Apocryphes

Apocryphes


On qualifie d’apocryphe (du grec ἀπόκρυφος / apókryphos, « caché ») un écrit « dont l'authenticité n'est pas établie  » (Littré).

Dans le domaine biblique, l'expression désigne, à partir de la construction des canons, un écrit considéré comme non authentique parce que jugé par les autorités religieuses comme non inspiré par Dieu. L'acception du terme a pu être interprétée de différentes façons ; ainsi, Jérôme de Stridon nommait « apocryphes » les livres deutérocanoniques de l’Ancien Testament et les considérait comme non-canoniques.

Le qualificatif « apocryphes » est donné par les protestants à certains textes appelés deutérocanoniques par les catholiques, qui se trouvent dans la Septante et la Vulgate mais pas dans la Bible hébraïque. Les livres de l’Ancien Testament que les catholiques nomment « apocryphes », sont dits « pseudépigraphes » par les protestants.

Histoire de la notion

Apocryphes et pseudépigraphes

Origène confond les deux notions :
« […] qui sont mis sous le nom des saints entendant par saints les personnages bibliques, et qui sont en dehors des « Écritures canoniques ». […] Nous n'ignorons pas, dit-il, que beaucoup de ces écritures secrètes ont été composées par des impies, de ceux qui font le plus haut sonner leur iniquité, et que les hérétiques font grand usage de ces fictions : tels les disciples de Basilide. Nous n'ignorons pas davantage que d'autres de ces apocryphes, mis sous le nom de saints, ont été composés par les Juifs, peut-être pour détruire la vérité de nos Écritures et pour établir de faux dogmes. Mais, en règle générale, nous ne devons pas rejeter en bloc, ce dont nous pouvons tirer quelque utilité pour l'éclaircissement de nos Écritures. C'est la marque d'un esprit sage de comprendre et d'appliquer le précepte divin : « Éprouvez tout, retenez ce qui est bon » » (Origène, In Matth. Comm., Ser XXVIII, t XIII col 1637).
Le doute sur l'authenticité va de pair avec le doute sur l'inspiration et est à l'origine de la construction des canons par une autorité, car c'est le critère invoqué pour justifier de l'introduction ou du rejet d'un texte dans le canon. Le critère d'authenticité dépend donc, comme le montre Origène, de la confiance du lecteur à l'égard de cette autorité.
Les apocryphes sont toutefois à distinguer des pseudépigraphes, qui sont des œuvres dont on ne peut assurer l'origine, ou attribuées à une personne dont on sait qu'il est impossible qu'elle les ait écrites elle-même. L'exégèse moderne a montré que c'est le cas de plusieurs textes canoniques. En fait, les critères d'authenticité ont notablement évolué depuis le temps de la construction des canons. L'Antiquité admettait comme authentique un écrit qui n'avait pas été directement rédigé par son auteur désigné mais qui en reflétait la pensée, par exemple s'il émanait d'un groupe de disciples.
Les apocryphes sont précieux pour étudier les formes littéraires comme le contexte de production des œuvres canoniques et pour connaître les mouvements religieux dissidents du judaïsme et du christianisme anciens.

Livres deutérocanoniques (apocryphes dans le protestantisme)

Deutérocanonique (du grec δευτερος, deuxième) signifie « entré secondairement dans le canon », ce qui n'implique pas une hiérarchisation du degré d'inspiration.
L'Église catholique nomme apocryphes les textes qu'elle n'a pas retenus dans son canon tandis que les Églises issues de la Réforme les nomment pseudépigraphes. En ce qui concerne les écrits de l'Ancien Testament, elle nomme deutérocanoniques ceux que les Églises protestantes nomment apocryphes.
Cette différence tient au fait que le christianisme a d'abord tenu pour inspirée la Septante qui contient de nombreux livres qui n'étaient pas dans la Bible Hébraïque. Au XVIe siècle, les humanistes comme Didier Érasme et Jacques Lefèvre d'Étaples, ainsi que les protestants reviennent au texte hébreu là où Jérôme avait compilé les sources grecques et hébraïques.
Catholiques et orthodoxes font valoir que le canon court, retenu par les Églises réformées, a été fixé par des docteurs juifs au synode de Jamnia, après l'apparition du christianisme et en réaction contre lui.
Les livres deutérocanoniques du Nouveau Testament sont très généralement acceptés par les Églises chrétiennes.
Voir l'article spécifique Livres deutérocanoniques

Utilisation des apocryphes

Rôle des apocryphes chrétiens dans la vie ecclésiale

Si certain apocryphes chrétiens sont exclus d'utilisation par la « Grande Église » pour des raisons théologiques, certains, en dépit même de leur éventuelle condamnation, ont joué un rôle non négligeable dans la vie ecclésiale. Ainsi une étude de la savante Els Rose a démontré que le Moyen Âge occidental a utilisé des traditions apocryphes dans ses liturgies de commémoration des apôtres.
De même, certaines Églises produisent des traditions apocryphes pour fonder leurs légitimités apostoliques. Ainsi les Actes de Barnabé sont ils produits à la fin du Ve siècle pour défendre l'auto-céphalie de l'Église de Chypre. En ce qui concerne l'Église de Rome, si elle n'est pas à l'origine des apocryphes du deuxième siècle relatant les missions de Pierre et Paul à Rome, elle fusionne ces traditions pour produire des textes mentionnant le martyre des apôtres le même jour.






 



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