Légendes, coutumes et croyances populaires Animaux

Légendes, coutumes
et croyances populaires

Animaux
 

Afin que ceux que l'on vient d'acquérir oublient plus vite leurs anciens maîtres et ne soient plus tentés de retourner chez eux, il faut avoir soin, disent les habitants de Cornimont, de faire une petite croix sur le linteau de la porte de leur nouvelle écurie.

On doit aussi leur conserver la corde qu'ils avaient au cou quand on les a achetés et ajouter à ces pratiques celle de leur donner du sel  avec la main droite plutôt qu'avec la main gauche. A Raon-aux-Bois, on leur donne, le matin avant de sortir des étables, une tartine de beurre tournée trois fois autour de la crémaillère, et qui doit leur être présentée de la main droite.

A Labresse, on a soin de leur donner abondamment à manger avant d'aller à la messe de minuit.

A Cornimont, à Raon-aux-Bois, à FrEsse, au Val d'Ajol et dans quelques autres communes, on croit encore qu’ils se lèvent et conversent ensemble pendant la célébration de cet office nocturne, et on raconte à ce sujet qu'un habitant du premier de ces villages jouissant de la réputation d‘être un esprit fort (il y en a dans nos montagnes des Vosges aussi bien qu'à la ville), voulut s'assurer de ce fait surnaturel, et alla se cacher dans un coin obscur de l'écurie située derrière sa maison, où à l'heure de minuit il vit et entendit un de ses bœufs se réveiller, puis se lever pesamment et demander en baillant à son compagnon de fatigue, ce qu’ils feraient tous deux le lendemain ; celui-ci lui répondit qu’ils conduiraient leur maître au cimetière. La chose ne manqua pas d'arriver, dit la tradition, notre esprit fort ayant été saisi d'une telle frayeur qu'il en tomba raide mort sur place. Ainsi sans doute le racontèrent les bœufs.

On assure qu'une semblable aventure arriva aussi à une femme de Raon-aux-Bois que la curiosité avait engagée à visiter ses étables pendant le même office de minuit, et apprit également de ses bœufs qu’ils ne tarderaient pas à la conduire en terre.

A Noyal, département du Morbihan, pays, comme notre Lorraine, de vivaces croyances superstitieuses, « un paysan ivre, dit M. Emile Souvestre (Les Bretons, édit. in-12, page 114) s'endormit ce jour-là (la nuit de Noël) dans son étable auprès de son attelage. Il entendit un des bœufs qui disait à l'autre, que ferons-nous demain ? l'autre répondit nous traînerons notre maître en terre. Le paysan furieux se lève, tu en as menti bête maudite, dit-il, et d'une hache qu'il a saisie, il veut frapper l'animal, mais sa main que l'ivresse rend chancelante, s'égare, il se donne la mort et la prédiction du bœuf s'accomplit. »

Ces trois contes populaires de contrées si éloignées l'une de l'autre attestent, du moins, la croyance fort ancienne du don fort précieux de la parole accordé aux animaux pendant la célébration de la messe de minuit, en considération sans doute, ajoute M. Emile Souvestre, du bœuf et de l'âne qui se trouvaient dans l'étable, à Bethléem, à la naissance du Christ. Encore faut-il supposer que ce dernier fait soit vrai.

On voit encore clouées à la partie extérieure de la porte des granges de beaucoup d'habitants de la campagne, des têtes de loups, de renards, d'oiseaux de proie, qu’on regarde comme autant de témoignages de l'adresse des chasseurs qui ont détruit ces animaux carnassiers, la terreur des basse-cours. Cet usage ne serait-il pas plutôt un reste d'une vieille superstition des Romains, (Pline, Histoire naturelle, livre XXVIII) et des Germains, avant leur conversion au christianisme (M. l'abbé Clouet, Histoire ecclésiastique de la province de Trêves, vol. 1er, page 398), qui croyaient que ces ossements, réputés sacrés, devaient préserver leurs demeures de toutes sortes de maléfices ?








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