Saint Jean de Dalyatha (8ème s.)
moine mystique syro-oriental
Source photo : http://iconalbaron.blogspot.fr/2011/07/jean-de-dalyatha.html
Jean de Dalyatha est un auteur mystique chrétien de langue syriaque, appartenant à l'Église d'Orient, et ayant vécu au VIIIe siècle.
Sources
L'identification de cet auteur a posé problème.
L'œuvre,
constituée traditionnellement de vingt-neuf homélies, cinquante-et-une
lettres, de huit « centuries » (séries de « sentences » groupées par
cent) et de quelques autres écrits courts, a été transmise par des
manuscrits dont les plus anciens datent des XIIe et XIIIe siècles, et qui appellent l'auteur « Mar Yohannan Saba », c'est-à-dire « Jean l'Ancien ».
À partir du XVe siècle, ce « Jean l'Ancien » a été identifié, soit à Jean de Dalyatha, soit à Jean bar Penkayé.
Les travaux modernes de Robert Beulay et de Brian Colless ont écarté la seconde hypothèse.
D'autre
part, les contours de l'œuvre ont été précisés :
deux homélies attribuées anciennement à Isaac de Ninive ont été
transférées à Jean de Dalyatha ; deux lettres assignées à celui-ci (les
48e et 49e) et la majorité de ses « centuries »
(sauf une et demie) seraient en fait de Joseph Hazzaya ; quant aux
écrits courts, l'authenticité de plusieurs d'entre eux est très
douteuse.
Jean de Dalyatha est connu par les sources suivantes : le Livre de la chasteté d'Ichodenah, métropolite de Bassorah (IXe siècle), un recueil de cent-quarante notices sur des moines et écrivains religieux (no 126 dans l'édition de J.-B. Chabot, no 127
dans celle de P. Bedjan) ; une notice anonyme sur sa vie retrouvée dans
un manuscrit de Mardin (bibliothèque duPatriarcat jacobite) daté
de 1472 ; un passage d'un hymne anonyme sur les saints ; un extrait de
la Collection des canons de l'Église syro-nestorienne, et un autre du Nomocanon d'Ébedjésus
de Nisibe, qui mentionnent tous deux Jean de Dalyatha parmi les trois
auteurs condamnés en 790 par un synode présidé par
le catholicos Timothée Ier ; un passage de l'Ordo judiciorum ecclesiasticorum du
même Ébedjésus de Nisibe, signalant la réhabilitation des trois auteurs
par un autre synode après l'avènement du catholicos Icho bar Noun
en 823 ; un passage du Catalogue des livres ecclésiastiques du
même auteur, signalant que « Jean de Dalyatha écrivit lui aussi deux
livres (les homélies et les « centuries » ?) ainsi que des lettres
pleines de componction sur la vie religieuse ».
Biographie
Jean
naquit dans le village d'Ardamut (aujourd'hui Al-Kawasha), à une
trentaine de kilomètres à vol d'oiseau du mont Qardu, au nord de la
région appelée en syriaque Beth Nuhadra.
Il
reçut dans l'église de son village l'instruction dispensée en principe à
l'époque « à tous les fils des chrétiens » : la lecture et
l'explication des Psaumes, puis celles des Évangiles et des Épîtres de
saint Paul, enfin celles des passages de l'Ancien Testament utilisés
dans la liturgie des dimanches et fêtes.
Les jeunes hommes aspirant au sacerdoce ou à la vie monastique
recevaient un enseignement supplémentaire portant principalement sur les
commentaires bibliques d'Éphrem de Nisibe et de Théodore de Mopsueste.
Très tôt, Jean s'astreignit aux jeûnes et aux veilles. Il se rendait chaque semaine au couvent fondé au VIIe siècle
par Mar Afnimaran et situé à vingt-deux kilomètres de son village, au
pied d'un éperon rocheux sur la face sud de la montagne Ba Nuhadra.
Afnimaran
avait été de son vivant taxé de messalianisme et chassé de son couvent
précédent ; du temps des visites de Jean vivait encore dans
l'établissement qu'il avait fondé son disciple et collaborateur Maran
Zeka, qui devint évêque de Hedatta en 741.
Jean revêtit l'habit monacal dans le couvent de Mar Yuzadaq, situé près du mont Qardu, de l'autre côté de la montagne Ba Nuhadra, et fondé au temps du catholicos Mar Ichoyahb II.
Cet établissement était alors dirigé par le « bienheureux Étienne », autre disciple de Mar Afnimaran.
Étienne,
non autrement connu, avait eu également pour maître spirituel Jacques
le Voyant (Yacoub Hazzaya), dont on sait par ailleurs qu'étant jeune
novice, il ravit l'assistance comme chanteur, au couvent de Beth 'Abhe,
lors d'une visite qu'y fit le catholicos Mar Ichoyahb III au début de
son pontificat (649).
Cette indication chronologique permet de situer très vraisemblablement le noviciat de Jean de Dalyatha au début du VIIIe siècle (710/720 ?), et de le faire naître vers 690.
Le noviciat durait une cinquantaine de jours ; il était suivi d'une période de vie communautaire (cœnobium) qui, au couvent de Mar Yuzadaq, durait au moins sept ans.
Jean avait deux frères, moines en même temps que lui dans ce couvent,
et qui tentaient d'alléger les jeûnes excessifs qu'il s'infligeait.
Après sa période de cœnobium, Jean partit vivre dans la solitude « dans la montagne de Beth Dalyatha », lieu non identifié (Ṭurā da-Dalyāthā signifie
en syriaque le « Mont des Sarments », peut-être une étymologie
populaire d'un toponyme), mais désignant un lieu très élevé et escarpé, à
une certaine distance du mont Qardu, sans doute dans la direction du
nord ou de l'est.
Il s'y serait nourri de grappes cueillies sur des sarments de vigne,
mais il s'agit peut-être d'une légende forgée sur le toponyme.
C'est dans cette solitude qu'il composa au moins une partie de ses écrits (notamment ses lettres).
Dans
sa vieillesse, après une très longue période d'érémitisme, il « revint
habiter les montagnes du Qardu », à la topographie sans doute plus
adaptée à son grand âge.
Mais
à son corps défendant, lui qui voulait mourir dans la solitude, il
attira autour de lui d'autres moines qui recherchaient sa compagnie.
Sous
sa direction, ils restaurèrent l'ancien couvent d'un certain Jacques le
Moine (Yacoub Abila), et il finit sa vie supérieur de couvent, parvenu à
un âge avancé.
Il était probablement mort quand il fut condamné par le synode de 790, et on peut avec vraisemblance situer son décès vers 780.
Œuvre
La distinction entre les deux parties principales de l'œuvre, les « homélies » et les « lettres » (en syriaque memré et eggrāthā),
est imposée par la tradition manuscrite, mais n'est pas toujours
clairement fondée ; il arrive d'ailleurs que certains textes changent de
catégorie dans certains manuscrits (la lettre 18, dite Règle des frères commençants ; la lettre 43, Sur la pénitence ; la lettre 50, Sur le souvenir de Dieu ; la lettre 51, Sur la vision de Dieu).
Les
textes des deux catégories sont faits de prières, de témoignages
d'expériences personnelles ou venant d'autres ascètes, d'exhortations,
de conseils sur la vie monastique, de digressions diverses. Cependant,
le ton des « lettres » est en général plus direct et plus intime que
celui des « homélies ».
Les
préoccupations de Jean de Dalyatha sont essentiellement mystiques et
très peu dogmatiques : appartenant à l'Église nestorienne, il est devenu
tout aussi bien un auteur de référence pour l'Église
jacobite (monophysite), à tel point que la tradition manuscrite est
exclusivement jacobite (même situation que pour Isaac de Ninive).
La seule altération notable des textes, sans conséquence sur la pensée
de l'auteur, est l'ajout systématique du qualificatif « Mère de Dieu »
quand il est question de la Vierge Marie.
D'autre part, l'ensemble de l'œuvre a été traduit en arabe au XIIe ou au XIIIe siècle et introduit sous cette forme dans la tradition de l'Église copte ; de là, au XVIe siècle fut réalisée une version éthiopienne.
Jean de Dalyatha fut contemporain de Joseph Hazzaya.
« Avec ce dernier et avec Jean de Dalyatha la mystique nestorienne
atteint ses sommets : avec Joseph pour sa technicité, avec Jean pour sa
luminosité profonde », écrit Robert Beulay.
Les
auteurs des siècles antérieurs qui ont le plus influencé cette mystique
sont Grégoire de Nysse (avec lequel Jean de Dalyatha a des affinités
particulières selon R. Beulay), Évagre le Pontique,
le Pseudo-Macaire, Jean le Solitaire d'Apamée (qui l'a beaucoup moins
marqué qu'il ne l'a fait pour Joseph Hazzaya), et le Pseudo-Denys
l'Aréopagite.
Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_de_Dalyatha
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire