Saint Senoch, moine († 576)

Saint Senoch
moine († 576)



"Vanité de ceux qui se vantent, dit l'Ecclésiaste, tout est vanité ! N'est-il pas vrai que, de tout ce qui se fait dans le monde, tout soit vanité ?
C'est pourquoi les saints de Dieu, que jamais ne brûla la flamme des désirs, n'agita l'aiguillon de la concupiscence, que jamais ne tenta la boue de la luxure, même, si j'ose dire, sous forme de pensée, ces saints, une fois élevés par la flamme du tentateur, se sont crus au sommet de la justice et, gonflés par cet orgueil d'une jactance exaltée, souvent se sont écroulés.
C'est ainsi : ceux que le glaive des grands crimes n'avait pu égorger, une légère fumée de vanité les a perdus facilement, une fois livrés.
Tel celui-là même dont nous allons parler : il avait brillé de nombreuses vertus, et aurait presque disparu enseveli dans cet abîme de l'arrogance, si les exhortations zélées des frères fidèles ne l'avaient regagné.
Donc le bienheureux Senoch, Taifale d'origine, naquit en ce pays de Poitou qu'on nomme Taifalie.
Il se convertit au Seigneur, devint clerc, et se constitua un monastère.
En effet, il trouva en Touraine des murs anciens et, en les restaurant, il aménagea des habitations convenables.
Il trouva là un oratoire dans lequel, à ce qu'on rapportait, notre grand saint Martin avait prié.
Il l'arrangea avec un soin diligent, y dressa un autel avec un emplacement préparé pour recevoir des reliques de saints, puis invita l'évêque.
Alors vint le bienheureux évêque Eufronius qui consacra l'autel et conféra l'honneur du diaconat à Senoch.
La Messe célébrée, on voulut placer le coffret des reliques dans l'emplacement, mais le coffre était trop grand et ne pouvait tenir dans l'emplacement.
Alors le diacre se prosterna avec l'évêque, courbé en imploration, répandit des prières et des larmes, et obtint ce qu'il demandait.
O merveille ! l'emplacement s'agrandit miraculeusement, et le coffret se rétrécit en sorte qu'il put tenir très au large, à l'admiration générale.
En ce lieu, ayant réuni 3 moines, Senoch servait assidûment le Seigneur, et avant tout il marchait dans la voie d'une vie étroite, avec une maigre nourriture et une boisson restreinte.
Car il ne mangeait que du pain d'orge et ne buvait que de l'eau, ne prenant qu'une livre de chacun de ces éléments par jour.
Pendant les hivers rigoureux, il était content d'avoir les pieds nus ; il se liait d'une chaîne de fer aux mains, aux pieds et au cou.
Dérangé par la vue des frères, il s'enferma dans une cellule, priant assidûment, et passant le temps en veilles et en prières jour et nuit, sans barguigner.
La piété des fidèles lui apportait fréquemment de l'argent, mais il ne l'enfouissait pas dans des lieux cachés, mais dans les bourses des pauvres, et il rappelait souvent cet oracle des discours du Seigneur : Ne thésaurisez pas pour avoir un trésor sur terre, car où sera votre trésor, là sera aussi votre cœur.
Il donnait ce qu'il recevait, pour l'amour de Dieu, aux diverses nécessités des indigents.
De la sorte, pendant sa vie, il réussit à délivrer des liens de l'esclavage ou du poids de leurs dettes plus de 200 d'entre eux.
A notre arrivée en Touraine, il sortit de sa cellule, vint à notre rencontre, nous salua et baisa, puis rentra.
Il était, comme nous avons dit, fort abstinent, et guérissait les maladies des infirmes; mais comme de l'abstinence venait la sainteté, ainsi de la sainteté commença à venir la vanité.
Car il sortit de sa cellule, et avec une jactance exaltée il partit pour rechercher et visiter des parents au pays poitevin que nous avons rappelé plus haut.
Il revint enflé d'arrogance, ne cherchant plus à plaire qu'à lui seul.
Nous lui fîmes des objurgations, et il entendit raison, à savoir que les superbes sont bien éloignés du royaume de Dieu.
Ayant purgé sa jactance, il se rendit si humble qu'il ne restait plus en lui la moindre racine de superbe, en sorte qu'il proclamait : "Je vois maintenant la vérité de ces paroles que le bienheureux Apôtre prononce de sa bouche sacrée
"Que celui qui se glorifie se glorifie dans le Seigneur !".
Par lui, le Seigneur faisait beaucoup de miracles sur les infirmes; mais comme Senoch annonçait qu'il allait s'enfermer de manière à ne plus paraître aux regards humains, nous lui persuadâmes de ne pas se fermer dans une réclusion perpétuelle, mais seulement pendant les jours qui vont de l'enterrement de saint Martin à la solennité de la naissance du Seigneur et encore pendant ces 40 jours que l'autorité des Pères décida de passer dans la plus grande abstinence, avant les fêtes pascales ; les autres jours, il se donnerait aux peuples pour l'amour des infirmes.
Il entendit notre conseil, accepta volontiers ce qui avait été dit, et l'exécuta sans barguigner.
Et maintenant que nous avons un peu parlé de sa vie, venons aux miracles que par lui la dextre guérisseuse de la divine Puissance daigna opérer.
Un aveugle nommé Popusitus vint à lui.
Le bienheureux Senoch, alors, était déjà ordonné prêtre.
L'infirme demanda quelque aliment; le saint prêtre lui toucha de la main les yeux : dès que Popusitus eut reçu le signe salutaire, aussitôt il recouvra la vue.
Un autre Poitevin, un garçon souffrant de ce mal, ayant entendu l'oeuvre de ce confesseur, le pria pour recevoir la lumière perdue.
Sans délai, Senoch invoqua le Nom du Christ, posa une croix sur les yeux aveugles; aussitôt coula un flux de sang, la lumière entra, et sur le visage qui en était privé depuis un cycle de 20 années, l'éclat de ses 2 étoiles resplendit.
2 garçons, aux membres tous débiles, et contractés en boule à la manière de sphère, furent amenés en présence du saint.
Il leur imposa les mains, leurs articulations se rétablirent, et en une heure de temps il rendit l'un et l'autre parfait.
Puis il doubla le bienfait d'un double miracle : un garçon et une fille se présentèrent à lui les mains contractées.
On était alors au milieu de la solennité pascale.
Ils suppliaient le serviteur de Dieu pour qu'il les guérît par un remède ; mais lui, comme la foule affluait à l'église, différait de s'occuper d'eux, proclamant qu'il n'était pas digne que Dieu daignât par lui montrer ses bienfaits à des infirmes.
Comme tout le monde le suppliait, il prit leurs mains dans ses mains, les palpa, étira leurs doigts : ils étaient guéris, il leur ordonna de partir. De même Benaia - c'était le nom d'une femme - présenta des yeux fermés.
Bénie par le contact d'une dextre salutaire, elle se retira illuminée. Je ne pense pas pouvoir taire non plus que souvent sa prière obtint de rendre vain le virus des serpents.
2 individus, enflés par la morsure d'une hydre, se prosternèrent à ses pieds, le priant de chasser par sa puissance le virus que la dent d'une méchante bête a injecté dans leurs membres moribonds.
Et lui épandit cette oraison vers le Seigneur : "Seigneur Jésus-Christ, qui au commencement as créé tous les éléments du monde et décrété que ce serpent, envieux des dignités humaines, serait sous une malédiction, chasse de ces tiens serviteurs le mal de ce venin, pour que les reptiles ne puissent triompher d'eux, mais pour qu'eux puissent triompher du reptile".
Après avoir parlé, il caressa toutes les jointures de leur corps, et aussitôt, l'enflure étant comprimée, le virus mortel perdit ses forces pour nuire.
Le jour de la résurrection du Seigneur était venu, et un homme se rendant à l'église vit une foule de bêtes broutant sa moisson ; il gémit et dit "Malheur à moi ! car le fruit de mon travail de l'année est en train de périr, et il n'en restera rien!"
Il prit une cognée, coupa des branches, commença à boucher le trou de la haie; sur-le-champ sa main contractée retint malgré elle ce qu'elle avait empoigné spontanément.
Poussé par la douleur, il arriva navré au saint confesseur, traînant derrière lui la branche que sa main avait saisie, et raconta tout ce qui s'était passé.
Alors Senoch, avec de l'huile sanctifiée par une bénédiction, oignit de sa main la main malade et lui restitua la vigueur, après avoir retiré la branche.
Par la suite il rendit encore à la santé, par un Signe de Croix tracé sur le mal, beaucoup de gens mordus par des serpents et atteints de pustule maligne.
Quelques-uns étaient obsédés par un démon enrageant d'envie ; dès qu'il leur eut imposé les mains, les démons s'enfuirent aussitôt et il répara l'esprit troublé des énergumènes en rendant l'intégrité à leur intelligence.
Tous ceux que la dextre divine sauva par lui de diverses infirmités, s'ils étaient pauvres, il leur fournissait nourriture et vêtement, joyeux dispensateur ; tel était son souci des indigents qu'il munit diligemment de ponts les lits des fleuves, par crainte qu'aux inondations on n'eût à pleurer de cruels naufrages.
Ces miracles le mirent en lumière ; il devint illustre parmi les peuples. Comme il avait environ 40 ans, sous une petite poussée de fièvre il s'alita 3 jours : on m'annonça qu'il était proche du trépas.
Vite je me hâtai vers lui, je vins à son lit, mais je ne pus tirer un mot de lui. Il était très fatigué. Puis, après une heure environ, il expira (576).
Pour ses obsèques s'assembla la foule de ceux qu'il avait rachetés, comme nous l'avons dit plus haut, du joug de l'esclavage ou libérés de diverses dettes, qu'il nourrissait et qu'il habillait.
Ils pleuraient en disant "A qui, saint Père, nous laisses-tu ?".
Plus tard, enseveli, il se manifesta souvent par des miracles patents.
En effet, 30 jours après sa mort, comme on célébrait une Messe auprès de sa tombe, un certain Chaidulfus, perclus, approcha du tombeau pour demander l'aumône.
Tandis qu'il baisait dévotement le tapis placé dessus, les liens de ses membres se dénouèrent : il était guéri.
Et j'ai appris bien d'autres faits survenus là ; mais je n'ai retenu comme mémorables que ceux-là."
Saint Grégoire de Tours, Vie des Pères, 15
Fête le 24 octobre.








 

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