Ainhoa Notre-Dame d'Arantzazu

Ainhoa 
Notre-Dame d'Arantzazu

Ainhoa : Notre-Dame d'Arantzazu



L'apparition

Ainhoa : Notre-Dame d'Arantzazu



D'après ce récit de M. le Chanoine Duvoisin, la Vierge apparut à un jeune berger.

C'était sur les flancs de l'Atxulai, la hauteur qui domine le village, près de l'actuelle source d'où coule « une eau bienfaisante» que l'on appela dès lors, fontaine miraculeuse. Elle coulait à l'ombre d'un buisson d'aubépine ou arantza en basque. Le berger fut attiré par quelque chose qui brillait dans ce buisson. Le récit dit que cet éclat «représentait une dame ». C'était Marie. Le berger s'entretint avec elle.


Le jeune berger redescendit de la montagne pour annoncer l'événement à tout le village. Les ainhoar le prirent au sérieux et édifièrent un sanctuaire à celle qui allait devenir leur Vierge : Arantzeko Birjina.
Ils voulurent le construire un peu plus bas qu'il n'est actuellement, sur le replat qui domine karrika (la rue).
Mais les matériaux qu'ils rassemblaient dans la journée se retrouvaient, au petit matin, sur le site de l'actuel sanctuaire. Ils se sont soumis à la volonté divine et l'actuelle kapera (chapelle) vit le jour.
L'édifice domine tout le bassin de Xareta dont c'est le sanctuaire montagnard majeur.

Le cantique le souligne :


gravissons tous allégrement les pentes de l' Atxulai, c'est là-haut qu'est la chapelle de la mère ! :
« Goazen airoski denak Axulai alderat Hara mendi gainean Amaren kapera ! »


Arantzazu


En Pays basque sud, dans la province du Guipuzcoa, au cœur des montagnes d'Ofiate, on raconte un récit comparable : un jeune berger, appelé Rodrigo, de la maison Balzategi du quartier Uribarri, vit la Dame. C'était en pleine époque du solstice, le 3 juin (dit-on parfois) 1469.
Le choix de cette date ne relève pas du hasard, l'aubépine est une plante « solaire », réputée protectrice; l'ethnologie l'atteste largement. En christianisant les pratiques où elle est mise oeuvre, on mettait ainsi une distance entre des forces de la Nature et nous. En outre on apprenait à les intégrer dans une large vision qui visait à recentrer et à dédramatiser nos peurs viscérales.

La Dame, Mari et Marie

A Ofiate, ce haut lieu était depuis longtemps connu pour être fréquenté par celle que l'on nomme en basque, Dama ou Mari. Mari n'étant que l'un des nombreux noms de la Dame.
Une Dame et une Mari, le christianisme n'eut aucune peine à la convertir en Vierge Marie.
Dans le cadre d'Arantzazu d'Ofiate, cette Dame était la divinité principale parmi sept autres « Dames» dont les exploits sont rapportés dans la mythologie basque. Une fois cette ambiance christianisée, ces dames devinrent naturellement une seule et même «Vierge aux sept soeurs».
A Ainhoa le récit précise bien que le jeune berger avait vu briller la Dame dans le buisson, une dame voyageuse. Nous sommes au cœur des éléments de base des récits chargés de mettre en scène cette entité.
C'est ainsi qu'à moment donné, Arantzazu de Guipuzcoa a du centrer le mythe de Mari. Puis ce mythe fut épuré dans le culte marial. C'est alors que le sanctuaire d'Ainhoa a pu se retrouver tout naturellement placé dans son orbite.
Arantzazu d'Ainhoa et d'Ofiate appartiennent au fond proprement cosmogonique des Basques, plus largement, à leur imaginaire. Ces sites concrétisent une sorte de pan d'Histoire ; ils expriment à leur manière, notre
façon de vivre concrètement notre rapport avec le sacré. .

Le dernier ermite

Comme dans tant d'ermitas (kaperak) du Pays basque, au sanctuaire est associé une habitation. Habituellement se sont des femmes qui les dirigent (et même un « clergé» féminin composé de Serora et autres Andere serora). Ce fut très tôt le cas à Ofiate.
A Ainhoa le seul témoignage que nous connaissons, est récent. C'est celui du dernier ermite, l'ainhoar Jean-Baptiste Beherecoetche. Il était né en 1745 dans la maison Gorritia, ses parents étant locataires. Il se consacra à kapera dès l'âge de 17 ans ; il resta quelques 70 ans à son service et mourut en 1825 dans la maison Coscorenia. Il avait ouvert une école servant, au moins, à l'instruction des petits bergers fréquentant les lieux.
Témoin probable du plus vieil Ainhoa (d'avant le lotissement médiéval 7), kapera fut souvent ruinée. Elle le fut en 1793, pendant les guerres franco-espagnoles. Puis, les armées françaises la détruisirent en 1813, pour fortifier
le site et y mettre une batterie de canons; à cette époque les restes des armées napoléoniennes s'enfuyaient devant la coalition anglohispano-portugaise, semant, ici et là, de vaines redoutes et fortifications (plusieurs autour d'Ainhoa).
A ces deux reprises ce fut notre ermite qui la releva de ses ruines.

Le site religieux

Ainhoa : Notre-Dame d'Arantzazu

Ainhoa : Notre-Dame d'Arantzazu


On accède à la chapelle par un chemin de croix qui fut édifié vers 1886, sous l'impulsion de l'abbé Duronea.
Puis les cultes connurent une nouvelle vigueur, le sanctuaire fut restauré l'année suivante.
Ainhoa : Notre-Dame d'Arantzazu

En 1897 on fabriqua une sorte de grotte à l'endroit où l'on dit que la Vierge apparut et d'où jaillit la fameuse source.
L'année suivante fut érigé, à peu de distance, le calvaire, donné par un fils du village, « l'américain» Saint Martin Etchart. C'est de là que, pour Pentecôte, se font les prières et que se donnent les bénédictions protégeant le pays.

Ainhoa : Notre-Dame d'Arantzazu




























Ainhoa : Notre-Dame d'Arantzazu


Ainhoa : Notre-Dame d'Arantzazu

On installa plus tard la représentation d'une descente de croix, dans une petite construction, devant la chapelle.

Ainhoa : Notre-Dame d'Arantzazu


Cultes :
Nous avons au Pays basque deux grands types de sanctuaire marial. Certains sont dédiés à des Vierges noires, d'autres à des Vierges blanches comme ici. A ces dernières sont associées :
- la présence de la Dame à laquelle se substitua la Vierge et plus souvent la mère. C'est le cas au village, où un cantique dit que dans cet endroit célèbre nous avons choisi de louer la mère: « Hau dugu Arantzeko toki ezaguna, Amaren laudatzeko hautatu duguna »
- des végétaux comme l'aubépine, le frêne, le jonc. L'aubépine protègerait de la foudre ainsi que des maléfices. Dans l'imagerie comme dans littérature tant écrite qu'orale, qui véhiculèrent du merveilleux chrétien, l'aubépine, encore appelée « blanche épine », est consacrée à la Vierge. On raconte même qu'elle protégea de la foudre la Sainte Famille.
Ses fleurs séchées, ou en décoction, calmeraient les nerveux ; ses fruits sont recherchés pour leur qualité nutritive (et la variété beltxa sert à faire du fameux Patxaran), etc.
- le transport miraculeux des matériaux en un lieu choisi par la divinité,
- les soins, grâce à des sources miraculeuses (dans tout ce massif abondent des eaux dont les effets sont bien connus ; certaines sont très fréquentées, comme Harpeko saindua de Bidarray),
- les protections des récoltes (messes Harri kontra, pour se prémunir des effets de la grêle) et autres préventions de calamités (sécheresse, épidémies...),
- classique en Pays basque, le prénom Arantxa fut toujours porté par des jeunes filles de ce secteur.
Autrefois, certains de ces cultes donnaient lieu à des romérias (repas et sauts basques en plein-air, près des sanctuaires). C'est ainsi qu'au XIXe siècle au moins, après la traditionnelle procession de Pentecôte suivie de la messe, les gens mangeaient là haut, en plein-air. Puis ils redescendaient danser au préau qui se trouvait à côté d'Etxexuriborda. C'est ce que nous dit le célèbre bascologue Fabre, de la maison Fabrenia.
Très peu de ces cultes ont été délaissés, c'est le cas de cette procession qui incluait la chapelle dans l'une des quatre grandes processions annuelles qui dessinaient une vaste croix dans le village, et que l'on effectuait il y a peu, dans le cadre des Rogations et de la Saint Marc.
Les cultes à la chapelle sont toujours réguliers et très vivaces (processions, messes, conjurations...). Ils continuent de mobiliser bien des menditar (éleveurs en montagne) de tout ce massif navarro-Iabourdin (Urdax et Zugarramurdi, Souraide, quartier Basaburu d'Espelette, Ainhoa, au moins).
Pour tous les ainhoar, kapera est un sanctuaire habituel où le curé du village officie, comme il le fait à l'église dans karrika. C'est aussi le seul sanctuaire montagnard dédié à la Vierge protectrice en Pays basque nord; cependant il existe d'autres sanctuaires de type « ermitage» où la Vierge est évoquée mais qu'elle ne visita pas. Ils sont en particulier dans le bas-pays, sur la côte, ainsi à Urrugne à Notre Dame de Socorri où se déroulent des pèlerinages annuels.
Terminons avec le couplet d'un chant à notre Vierge d'Arantzazu, que nous a composé M. l'abbé R. Idiart,
curé du village :
« Arantzazurat Ainhoan gaindi gira heldu Ama Birjina.
Lur zabalean Jaun izan bedi zuk sortu Jainko gizon egina ».

(Source : http://www.ainhoa.fr/pdf/arantzazu.pdf)

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