Notre-Dame des aides (Blois)

Notre-Dame des aides
(Blois)

Toutefois, nulle part cette dévotion n'était plus remarquable qu'à Notre-Dame des Aides, dans le faubourg de Vienne.
Tous les samedis on y venait de Blois en grand nombre entendre la messe, et toutes les processions générales se faisaient à ce béni sanctuaire.
Lorsque le protestantisme naissant livrait à l'Église ses premiers assauts, les fidèles du faubourg s'associèrent dans une pieuse confrérie, dite de Notre-Dame des Aides, pour s'opposer en masse aux attaques que dirigeait l'hérésie contre le culte de Marie, se soutenir les uns les autres dans la défense de la foi et en demander à Dieu la conservation.
Cette prière fut exaucée ; car à aucune époque l'hérésie n'a pu s'implanter dans le faubourg de Vienne.

Pour mieux mériter encore de la Mère de Dieu, les pieux fidèles érigèrent en son honneur une autre confrérie, dite de la Sainte-Conception de Notre-Dame, en ajoutant au sanctuaire de Vienne un petit hospice, appelé du même nom, qui semble avoir donné naissance à l'hôpital érigé depuis ; et les archives de Saint-Dyé-sur-Loire mentionnent plusieurs dons et legs faits par les fidèles de cette paroisse à la Maison-Dieu de Notre-Dame de Vienne.
Lorsqu'en 1631 une peste meurtrière, contre laquelle tous les efforts de l'art étaient impuissants, dépeuplait la ville de Blois, les habitants tournèrent leurs regards vers Notre-Dame des Aides.
Le conseil municipal, par délibération du 6 septembre de la même année, fit vœu d'aller en procession à la Vierge de Vienne, d'y faire célébrer une messe solennelle, et de renouveler chaque année, pendant trente ans, la même cérémonie.
Le procès-verbal de la délibération qui se lit encore dans les registres de la ville, est digne d'attention : « Porteront les échevins, y est-il dit, à l'offerte (c'est-a-dire l'offrande), un cierge de cire blanche du poids d'une livre ; et sera faite prière à Dieu, à ce que, par l'intercession de la glorieuse Vierge Marie, il lui plaise d'apaiser son ire (c'est-à-dire sa colère) et faire cesser les maladies contagieuses dont cette ville et le pays sont affligés. »
La procession se fit en effet avec une grande pompe et un concours plus grand encore, le 8 septembre, fête de la Nativité de la sainte Vierge. Le chef des échevins prononça le vœu au pied de l'autel, et aussitôt le vœu prononcé, la peste cessa.


Les habitants de Blois, dit l'annaliste Bernier, n'eurent pas plutôt fait leur vœu, que la colombe des Cantiques leur apporta le rameau d'olivier. 
Miracle frappant de la protection de Marie, qu'attestent tout ensemble et les registres de la municipalité qui en font foi, et plusieurs manuscrits du temps, et le fait même de l'accomplissement du vœu, qui depuis lors, jusqu'en 1793, a été fidèlement exécuté chaque année, enfin deux monuments destinés à en perpétuer le souvenir : le premier est un tableau commémoratif, qui se voit encore aujourd'hui dans l'église de Vienne, au-dessus de l'autel de la sainte Vierge, et où sont représentés les officiers municipaux avec un père capucin, dans un coin du tableau, pour rappeler aux âges futurs le dévouement des religieux de cet ordre au service des pestiférés.
Le second est la pose de statuettes de la sainte Vierge sur les cinq principales portes de la ville, en vertu d'une délibération municipale du 2 mars 1632 : « Pour rendre grâces à Dieu, y est-il dit, de ce qu'il lui a plu apaiser son ire aussitôt que le vœu a été fait. » Une de ces statues se voit encore aujourd'hui à une maison de la rue Porte-Côté, qui fait angle avec la grande rue.
Touchés, comme le conseil municipal, de la plus vive reconnaissance pour la Mère de Dieu, les habitants de Blois placèrent de toutes parts, surtout au-dessus de la porte de leurs maisons, des statuettes de Marie : on en voyait à la fontaine des Élus, à la fontaine de l'Arcis, aujourd'hui place Louis XII, où existe encore la niche, hélas ! vide, et au coin de la rue qui avait pris de là le nom d'Ave, Maria.

Lorsqu'en 1696 le pays fut affligé de pluies torrentielles qui ravageaient les campagnes et minaient les habitations, les pieux Blésois n'eurent garde d'oublier leur protectrice : ils vinrent en procession à la Vierge de Vienne, et à peine la messe chantée à son autel fut-elle terminée, qu'aussitôt les pluies cessèrent ; le ciel revêtit une sérénité depuis longtemps inconnue, et un beau soleil réjouit tous les regards.
A deux autres époques, le 11 novembre 1784 et le 3 août 1803, le faubourg de Vienne fut menacé d'être submergé sous les eaux de la Loire, qui, débordée et grossissant sans cesse ses ondes en fureur, allait tout envahir.
Les habitants effrayés courent à leur patronne et se précipitent vers son autel ; on y célèbre le saint sacrifice, et au moment même de l'élévation, les ondes furieuses s'arrêtent, se retirent peu a peu, rentrent dans leur lit, et Vienne est sauvé.
Frappé d'une protection si visible, un honorable habitant conçut l'idée d'un monument qui fût comme une prière permanente à la sainte Vierge, pour qu'elle continuât à jamais le même bienfait à ses concitoyens ; et pour cela, il ordonna par testament d'élever sur sa tombe, au cimetière, une chapelle à la sainte Vierge, avec cette inscription : Je dédie cette chapelle à Marie, en la priant de protéger le faubourg de Vienne contre les inondations de la Loire.
Mais ce n'était pas seulement dans les calamités publiques qu'on recourait a Notre-Dame des Aides ; chacun venait encore confier à cette puissante protectrice ses peines privées ; et de nombreux ex-voto, qu'a détruits la révolution de 1793, attestaient qu'on ne l'invoquait point en vain.
Ce n'était pas non plus seulement le simple peuple qui avait foi à la Vierge de Vienne ; les plus hauts personnages venaient la prier avec confiance et aimaient à manifester par des actes publics combien elle leur était chère.
Anne de Bretagne, épouse de Louis XII, fit reconstruire en 1512 le grand portail de l'église avec les deux premières travées, et la mort seule l'empêcha à son grand regret de continuer toute la nef sur le même plan.
Catherine de Médicis, qui mourut à Blois en 1589, et après elle Marie de Médicis, ne se montrèrent pas moins dévouées à ce pieux sanctuaire. Catherine, non contente d'ordonner que ses entrailles y fussent déposées, fit don à la chapelle de la Vierge d'une lampe d'argent, d'un ostensoir en vermeil de grand prix, de magnifiques chapes brodées d'or, d'un crucifix de grandeur naturelle, merveilleusement travaillé, et d'une rente perpétuelle pour l'entretien de la lampe qui devait toujours y brûler devant l'image de Marie, comme symbole de l'amour qu'elle voulait toujours lui porter.

Lorsqu'en 1588 les États généraux se tinrent a Blois, on voulut, avant de les ouvrir, les placer sous le patronage de Notre-Dame de Toutes-Aides, et en conséquence une procession solennelle, composée du roi, de la reine, des députés des trois ordres et des hauts dignitaires de l'État, se rendit du château à l'église de Vienne, qu'on avait pour cette circonstance toute tendue des plus riches tapisseries de la cour.
Là, le splendide cortège entendit la messe du Saint-Esprit célébrée par l'archevêque de Bourges, et, prosterné aux pieds de Marie, implora par elle les lumières du ciel pour traiter dignement les graves questions d'intérêt public qui devaient être proposées à la délibération des États, et sur lesquelles les vues de la sagesse humaine sont toujours trop courtes et sujettes à se tromper.
Quelques années plus tard, Louis XIII renouvela dans l'église de Vienne la consécration de sa personne et de son royaume à la sainte Vierge, et fit don à l'église, pour en perpétuer le souvenir, d'un grand ex-voto où il était représenté se consacrant à la Mère de Dieu, lui et toute la France.
Animé des mêmes sentiments, son frère Gaston d'Orléans confirma la fondation faite par Catherine de Médicis d'une rente perpétuelle pour l'entretien de la lampe qui devait brûler jour et nuit dans ce sanctuaire ; Louis XIV, à son tour, confirma cette disposition du prince son oncle, et cette rente a été payée par le domaine jusqu'à la révolution de 1793.
Encouragées par des exemples descendus de si haut, les populations voisines, et d'autres même assez éloignées, venaient processionnellement chaque année en pèlerinage à l'église de Vienne.
Le lundi de la Pentecôte, c'était la paroisse de Landes, située aux limites du Vendômois ; le jour de sainte Anne, c'était la paroisse des Montils, distante de trois lieues ; d'autres jours, c'étaient Vineuil, Saint-Claude, Villebaron et plusieurs autres.
La paroisse Saint-Léonard, au mois de mai 1772, franchit à pied une distance de sept lieues pour venir demander à la Bonne Dame de Vienne la cessation d'une sécheresse prolongée qui désolait le pays, et son espoir ne fut pas trompé.
Malheureusement, depuis la révolution de 1793, ces pieux usages sont tombés, comme tant d'autres bonnes choses que la tempête a fait disparaître. Mais le principe est demeuré, et la dévotion à Marie vit encore de nos jours au cœur des Blésois.
Lors de l'invasion du choléra en 1849, comme à la terrible inondation du 3 juin 1856, ils retrouvèrent leur antique foi à Notre-Dame des Aides : ils vinrent la prier pendant que le fléau sévissait, et la remercier lorsqu'il eut cessé de sévir.
Source : Livre "Notre-Dame de France ou Histoire du culte de la Sainte Vierge en ..., Volume 1" par André Jean Marie Hamon





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