Repentance

Repentance



La repentance de l'Église catholique est une expression qui exprime la manifestation de repentance des autorités ecclésiales par rapport aux fautes commises par des membres de l'Église dans son Histoire, et s'accompagne également du pardon.

Elle a eu lieu dans les années 1990 et fait suite à un renouvellement de la théologie catholique intervenu lors du concile Vatican II, notamment sur les questions d'œcuménisme et de dialogue inter-religieux.

Le dialogue inter-religieux a notamment fait l'objet d'une déclaration de Paul VI lors du concile en 1965, Nostra Ætate, qui fixe les principes en matière de relations entre le christianisme et les autres religions.

Lors de la préparation du Jubilé de l'an 2000, Jean-Paul II a écrit en 1994 dans Tertio Millennio adveniente : « Il est donc juste que, le deuxième millénaire du christianisme arrivant à son terme, l'Église prenne en charge, avec une conscience plus vive, le péché de ses enfants, dans le souvenir de toutes les circonstances dans lesquelles, au cours de son histoire, ils se sont éloignés de l'esprit du Christ et de son Évangile, présentant au monde, non point le témoignage d'une vie inspirée par les valeurs de la foi, mais le spectacle de façons de penser et d'agir qui étaient de véritables formes de contre-témoignage et de scandale. »

 

Affaire Galilée

Galilée est un éminent savant des XVIe et XVIIe siècle, dont l'Église catholique a condamné les positions scientifiques et les conséquences théologiques qu'il en tirait. Ayant refusé de revenir sur ses positions scientifiques qui étaient justes, il a été condamné par le tribunal de l'Inquisition à une peine de prison qui a été aussitôt commuée en assignation à résidence dans les palais qu'il fréquentait.

Articles détaillés : Galileo Galilei et Révolution copernicienne.

Jean-Paul II fit état du souhait d'étudier cette question dès le début de son pontificat en 1979. Il nomma une commission d'étude de la controverse ptoléméo-copernicienne en 1981, composée d'historiens, de savants, et de théologiens, afin de mener les travaux dans un esprit de sincérité et de recherche de la vérité.

La commission remit ses conclusions lors d'une séance de l'académie pontificale des sciences le 31 octobre 1992.

L'Église a reconnu pour la première fois des erreurs dans l'affaire. La réhabilitation de Galilée, dont la condamnation avait été essentiellement liée à des motifs politiques, ne fut toutefois pas officiellement prononcée, le tribunal qui l'avait condamné (l'Inquisition), ayant disparu depuis.

Le cardinal Poupard, président de la commission d'étude, déclara en conclusion de son discours :
« Héritiers de la conception unitaire du monde, qui s'imposa universellement jusqu'à l'aube du XVIIe siècle, certains théologiens contemporains de Galilée n'ont pas su interpréter la signification profonde, non littérale, des Écritures, lorsqu'elles décrivent la structure physique de l'univers créé, ce qui les conduisit à transposer indûment une question d'observation factuelle dans le domaine de la foi.
C'est dans cette conjoncture historico-culturelle, bien éloignée de notre temps, que les juges de Galilée, incapables de dissocier la foi d'une cosmologie millénaire, crurent, bien à tort, que l'adoption de la révolution copernicienne, par ailleurs non encore définitivement prouvée, était de nature à ébranler la tradition catholique, et qu'il était de leur devoir d'en prohiber l'enseignement. Cette erreur subjective de jugement, si claire pour nous aujourd'hui, les conduisit à une mesure disciplinaire dont Galilée « eut beaucoup à souffrir ». Il faut loyalement reconnaître ces torts, comme vous l'avez demandé, Très Saint-Père. »

Dans son discours aux participants à la session plénière de l'Académie pontificale des sciences le 31 octobre 1992, Jean-Paul II a reconnu clairement les erreurs de la plupart des théologiens de l'époque dans l'affaire, en déclarant :
« D'abord, comme pour la plupart de ses adversaires, Galilée ne fait pas de distinction entre ce qu'est l'approche scientifique des phénomènes naturels et la réflexion sur la nature, d'ordre philosophique, qu'elle appelle généralement. C'est pourquoi il a refusé la suggestion qui lui était faite de présenter comme une hypothèse le système de Copernic, tant qu'il n'était pas confirmé par des preuves irréfutables. C'était pourtant là une exigence de la méthode expérimentale dont il fut le génial initiateur.
Ensuite la représentation géocentrique du monde était communément admise dans la culture du temps comme pleinement concordante avec l'ensemble de la Bible dont certaines expressions, prises à la lettre, semblaient constituer des affirmations de géocentrisme. Le problème que se posèrent donc les théologiens de l'époque est celui de la compatibilité de l'héliocentrisme et de l'Écriture.
Ainsi la science nouvelle, avec ses méthodes et la liberté de recherche qu'elle suppose, obligeait les théologiens à s'interroger sur leurs propres critères d'interprétation de l'Écriture. La plupart n'ont pas su le faire.
Paradoxalement, Galilée, croyant sincère, s'est montré plus perspicace sur ce point que ses adversaires théologiens. « Si l'écriture ne peut errer, écrit-il à Benedetto Castelli, certains de ses interprètes et commentateurs le peuvent, et de plusieurs façons ». On connaît aussi sa lettre à Christine de Lorraine (1615) qui est comme un petit traité d'herméneutique biblique.
[...]
La majorité des théologiens ne percevaient pas la distinction formelle entre l'Écriture sainte et son interprétation, ce qui les conduisit à transposer indûment dans le domaine de la doctrine de la foi une question de fait relevant de l'investigation scientifique. »

Le texte complet du discours de Jean-Paul II devant l'académie pontificale des sciences le 31 octobre 1992

 

Polémique

Certains spécialistes de l'affaire Galilée considèrent que ces déclarations ont tendance à minimiser les erreurs de l'Église. Ils estiment en effet que ne sont pas mentionnées les responsabilités d'Urbain VIII et de l'Inquisition, que l'on ne fait pas référence à l'interdiction de 1616, et que l'on rend Galilée coresponsable de sa condamnation par le fait qu'il n'a pas respecté la méthode expérimentale pour apporter les preuves de l'héliocentrisme.

Par ailleurs, Luca Bianchi estime que les experts de la commission ont omis d'évoquer l'argument de la toute-puissance divine, qu'Urbain VIII, croyant la thèse de l'héliocentrisme indémontrable, avait demandé à Galilée d'insérer en conclusion du dialogue sur les deux grands systèmes du monde, et que Galilée a retourné en faveur de la thèse de l'héliocentrisme.

 

Relations avec le judaïsme

 

Position du problème

L'attitude de l'Église face à la persécution des juifs par les nazis dans les années 1930, et l'attitude du Vatican à l'égard des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale, sont de nature à s'interroger sur l'image des juifs dans la psyché chrétienne à la veille et au cours de la Seconde Guerre mondiale, et à interpeller sur l'histoire des relations entre le christianisme en général et le judaïsme.

 

D'indéniables actions de protection de juifs par des chrétiens pendant la Seconde Guerre mondiale

Un nombre important de prêtres, de religieux ou de religieuses, de monastères ou de laïcs, cachèrent et sauvèrent un nombre significatif de juifs de la déportation. Beaucoup ont été élevés au rang de « juste parmi les nations ».

On estime entre 130 000 voire jusqu'à 170 000, le nombre de juifs cachés par les organes officiels du Vatican ; le rabbin David Dalin, dans son fameux livre PIE XII et les juifs, démontre point par point combien finalement des chefs catholiques sauvèrent des juifs de la persécution. Or PIE XII [Eugenio Maria Giuseppe Giovanni Pacelli (Rome, 2 mars 1876 - Castel Gandolfo, 9 octobre 1958), élu pape le 2 mars 1939 sous le nom de Pie XII (en latin Pius XII, en italien Pio XII). La cause pour sa béatification est bien avancée, selon son postulateur, le jésuite allemand Peter Gumpel.] est un pape controversé dans sa prise de position pendant cette deuxième guerre mondiale, mais le rabbin David Dalin écrit clairement à son propos : « Jamais un pape n’a été autant félicité par les Juifs. Immédiatement après la Seconde Guerre mondiale et durant les années qui ont suivi, des centaines de manifestations d’estime envers Pie XII ont été apportées à son égard de la part des plus hautes autorités d’Israël depuis Mme Golda Meir et le Grand Rabbin de Jérusalem, jusqu’au Grand Rabbin de Rome, Elio Toaff. »

Le grand rabbin de Rome, le rabbin Israël Zolli, est né en 1881 à Brody, qui fut rejeté par une partie de la communauté juive de Rome, se convertit, avec son épouse, au catholicisme. Pour prénom de baptême, il choisit de s'appeler « Eugenio Pio », en hommage au pape Pie XII, né Eugenio Pacelli, en raison de son action pour les Juifs de Rome pendant la Seconde Guerre mondiale. Professeur à l'Institut biblique pontifical, Eugenio Zolli mourut à Rome en 1956, à l'âge de 74 ans. La famille sortit son autobiographie publiée en 1954, Prima dell'alba, décrit les circonstances de sa conversion et explique les raisons de son admiration envers Pie XII. On y lit notamment : « La rayonnante charité du Pape, penché sur toutes les misères engendrées par la guerre, sa bonté pour mes coreligionnaires traqués, furent pour moi l'ouragan qui balaya mes scrupules à me faire catholique. »

 

Une nécessaire repentance face à trop d'indifférence vis-à-vis des persécutions

Selon Menahem Macina, les apologètes inconditionnels de l'Église cherchent à prouver que le Saint-Siège n'a jamais eu de propos préjudiciables pour les juifs, en adoptant comme stratégie d'insister sur les actes d'aide, voire de sauvetage, accomplis par des prélats, clercs et fidèles catholiques, en les attribuant, par délégation, à Pie XII lui-même, censé les avoir encouragés.

Les actions de protection citées ci-dessus, pour réelles qu'elles soient, n'expliquent pas l'indifférence ou, au mieux la gêne et l'absence de réaction de tant de chrétiens face à la déréliction des juifs atteints par les cruelles mesures de l'antisémitisme d'État dans les pays contrôlés par le Reich allemand.

Il est reconnu depuis les années 1950-1960 que l'antisémitisme puise une partie de ses racines dans l'antijudaïsme chrétien. L'historien juif Jules Isaac a montré dans deux ouvrages (Jésus et Israël, l'Enseignement du mépris), que l'antisémitisme trouvait certaines de ses origines dans l'enseignement chrétien.

 

Les déclarations de repentance

Les Églises chrétiennes ont exprimé des repentances :
  • Les principales prises de position du protestantisme se trouvent dans Spiritualité théologie et résistance.
  • L'Épiscopat allemand et l'Épiscopat polonais ont fait une déclaration sur l'attitude de leur Église pendant la guerre à l'occasion du 50e anniversaire de la libération d'Auschwitz en 1995 (Documentation Catholique n° 2110, pp. 188-191).
  • En 1997, les évêques de France ont fait une déclaration de repentance.
Voir : La déclaration de repentance des évêques de France
  • En mars 1998, une déclaration émanant de la Commission vaticane pour les relations avec le judaïsme, comportant une introduction de la main du pape lui-même, appelait les chrétiens à une prise de conscience et à la reconnaissance de la spécificité de la Shoah. Elle admettait l'existence d'une culture antijudaïque diffusée par l'Église dans le passé. L'accueil fait à cette déclaration fut mitigé, certains considérant qu'elle se positionnait trop en retrait de la déclaration faite par l'épiscopat français l'année précédente.
Citation de Jean-Paul II
« Vous êtes nos frères bien aimés, et en un certain sens nos frères aînés. » Jean-Paul II à la synagogue de Rome le 13 avril 1986

 

Les grandes lignes des offenses faites au juifs

Sans entrer dans le détail de l'histoire des relations entre le christianisme et le judaïsme, on retiendra quelques grandes lignes :

Au IVe siècle, l'antijudaïsme commença à apparaître chez certains Pères de l'Église, avec la mention « déicide » dans certains passages du corpus patristique ainsi qu'au siècle suivant dans le code théodosien.

Au VIIe siècle, une mention considérée de nos jours comme offensante pour les juifs - en raison de l'évolution actuelle du sens du vocabulaire dans les langues vernaculaires - fut introduite dans les « Grandes oraisons » du Vendredi saint (Oremus et pro perfidis Judaeis).

Par la suite, il y eut régulièrement des persécutions des Juifs (pogroms, expulsions, ghettos, autodafés...), le phénomène culminant avec les marranes.

Puis dans la deuxième moitié du XIXe siècle, l'antijudaïsme se transforma en antisémitisme, avec comme conséquence la Shoah.

À la demande de l'historien Jules Isaac, de certains catholiques, comme Jacques Maritain, une nouvelle prière fut progressivement introduite dans la liturgie du vendredi saint. Jean XXIII supprima la mention incomprise en 1959. Le concile adopta une déclaration sur les relations interreligieuses en 1965 (Nostra Ætate), puis la prière du Vendredi saint fut modifiée par Paul VI dans le missel en 1966, puis à nouveau en 1969. Le catéchisme pour adultes fut également révisé en 1991 dans ce sens.

 

Réactions aux déclarations de repentance

On sait, par des propos tenus par Mgr Louis-Marie Billé, à l'ouverture en 1997 de l'assemblée plénière de la Conférence des évêques de France, dont il était le président, que la déclaration de repentance de l'Église suscita des « incompréhensions » parmi les fidèles :
« Je ne peux pas faire comme si le courrier reçu ensuite était majoritairement positif [...]. Parmi les sources d'incompréhension, je relève le trouble de certains chrétiens quant à l'image qu'ils ont de la sainteté de l'Église ; je relève la difficulté qu'ont un certain nombre de gens à saisir ce que peut avoir d'unique la relation de l'Église au judaïsme ; je relève surtout, hélas, que l'antisémitisme n'est pas mort, et que ses arguments les plus classiques, si j'ose employer ce mot, ont toujours cours. »

Invité à préciser sa pensée, Mgr Billé confiait alors :
« Certaines réflexions émanent visiblement de personnes qui n'ont pas encore pris acte des déclarations du concile Vatican II et de ce que les papes ou d'autres évêques ont pu dire par la suite. Dans ce cas, leurs questions [celles des signataires des lettres adressées aux évêques par des catholiques déstabilisés par la Déclaration de repentance] tournent autour du rapport au Christ, de sa mort, et de la responsabilité du peuple juif ; autrement dit, de la question du déicide. Notre travail d'éducation n'est pas terminé. Mais il y a malheureusement le registre plus « classique » si je puis dire, de l'antisémitisme qui reprend, en plus atténué toutefois, les griefs issus de Drumont et de ses acolytes : la notion de pouvoir occulte des juifs, leur puissance, et autres stéréotypes bien connus [...]. J'ai aussi relevé des questions qui tournent autour de ce qui se passe aujourd'hui en Israël, des rapports entre les juifs et les Palestiniens ; des critiques à l'égard de la politique du gouvernement de l'État hébreu. »

 

Repentance de l'an 2000

Le 12 mars 2000, une repentance plus générale relative aux erreurs des membres de l'Église a été faite solennellement dans la basilique Saint-Pierre de Rome. Quelques observateurs ont avancé que la repentance sur l'Inquisition aurait été assortie d'une estimation minimale du nombre des victimes.











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