elle menaçait de se donner la mort sur place, il sortit de la grotte et
lui dit : « Mère, si tu veux me revoir, reste à Kiev et prends le voile
dans un des couvents de la ville, ainsi tu pourras faire ton salut. »
Ayant
d'abord opposé de fortes résistances, elle réalisa ensuite la vanité
des choses de ce monde et devint Moniale au Monastère de Saint-Nicolas à
Kiev, où elle trouva le repos.
Après
le départ de Saint Nicon, Saint Théodose fut ordonné Prêtre de la
communauté, qui comptait alors douze Moines ayant Saint Barlaam pour
Higoumène (cf 19 nov.).
Ils menaient une vie très rude, travaillaient de leurs mains et priaient sans cesse.
Au matin ils se réunissaient dans l'église de fortune pour l'Office,
puis ils retournaient quelque temps au travail ou à la lecture avant la
Liturgie, et, après avoir mangé un peu de pain sec, ils reprenaient en
silence leur travail jusqu'aux Vêpres.
Théodose
surpassait tous les frères, non seulement par ses labeurs ascétiques,
mais surtout par sa douceur et son amour fraternel.
Il passait fréquemment toute la nuit en prière ou à lire le Psautier en
plein air, indifférent aux piqûres des moustiques, et il ne prenait de
repos qu'assis sur un siège.
D'autres
fois, pendant que les autres Moines étaient assoupis, il moulait le
grain pour leur épargner de la peine, et à l'aurore, il se trouvait le
premier à l'église qu'il était le dernier à quitter.
Lorsque
Saint Barlaam fut transféré dans un autre Monastère, les frères
choisirent unanimement Théodose pour les diriger, sous la conduite
paternelle de Saint Antoine.
La communauté prit alors une grande extension, de sorte qu'il devint
nécessaire de construire de nouvelles cellules et une église à quelque
distance des grottes.
Grâce à l'aide du prince de Kiev, Iziaslav, l'entreprise put être menée à bien, et le nouveau Monastère fut inauguré en 1062.
Il n'était
cependant plus possible de garder pour cette importante communauté la
liberté et la souplesse de vie du premier groupe d'ascètes des grottes.
Une règle de vie cénobitique était nécessaire. C'est pourquoi Saint
Théodose chargea le Moine Ephrem, qui avait entrepris un pèlerinage aux
Lieux saints et à Constantinople, de s'informer sur les usages des
Monastères byzantins et de rapporter en Russie une copie du Typikon de
l'illustre Monastère du Studion.
Le
Monastère des Grottes de Kiev garda le titre de Laure, en mémoire du
groupement semi-érémitique initialement réuni autour de Saint Antoine,
mais il s'agissait en fait désormais d'un véritable Cénobion, fidèle
héritier du Monachisme byzantin, qui allait servir de prototype à tous
les autres Monastères de Russie au cours des siècles.
Le bon ordre et l'harmonie y régnaient et faisaient du Monastère une
image du Royaume des cieux et un modèle de vie pour tous les amis de la
vertu.
Le prince Iziaslav avait une grande vénération pour Saint Théodose, et
il venait souvent lui rendre visite pour solliciter ses conseils.
Un jour qu'il arriva après la fermeture des portes, le portier refusa
de lui ouvrir en disant que l'Higoumène avait donné l'ordre de n'ouvrir à
personne une fois la nuit tombée, même s'il s'agissait du prince.
Il laissa donc le souverain dehors et alla prévenir le Saint.
Cet épisode édifia fort le prince qui, loin de s'irriter, montra encore plus de respect envers Saint Théodose et son Monastère.
Lorsque le prince Svyatoslav de Tchemikov chassa son frère Iziaslav du
trône de Kiev, Saint Théodose lui reprocha ouvertement son acte et
refusa de commémorer l'usurpateur dans les litanies.
Pendant
le Grand Carême, le Saint avait coutume de se retirer dans la grotte où
ils avaient commencé leur vie ascétique, et il ne réapparaissait que le
vendredi avant la Grande Semaine, pour instruire les frères.
Il endurait dans cette grotte de nombreuses attaques des démons, mais
les repoussait bravement par le jeûne et la prière, et en ressortait
triomphant pour célébrer la résurrection du Seigneur.
Il
enseignait surtout par l'exemple : travaillait souvent lui-même à la
boulangerie ou à la cuisine, et entreprenait sans murmure les travaux
que d'autres frères avaient refusé d'accomplir.
S'il
apprenait que le repas avait été préparé sans la bénédiction d'usage de
l'Higoumène, ou si quelque querelle avait eu lieu lors de sa
préparation, il ordonnait de jeter toute la nourriture au feu.
Lorsqu'en visitant les cellules des Moines, il y trouvait des objets
inutiles, de l'argent ou de la nourriture, il les brûlait aussitôt et
leur rappelait qu'un vrai Moine ne doit rien posséder en particulier.
Saint
Théodose montrait aussi un grand amour pour les pauvres et avait fait
construire une hôtellerie près du Monastère, où l'on accueillait tous
les nécessiteux qui se présentaient.
Chaque samedi, le Saint envoyait une cargaison de pains aux détenus dans les prisons de Kiev.
Ayant
acquis par sa charité et par sa persévérance dans la prière une grande
faveur auprès de Dieu, il chassait les esprits impurs, guérissait les
malades et avait acquis le don de clairvoyance.
Une
nuit, des voleurs voulurent dérober les objets précieux dans l'église,
mais chaque fois qu'ils s'approchaient, ils étaient repoussés par des
voix angéliques venant de l'intérieur et qu'ils croyaient être celles
des Moines.
Lorsqu'au matin les Moines vinrent pour célébrer l'office, les voleurs
voulurent se précipiter dans l'église et les massacrer, mais à leur
grande stupeur ils virent soudain l'église s'élever dans les airs.
Ils prirent la fuite et, quelque temps plus tard, leur chef et trois de
ses compagnons vinrent demander pardon au Saint et lui apprendre ce qui
était arrivé, car aucun des Moines ne s'était rendu compte de ce
miracle.
La
communauté ne cessant de croître, Saint Théodose pria pour que Dieu
permît l'agrandissement du Monastère et la construction d'une église de
pierre.
Peu
de temps après, quatre bâtisseurs grecs venus de Constantinople se
présentèrent au Monastère, en disant qu'ils avaient été engagés par la
Mère de Dieu elle-même, pour construire l'église dont Elle leur avait
montré en vision le modèle.
Ils
étaient porteurs de Reliques de Saints Martyrs, destinées à être
placées dans les fondements, et d'une icône miraculeuse de la
Toute-Sainte.
L'endroit
ayant été révélé par Dieu, on mesura les proportions de l'édifice à
l'aide d'une ceinture en or donnée par le prince des Varègues, Simon ;
et ce fut le prince de Kiev, Sviatislav, qui commença lui-même les
travaux de fondations.
La même année (1073), Saint Antoine remit son âme au Seigneur et, un an plus tard, Dieu révéla à Théodose son prochain départ.
Le
Saint higoumène convoqua les frères et leur demanda de choisir un
successeur. Saint Étienne (cf. 27 av.) ayant été élu, Théodose lui donna
sa bénédiction, embrassa paternellement chaque frère, puis il s'endormit
en paix (1074).
Par la suite, le tombeau du Saint fondateur du monachisme cénobitique russe devint une source de miracles.
Saints
Antoine et Théodose ne cessèrent pas de veiller sur le Monastère ; et,
dix ans plus tard, ils apparurent à des iconographes de Constantinople
pour leur commander d'aller procéder à la décoration de l'église de la
Laure, laquelle une fois achevée, fut inaugurée en 1089 par Jean,
Métropolite de Kiev.
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