Plomeur, fontaine de la Délivrance

Plomeur
fontaine de la Délivrance


Les mères interrogent sur les chances de survie de leurs bébés, les femmes de marin sur le sort de leur mari en mer, les familles de moribonds sur l'issue de la maladie de leur parent, enfin tout un chacun sur la durée de sa propre vie.
Les fontaines qui répondent à ces questions angoissantes sont dédiées à d'assez nombreux saints différents, mais l'un d'entre eux se distingue par son caractère particulièrement dramatique.
C'est saint Diboan, le saint qui délivre de toute peine. Saint Diboan est un saint breton qui n'a pas eu la reconnaissance de Rome mais qui n'en a pas moins une vingtaine de lieux de culte en Bretagne et plusieurs fontaines. Son hagiographie est un exemple de légende populaire mais son importance vient de son association étroite avec la mort. Saint Diboan peut nous sauver ou nous faire trépasser.
On lui demande en effet à tous ses sanctuaires de hâter le sort des malades gravement atteints : s'ils doivent guérir, qu'ils guérissent rapidement, mais s'ils doivent mourir qu'ils meurent rapidement. Saint Diboan est le saint de la fin des souffrances.
Pour obtenir cette grâce de saint Diboan, on utilise deux types de rituel : soit on vide la fontaine, on la nettoie et on lit dans la façon dont elle se remplit à nouveau le présage que l'on est venu chercher (l'absence de bruit de la source est interprétée comme un présage favorable); soit on emporte de l'eau de la fontaine que l'on verse sur le malade pour lequel on est allé à la fontaine Saint-Diboan, ce qui aura pour effet immédiat de soulager le moribond ou d'entraîner sa mort.
Que l'on comprenne bien, saint Diboan (ou l'eau de ses fontaines) ne tue personne, il hâte seulement un destin qu'il n'influence pas.
Néanmoins, il s'agit là de pratiques particulièrement dramatiques qui répondent à des situations de très grand désespoir. On comprend facilement aussi pourquoi saint Diboan est considéré sans enthousiasme à Rome.
Lorsque les mères viennent interroger les fontaines sur le sort de leurs enfants, elles font les mêmes gestes que lorsqu'elles demandent la protection pour leurs petits, à savoir qu'elles plongent l'enfant dans la fontaine, ou plus souvent un de ses vêtements et, des réactions de l'enfant ou de ce que devient le vêtement, elles tirent le présage qu'elles sont venues chercher.
Enfin, pour savoir le sort des marins qui tardent à rentrer au port, de même d'ailleurs que pour savoir la proximité de sa propre mort, on utilise les mêmes moyens.
On pose sur l'eau de la fontaine un morceau de pain, beurré ou non, ou une croix de brindilles et des mouvements de ces objets, on tire espoir ou non.
D'un façon générale, si le pain ou la croix coule, le présage est funeste : le marin ne reviendra pas ou vous ne verrez pas l'année qui vient.
Ces interrogations sur la mort s'inscrivent totalement dans l'esprit de la société traditionnelle et les attestations les plus récentes que j'en ai trouvées remontent à la période de l'entre-deux-guerres.
(Sylvette Denèfle, Croyances aux fontaines en Bretagne).





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